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Commentaire de zelectron

sur Le pied dans la porte


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zelectron zelectron 4 janvier 2009 10:18

Je vous aide : l’arrêt de la pub à la télévision accompagné de cet article.
http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2009/01/03/a-mes-yeux-c-est-comme-si-on-avait-demantele-une-filiere-importante-de-la-drogue_1137417_3236.html

"A mes yeux, c’est comme si on avait démantelé une filière importante de la drogue"
Propos recueillis par Jean-Luc Douin
Article paru dans l’édition du 04.01.09. LeMonde.fr

Cinéaste français, réalisateur, entre autres, de Pleure pas la bouche pleine (1973), Mercredi, folle journée ! (2001) et Le Crime est notre affaire (2008), ancien patron de la Société des réalisateurs de films (SRF), Pascal Thomas réagit aux polémiques qui accompagnent la mise en place de la loi sur l’audiovisuel et la suppression de la publicité sur les chaînes publiques à partir du 5 janvier. 

Partagez-vous l’inquiétude de l’ensemble de la profession ?

La suppression de la publicité sur les chaînes publiques est inattendue. Je l’imaginais impossible, étant donné la conformité des esprits à la "bien-pensance" publicitaire. Elle est essentielle. A mes yeux, c’est comme si on avait démantelé une filière importante de la drogue.

Nombre d’entreprises la jugent indispensable !

La publicité dévore l’entreprise, change son caractère. Regardez ce que sont devenus les journaux, les films, l’édition, le commerce, bref la société en général. Le pire triomphe de la publicité est d’avoir perverti les esprits et surtout imposé la dictature de l’Audimat, au point que chacun pense ne pas pouvoir s’en passer. A écouter les gens qui débattent et qui ont fait leur cirque à l’Assemblée, on a le sentiment que les choses ont toujours été ainsi. Alors que cette forme de financement ou de soutien aux entreprises a moins d’un demi-siècle.

En ce qui concerne la télévision, le nombre d’effets pervers a été considérable, allant du formatage, un asservissement de l’oeil et de l’esprit, aux formes trop brèves pour entraîner une réflexion.

Selon nombre de professionnels, la publicité est indispensable pour faire vivre les chaînes, qui manquent de ressources...

D’abord, de l’argent, il y en a : 450 millions d’euros [compensation garantie par l’Etat jusqu’en 2011 et financée par une taxe sur le chiffre d’affaires publicitaire des chaînes privées]. Ce n’est pas rien, même si je ne comprends pas pourquoi, alors que l’on rêve de la BBC, on ne s’élève pas à son niveau de redevance. Et puis l’argent n’est pas tout. Le principe de beauté découle souvent d’un principe d’économie. Regardez TF1 ou la 6. Elles ont l’argent, les soutiens, et pourtant elles sont à l’agonie. Au cinéma c’est pareil. On a vu les films les plus coûteux, les plus bruyamment lancés, s’effondrer, et, à côté, des films de rien faire des triomphes parce qu’ils étaient en accord avec un mouvement secret, un désir latent du public. Vous contestez le talent des gens en place ?

Ils sont responsables de la médiocrité télévisuelle depuis tant d’années ! Là aussi, il faudrait faire table rase. Le problème de la télévision, ce n’est pas seulement ce problème de la publicité, c’est une pratique de travail, dans des cadres élaborés par des directeurs de production et des syndicats - le moins qu’on puisse dire, après Jean Cocteau, c’est que "l’heure du syndicat est rarement celle de la poésie".

Il est cocasse de voir certains barons de la production télévisuelle défendre une télévision livrée aux marchés publicitaires : ils n’ont pas bronché lorsque Catherine Tasca a réduit les minutes de publicité sur la télévision publique pour en faire cadeau aux chaînes privées, alors que la création allait à l’époque en subir les conséquences. Curieux aussi de les voir s’animer quand le marché publicitaire qui, il y a dix ans, finançait six chaînes, se trouve aujourd’hui à se déployer sur 200. Le gâteau ne s’est pas agrandi mais le nombre de personnes qui veulent en profiter semble s’être multiplié à l’infini. La publicité, on le sait, est en crise. D’abord parce qu’elle a lassé, ensuite parce qu’elle est le produit d’une société dépensière, obscène, profitant de la crédulité des gens, qui n’a plus lieu d’être aujourd’hui.

La publicité tue la création ?

On ne mesure pas assez ce que pourrait être un espace télévisuel où seront absents les films publicitaires. Si on le veut bien, ce sera la liberté de création retrouvée. Tout est possible. C’est l’usage qui crée la forme de la culture. On pourra même s’attacher à la beauté, on pourra même retourner aux films en noir et blanc que la télévision commerciale a tués, revenir à des films qui plairont au petit nombre comme au grand nombre. On pourra retrouver des producteurs, des créateurs et des techniciens, soucieux de livrer le meilleur de leur travail, ce qui, dans l’étouffante réglementation syndicale et patronale, coiffée par les exigences du terrifiant Audimat, ne peut être le cas aujourd’hui.

Il est quand même incroyable que depuis tant d’années, aucune impulsion à la création ne soit venue de la télévision. C’est la question que devraient se poser ces parlementaires irresponsables, qui préfèrent vociférer et invectiver, au lieu de voir dans la proposition qui leur est faite la possibilité de participer à une véritable modernisation de l’audiovisuel public, qui peut conduire à une révolution des esprits.


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