Plan européen de relance de 750 milliards d’euros : la dernière chance de l’Europe des 27
Que faut-il penser du plan de relance de 750 milliards que la Commission Européenne vient de présenter ? Est-il suffisant ? Quelles sont ses chances de succès ? L'Europe des 27 résisterait-elle en cas d'échec de ce plan ?
PLAN EUROPEEN DE RELANCE DE 750 MILLIARDS D’EUROS : LA DERNIERE CHANCE DE L' EUROPE DES 27
Bien qu’il soit largement insuffisant puisqu’il ne représente qu’environ 40% des montants nécessaires pour relancer l’économie européenne et assister les pays sinistrés par la crise actuelle, le plan présenté mercredi 27 mai par la Commission Européenne contient un certain nombre d’éléments très positifs :
- il acte enfin le fait qu’une solidarité réelle entre les 27 est nécessaire face aux crises de grande ampleur et prévoit que les plus riches et les moins sujets aux conséquences économiques et sociales d’une catastrophe hors du commun aident leurs partenaires touchés de plein fouet et ce, sans esprit de contrepartie ni de juste retour. C’est, près de 70 ans après la création de la CECA, la première manifestation, à grande échelle et face à de vraies difficultés, du principe fondamental de solidarité entre les Etats de l’Union sans lequel le projet Européen est voué à un échec irrémédiable.
- cette solidarité s’exprime concrètement par le caractère de don attribué aux 2/3 du montant prévu, soit 500 milliards sur 750 au total. On passe enfin des mots aux actes.
- pour la première fois, il est proposé qu’un emprunt de grande ampleur, commun aux 27 pays, bénéficie de la garantie solidaire de fait de l’ensemble des Etats-Membres.
Toutefois, pour que ce plan sur papier devienne un programme réussi, il faudra franchir une série d’obstacles difficiles :
- La bureaucratie. L’administration européenne est une bureaucratie redoutable, apte à transformer les idées les plus opportunes et les plans les plus judicieux en usines à gaz inefficaces et d’une lenteur désespérante par le jeu de procédures et de conditionnalités d’une complexité et d’une redondance permanentes.
A cet égard, elle trouve de dignes partenaires zélés au sein d' administrations nationales toujours promptes à différer tout décaissement des sommes accordées à l'accord de couches successives de contrôles, audits, évaluations et autres préalables qui paralysent irrémédiablement les meilleurs programmes et ruinent définitivement les espoirs de ceux qui espéraient en bénéficier en temps utile.
Aux responsables politiques, et en premier lieu, aux Commissaires de Bruxelles, de savoir résister à la tendance naturelle de leurs services et d’ être capables de les empêcher de calquer la mise en œuvre des 750 milliards prévus sur les procédures inefficaces utilisées dans le domaine des Fonds Structurels et de la Cohésion.
La vieille Europe. Paradoxalement, dans le cas présent, les représentants de cette Europe dépassée, nostalgique de temps et de schémas obsolètes, sont des hommes et des femmes jeunes, et parfois même très jeunes, comme l’actuel Chancelier Autrichien. La bande des 4, Autriche, Danemark, Pays-Bas, Suède, semble être en retard d’une guerre et ne pas avoir compris que nous vivons désormais au XXIème siècle.
Imaginer en ces temps de circulation instantanée, permanente et mondiale de l’information que leur mesquinerie égoïste puisse être ignorée et acceptée par des centaines de millions de citoyens européens Italiens, Espagnols, Français, Polonais, Grecs, Portugais, Roumains, Bulgares et autres, relève d’une naïveté, d’une crédulité et d’une arrogance totalement déconnectées de la réalité.
Combien de temps vont-ils résister, s’ils persistent dans leur attitude suicidaire, à l’inévitable mouvement spontané de boycott qu’appliqueront les citoyens de ces pays méprisés et abandonnés ?
A qui vendront-ils leurs fromages, bacons, saumons, tomates, poissons, meubles en kit, produits industriels et services si des centaines de millions d’européens dégoûtés par leur manque de solidarité se détournent de leurs produits ?
Pourquoi ces mêmes citoyens continueraient-ils à accepter le mécanisme impudent d’évasion fiscale de leurs grandes entreprises mis en place à leur détriment par les Pays-Bas ?
Dans le bras de fer qu’ils semblent vouloir entamer avec des mastodontes comme la France, l’Italie, l’Espagne et la Pologne, que pèsent ces 4 pays, dont deux n’appartiennent même pas à l’euro ?
Combien de temps croient-ils qu’ils seront protégés par la règle de l’unanimité ?
Pensent-ils vraiment que leurs 45 millions de citoyens pourront tenir longtemps en otage 450 millions d’européens ?
Sont-ils conscients qu’ils risquent par leur fatal entêtement, de provoquer la rupture finale de l’Europe et son éclatement en plusieurs blocs ce qui serait éminemment préjudiciable à leurs intérêts commerciaux et économiques ainsi qu' à leur sécurité ?
Ne voient-ils pas que même l’Allemagne, en dépit du poids économique et humain prépondérant qu'elle occupe au sein de l’UE, a pris peur et est en train d’opérer un virage à 180 degrés, consciente qu’elle ne pourra pas résister, sans annihiler ses avantages et mettre en cause son insolente prospérité, aux pressions et aux tendances centrifuges de ses grands partenaires ?
Enfin, ces dirigeants sont-ils ignares au point d' oublier que l’emprunt solidaire dont ils refusent le principe ne leur coûtera pas un seul euro puisque :
- il s’agit, en définitive, d’un emprunt quasi perpétuel qui ne sera jamais remboursé, l’action conjuguée de la croissance retrouvée, de l’inflation à long terme et de l’émission successive de tranches supplémentaires, réduisant les besoins de remboursement à zéro.
- la garantie solidaire d’un ensemble aussi puissant économiquement que l’Europe fera baisser l’intérêt à verser bien en deça des taux consentis aux meilleures économies nationales, les intérêts annuels à imputer au budget européen représentant au maximum de 10 à 15 milliards d’euros, soit largement moins de 1/1000 du PNB global de l’UE.
- cette crise présente l’opportunité de mettre en place, à un niveau prudent et raisonnable, une taxe commune sur les bénéfices réalisés par les grandes multinationales en Europe et d’instaurer une taxe carbone, propice à la tenue de nos engagements internationaux dans le domaine de l’environnement
Conclusion :
Les mois qui viennent d’ici la fin de l’été scelleront définitivement le sort de l’UE à 27.
Soit la solidarité et le bon sens prévaudront et cet ensemble, bien que chaotique, mal conçu et disparate, a encore une petite chance de survie.
Soit l’étroitesse de vues et l’esprit de boutiquiers gagneront et l’inexorable éclatement des 27 ne sera plus qu’une question de temps.
Seule l’Union Latine pourrait alors redonner une perspective et un espoir aux peuples du sud de l’Europe (cf. mes articles précédents).
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