À quoi sert l’ASSR ?
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Attestation Scolaire de Sécurité routière
L'école qui comme chacun sait, remplit remarquablement bien sa mission initiale : apprendre à lire, écrire, compter, est toujours en quête de nouvelles tâches pour passer le temps. Ainsi quand un problème survient dans la société, on se précipite en haut lieu pour inventer une nouvelle matière, un nouveau programme, un petit supplément incontournable. Puisque la société, les familles, l'état sont impuissants à éduquer les masses, c'est l'école qui doit supporter la charge supplémentaire.
De l'éducation civique, routière, écologique, au développement durable, à la sexualité, à la santé, à l'écologie, à l'orientation, bientôt à l'économie, la liste n'en finit pas de s'allonger. On perçoit d'ailleurs une redoutable faille dans ces désignations multiples : on en appelle à l'éducation quand le propre de l'école devrait être de se préoccuper d'enseignement ou bien d'instruction (instruction publique était jadis une désignation beaucoup plus conforme à notre mission première)
L'éducation relève d'abord de la responsabilité des familles. On devine à voir surgir toutes ces missions que nos chers dirigeants estiment que celles-ci ne remplissent plus vraiment leur rôle. Pourtant, comme je vais tenter de vous le démonter, il y a bien des manières d'initier son rejeton à la pratique de l'espace collectif.
Dernièrement, des familles bien sous tous rapports, des gens de bonne famille, distingués et à la haute tenue morale se sont lancées dans une éducation à la manifestation de rue, ce qui atteste d'une volonté de prendre en main ce volet par nos amis catholiques. Marchant en rangs serrés au milieu de la rue, ils ont délaissé les trottoirs malgré les règles communément admises.
Hélas, je crains que ce petit supplément éducatif soit en totale contradiction avec les attentes de nos inspecteurs généraux qui nous confient l'éducation routière. La chaussée appartient aux véhicules quand les trottoirs sont réservés aux piétons. Comment voulez-vous que nos enfants s'y retrouvent quand les pratiques contradictoires fleurissent dans tous les milieux ?
Les enfants des amateurs parisiens de football apprennent quant à eux, qu'il faut toujours affronter un contrôle policier cagoulés et en bandes compactes. Nouvelle approche de l'usage de la rue, celle-ci exige des compétences qui permettent une approche interdisciplinaire avec le sport, la chimie et l'art de la fugue. Curieusement, les mêmes roulent sans casque dès qu'il s'agit d'utiliser un deux roues. Il y a de quoi perdre la tête ! C'est seulement quand ils vont au stade qu'ils tendent la main, bien droite, au dessus de leur tête : signe évident de mauvaise conduite ...
Dans les quartiers on se demande bien pourquoi passer une telle attestation (ASSR ...) quand chacun peut librement et dès le plus jeune âge conduire un véhicule. Les petites motos, les scooters puis les voitures constituent une progression logique bien plus efficace que nos pauvres séances moralistes. Le permis n'est pas un papier indispensable, d'ailleurs papa conduit toujours alors qu'il a perdu son précieux papier rose et le grand frère roule au volant d'une grosse berline allemande sans jamais avoir fréquenté la préfecture.
Pour les quelques enfants qui ont échappé à toutes ces dérives honteuses, ils ont encore la possibilité de douter de nos exigences en regardant la télévision. À longueur de séries ou bien de films américains, on transgresse les règles de sécurité, les limitations de vitesse ou bien les signalisations routières. Le héros se sort toujours indemne de ces folles courses poursuites ; c'est bien la preuve que ce que prétendent les enseignants est parfaitement stupide.
Pourtant, soucieux de respecter scrupuleusement les ordres de mes supérieurs, j'ai fait passer ce maudit ASSR à mes chers élèves. Non seulement, la consigne implicite était qu'il fallait un maximum de réussite mais plus encore, les questions sont d'une telle indigence qu'il s'agit surtout d'un test de langue de bois et de truismes au ras des pâquerettes plutôt que d'une vraie connaissance de la sécurité routière.
J'ai eu le sentiment de perdre mon temps, de faire semblant de donner de l'importance à une parodie pitoyable. C'est ainsi que l'on discrédite l'école, qu'on donne à comprendre aux élèves que le principe premier des tests de cette nature, des examens ou bien des évaluations est de faire réussir le plus grand nombre sans effort ni véritable apprentissage. C'est sans doute pourquoi, nos chefs appellent cela « Éducation » ; on y a retiré toute idée d'effort et de difficulté.
Alors, jouons les hypocrites et félicitons les élèves qui ont rempli cette simple formalité. Quant à ceux qui ont cru bon de s'absenter ce jour-là, ceux qui sont arrivés en retard ou bien le seul qui n'a pas réussi cette épreuve si sélective, il y aura une session de rattrapage pour le seul critère qui vaille aujourd'hui : le taux de réussite. Ami des statistiques bonsoir !
Routièrement vôtre
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