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Commentaire de Bertrand Cassoret

sur L'électricité sans le nucléaire ? C'est possible et… moins cher !


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Bertrand Cassoret Bertrand Cassoret 30 juillet 2016 15:31
S’il n’y a qu’une seule chose à retenir de cette étude c’est qu’elle ne concerne pas l’énergie mais l’électricité (qui représente moins du quart de la consommation d’énergie française). Elle considère l’utilisation de bois ou biogaz pour produire de l’électricité, ces sources d’énergie seraient alors moins disponibles pour le chauffage. Elle ne s’interroge pas sur la façon de remplacer (éventuellement par de l’électricité) le chauffage au fuel ou au gaz des bâtiments, sur les procédés industriels, ni sur la majeure partie des transports fonctionnant au pétrole. Tel n’était pas l’objectif de ce travail « à caractère prospectif et exploratoire ».
Cette étude considère surtout un fort développement du solaire et un très fort développement de l’éolien. Leur production étant très variable, les auteurs se sont interrogés sur les dispositifsde stockage d’énergie à mettre en oeuvre.L’enthousiasme qu’a suscité cette étude peut être modéré car elle considère dans son scénario « de référence » :
- Une consommation d’électricité en légère baisse à 422TWh par an contre environ 440TWh en 2015 ; et ceci malgré 10 millions de véhicules électriques. La consommation de ces 10 millions de véhicules représentant environ 40TWh par an, la consommation restante pour les usages actuels serait de 382TWh, donc en baisse de 13% par rapport à la consommation de 440TWh en 2015. La population devant augmenter dans le futur,
certains chauffages polluants au fuel ou au gaz pouvant être remplacés par des systèmes électriques, prévoir une consommation en baisse de 13% est assez optimiste
(la consommation française d’électricité est stable depuis 2008 mais elle ne baisse pas).
- Des moments où il faudrait importer de l’électricité depuis l’étranger, non forcément produite par des renouvelables.
- Du stockage par batterie dont le bilan environnemental est médiocre, il faudrait plusieurs millions de tonnes de batteries dont la durée de vie est limitée.
- Augmenter le nombre de STEP (lacs artificiels, barrages), sans qu’il soit précisé où construire de nouvelles immenses retenues d’eau.
- Un important stockage par « Power to gas », technique permettant de transformer de l’électricité en gaz (hydrogène ou méthane), puis en électricité. Cette technique est
prometteuse mais encore balbutiante et sans réel retour d’expérience. Compter largement dessus est donc assez ambitieux.
- Un énorme développement de l’éolien dont la production serait de 303TWh par an alors qu’elle était au maximum de 160TWh dans le rapport publié par l’Ademe en 2013, je suis surpris de l’écart. La production éolienne a été en France de 21TWh en
2015, il faudrait au moins 10 fois plus d’éoliennes qu’aujourd’hui.
- Un facteur de charge (rapport entre la puissance moyenne réelle et la puissance installée) optimiste de l’éolien terrestre de 31% alors qu’il n’est actuellement que de 23%
- D’importants reports de consommation (60TWh) des usines, de chauffage des maisons, de chauffage de l’eau ou d’usages d’appareils électro-ménagers. Il faudrait, essentiellement en fonction du vent, parfois décaler dans le temps leur mise en marche lorsque la production ne suffit pas. Il s’agit donc d’une tendance vers un moindre confort puisqu’il faudrait parfois décaler les horaires de travail des salariés, éviter de chauffer son logement lorsqu’il fait froid, de faire la cuisine lorsqu’on a faim…
- Un ajustement offre-demande modélisé trop peu finement (heure par heure), les auteurs soulignant eux-mêmes que la gestion de la stabilité du réseau électrique n’est pas traitée dans l’étude.
Indépendamment des problèmes d’intermittence et de stockage, l’étude de l’Ademe précise sans détailler que le productible maximal théorique des renouvelables est, en France, de
1268TWh. Attention ce chiffre ne signifie pas que l’on puisse disposer de toute cette énergie : il faut lui soustraire les inévitables pertes de transport et de stockage, et surtout ce que l’on neserait pas capable de stocker car pas forcément produit au moment où l’on en a besoin. Ce chiffre, bien que paraissant assez optimiste au regard d’autres scénarios , reste
nettement inférieur à la consommation d’énergie française (1900TWh en énergie finale, presque 3000TWh en énergie primaire) et ne fait que confirmer qu’il il faudrait considérablement diminuer notre consommation d’énergie pour sortir des
fossiles et du nucléaire.

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