@Gollum
Vous connaissez la réponse d’Einstein à un journaliste qui lui demandait s’il croyait en Dieu : « Dites-moi d’abord ce que vous entendez par Dieu et je vous dirai si j’y crois. » Le Dieu de Spinoza est plus compliqué qu’il n’y paraît. Il ne se confond pas avec la nature (Spinoza n’est pas à proprement parler « panthéiste ») ; il distingue entre la natura naturata (la nature naturée) : les minéraux, les végétaux, les animaux... et la natura naturans (la nature naturante), c’est-à-dire le principe (force) d’organisation interne de la nature dont Kant, héritier de Spinoza sur ce point exprimera dans la Critique du Jugement le caractère caché et infiniment mystérieux. Leibniz, qui n’avait pas ses lunettes philosophiques dans sa poche et qui rencontra Spinoza au moins une fois (Spinoza le fascinait et on a trouvé dans ses papiers une « Réfutation » qui montre qu’il avait lu l’Ethique de très près, rapproche la métaphysique de Spinoza de la cabbale juive (je dis la kabbale « juive » car il y a aussi une kabbale chrétienne qui en provient en partie). Comment comprendre autrement qu’il dise que Dieu possède une infinité d’attributs dont nous ne connaissons (partageons) que deux : la pensée et l’étendue. Comment le sait-il ? Comment sait-il qu’il ne sait pas (« dont nous ne connaissons que deux »), si d’un point de vue « rationaliste » savoir, c’est savoir que l’on sait... C’est bien qu’il y a un « au-delà de la raison » raisonnante chez Spinoza. Il y a du mystère, de l’inconnaissable, des limites à l’entendement humain. Je trouve qu’il est très « juif » sur ce point et je partage la désolation de Ben Gourion (et pas seulement lui) à propos du « heretz » (excommunication) prononcé par la communauté juive d’Amsterdam à son encontre.