@ James
« le FN idiot utile »
Idiot utile ou pas (pour ma part, je suspecte une savante orchestration - en tout cas, si elle n’existe pas, ce système d’alternance de gouvernance bipartisane est étonnamment auto-préservateur), il est évident que le FN est devenu aujourd’hui l’instrument idéal pour canaliser et neutraliser les souverainistes, seules vraies forces d’opposition pour contrer la montée en puissance du mondialisme au travers des partis majoritaires.
L’histoire du FN nous apprend que tous les politiques au sommet de l’Etat s’en sont servi, de manière détournée va s’en dire :
- Mitterrand le premier, lorsqu’il introduisit le vote à la proportionnelle pour affaiblir le RPR lors des législatives de 1986. De l’aveu de Le Pen lui-même, Mitterrand aurait été un « benêt » de ne pas le faire.
- Chirac qui, lors de la campagne présidentielle de 2002, mena une véritable propagande ostentatoire de l’insécurité, propice on le sait à la montée des voix FN. Je me souviens qu’en cette période pré-électorale, il ne passait pas une journée sans qu’étaient mis à la une des journaux télévisés crimes et violences en tout genre qui, d’ordinaire, sont relégués à la place des faits divers. On sait ce qu’il en est advenu par la suite.
- Sarkozy enfin, qui au ministère de l’Intérieur se prépara le terrain pour l’élection de 2007. Avec sa fameuse tirade « nettoyer au karcher » les cités pour les purger de ses « racailles », il empruntait ni plus ni moins le discours lepeniste en rejouant la carte de l’insécurité. La stratégie fut payante.
Et pour 2012 ? Sarkozy compte bien encore sur son fidèle compagnon pour remporter la mise.
Notre président est sur la corde raide car il n’a pas satisfait, comme on pouvait s’y attendre, les électeurs frontistes qu’il avait réussi à racoler et grâce auxquels il a été élu. Mais avec l’affaire DSK (mort politique de l’intéressé et fragilisation du PS), il a toujours une chance d’être réélu. Ce tour de force sera très difficile à réaliser parce que la crise économique s’est invitée dans le jeu politique et ne cesse de renvoyer de lui une image d’impuissance.
Force est de constater qu’il a, malgré tout, dans son jeu deux atouts de taille pour battre de nouveau le candidat du PS :
- la crise des dettes souveraines qui, si elle n’est que le prolongement de la crise financière de 2007, exige toutefois de tenter pour chaque pays de la régler politiquement à court terme d’où sa proposition d’inscrire dans la constitution une règle d’or de rigueur budgétaire. Les membres du PS auront à l’adopter ou au minimum à abonder dans ce sens s’ils veulent que leur parti reste crédible pour la gouvernance d’un pays surendetté surtout vis-à-vis des puissances de l’argent qui font la pluie et le beau temps, comme on a pu le voir ostensiblement ces derniers mois.
- et toujours la recette du FN qui, si elle a fait long feu (déclin en 2007, après le score de 2002 beaucoup d’électeurs ont compris que Le Pen ne serait jamais élu), est en train de montrer un parti doté d’un nouveau potentiel d’outsider, avec à sa tête, une Marine Le Pen qui veut le transformer (dédiabolisation, souverainisme affiché plus que nationalisme, nouveau programme économique ouvertement anti-mondialiste). Tel un phenix capable de renaître de ses cendres, le FN peut de nouveau se retrouver en seconde position au 1er tour d’autant plus lorsqu’on subodorre qu’il y aura plus de candidats de gauche que de droite. Un 2ème tour Sarkozy-Le Pen n’est donc pas impossible.
Tout ceci pour dire que le FN n’est qu’un parti fourre-tout de la contestation (mais suffisamment provocateur pour que la majorité des électeurs le pense dangereux et le maintienne à l’écart du pouvoir), un attrape nigauds lesquels pensaient hier que Le Pen père pouvait être élu et pensent aujourd’hui encore naïvement que Le Pen fille peut l’être.
Je ne sais plus qui a dit que tout système ne pouvait pas être changé de l’intérieur, mais il avait diablement raison !