Du Risque Social au Risque Global
Progressivement ce qui devait être de l’anticipation et de la prospective des évolutions socio économiques évolue de façon critique vers la gestion des risques sociaux dans un environnement incertain, globalisé et fortement médiatisé dans l’instantanéité.
Cette nouvelle donne s’impose encore plus intensément dans le cas du risque social qui devient un phénomène éthique car il touche chacun individuellement et collectivement.
Avant la crise, le risque social était quasiment assimilé à une situation de conflit social débouchant sur des arrêts de travail plus ou moins durs, longs et de moins en moins médiatisés se concentrant sur des thèmes classiques de : pouvoir d’achat, sauvegarde de l’emploi, maintien des acquis sociaux, statuts spécifiques. Au point que certains hommes politiques dénonçaient avec cynisme qu’il n’y avait plus de grèves en France.
Avec l’entrée en force depuis 2 ans du risque psychosocial (RPS) et de sa très forte médiatisation due aux tragiques cas de suicide survenus dans des grandes entreprises, tout ne sera plus comme avant pour l’ensemble des parties prenantes. La raison semble s’inscrire au niveau éthique, à savoir que la société est prête à banaliser les accidentés et tués sur la route, mais elle ne sera jamais prête à accepter l’idée que l’on puisse trop souffrir au travail et encore moins d’en mourir pour les cas extrêmes.
Passons succinctement en revue les différentes extensions récentes du risque social sur les plans juridique, légaux, sociaux et économiques :
· Au plan juridique c’est l’explosion des plaintes liées au stress, toute entreprise étant tenue de tout faire pour PREVENIR tout risque à sa SOURCE, pouvant porter atteinte à la santé physique et mentale de ses salariés (art L4121-1et -2) et d’adapter le travail à l’homme par toute une série de mesures portant sur l’organisation, le contenu et les conditions de travail, en un mot de changer les modes de Management s’ils s’avèrent potentiellement générateurs de RPS et du harcèlement moral en particulier (arrêt de la cour de cassation de nov 2009).
Les condamnations pour faute inexcusable se succèdent , nous risquons d’assister un jour à voir apparaître l’homicide involontaire et l’homicide prémédité sur le lieu de travail.
· Au plan légal la gestion du risque social s’est fortement durci par des extensions de procédures de mise en conformité (DUERP), voir par des injonctions ministérielles (name&shame) et des obligations nouvelles en matière de négociations paritaires sur le harcèlement, la violence, le stress.
· Au plan social de nouvelles formes de revendications voient le jour par la séquestration de dirigeants, la manifestation hostile devant les sièges sociaux des actionnaires fantômes, l’implication systématique des politiques quand ceux ci ne s’invitent pas eux mêmes dans le débat allant jusqu’à présumer de leur possibilité de droit d’intervention (Gandrange) dans la sphère privée.
· Au plan économique tous ces risques nouveaux représentent un coût provisionnel et constaté largement sous estimé et peu suivi. Dans le meilleur des cas le rapport social et le DUERP sont les seules sources d’informations statiques, rares sont les outils de tableaux de bord et BSC permettant une traçabilité de la prévention, gestion et évaluation des risques sociaux et encore moins de la performance sociale.
· Au plan socio-économique même les indicateurs fondamentaux d’absentéisme, turn over et AT/MP sont rarement établis et la prise en compte des coûts cachés de désorganisation ( +200% en moyenne) relèvent du hasard ou de l’appétance du DRH et du gestionnaire pour le management socio-économique.
Au delà de la prévention et de l’évaluation de tous ses risques sociaux, il nous faut se rappeler que 2 éléments n’apparaissent toujours pas dans les comptes, bilans, notations et analyses financières ; il s’agit de l’image de l’entreprise et de la valorisation de son capital humain .
En conclusions, l’EBIT nous paraît un peu juste pour estimer de la valeur d’une entreprise, il y a urgence à le compléter par l’IBET (Indice de Bien Etre au Travail) ou tout au moins par la prise en compte de la performance socio économique en complément urgent de la performance économique.
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