A propos du double mutant indien :
Covid-19. La panique monte en Inde face
à la nouvelle vague.
La fulgurance de la deuxième vague de
Covid-19 laisse désemparées de plus en plus de grandes villes
d’Inde. Les hôpitaux sont saturés, l’oxygène manque, on meurt
faute de soins… Reportage à Bangalore, la capitale du Sud du pays.
Il y a encore un mois, les habitants de
Bangalore savouraient un doux retour à l’insouciance, face à un
virus en voie de disparition. Aujourd’hui, comme ailleurs en Inde,
ils sont gagnés par la panique. « En une semaine, ma tante de
37 ans est morte, ma meilleure amie a attrapé le Covid, ainsi que ma
boss ! » raconte Shweta, 29 ans. La designeuse dans une grande
entreprise textile travaille chez elle, où elle vit seule. « Je
n’ose plus sortir. Chaque jour, une connaissance tombe malade ! »
La ville est comme foudroyée par une
vague de Covid sans rapport avec celle du printemps 2020. « Le
virus est hors de contrôle », a reconnu B.S. Yediyurappa,
ministre en chef de l’État du Karnataka, qui vient d’être
infecté pour la seconde fois, après avoir contracté le Covid l’été
2020, et malgré une première injection récente du vaccin…
« On manque de tout : lits,
soignants, oxygène, médicaments et même de places dans les
crématoriums et les cimetières. Les hôpitaux sont débordés. On
croule sous les patients et cela ne va faire qu’empirer car,
contrairement à la vague de 2020, il n’y a plus de quarantaine,
plus de traçage des contacts, plus de centre d’isolement »,
décrit le docteur Taha Mateen, directeur de l’hôpital privé HBS,
où une centaine de malades sont hospitalisés. En mars, tous ses
lits Covid étaient vides.
« Il y a d’abord eu une pénurie
de lits, puis de médicaments, et maintenant d’oxygène »,
témoigne un médecin d’un hôpital public qui veut rester anonyme
sur ce sujet sensible. Sans les précieuses bouteilles, impossible de
traiter les cas les plus critiques. On meurt faute d’oxygène. À
court de ravitaillement, les hôpitaux tentent d’échanger des
patients ou… le marché noir.
En urgence, le Karnataka a demandé 1
500 tonnes d’oxygène au gouvernement central. En attendant, les
proches de malades lancent des bouteilles à la mer, sur Internet.
Des habitants leur répondent avec des listes de numéros à joindre
pour récupérer, ici une bouteille, là des médicaments… Au
total, Bangalore (12 millions d’habitants) comptait, jeudi 22 avril
2021, 87 000 malades du Covid.
Ce chiffre est un minimum, car les
tests manquent aussi. « Nous ne parvenons pas à faire face à
l’énorme demande de tests, car nous sommes dépendants de matières
premières du Japon », témoigne Charu Krishnamoorthy, qui
travaille pour un producteur local de tests PCR.
Bangalore est à l’image du reste de
l’Inde. Mercredi 21 avril, 314 835 nouvelles contaminations ont été
officiellement comptabilisées, record mondial. C’est six fois plus
qu’il y a un mois, deux fois plus qu’il y a quinze jours, et sans
doute en dessous de la réalité.
Malgré cela, les autorités du
Karnataka veulent éviter un nouveau reconfinement strict. Il y a un
an, il avait provoqué un terrible exode des travailleurs migrants
fuyant la ville faute de subsistance. Les restrictions décidées
s’en rapprochent néanmoins de plus en plus. La ville est sous
couvre-feu à partir de 20 h et sera confinée ce week-end.
https://www.ouest-france.fr/monde/inde/covid-19-la-panique-monte-en-inde-face-a-la-nouvelle-vague-cfd1efc6-a376-11eb-b196-49a3371759cb