L’enquête qui jette le soupçon sur
le patrimoine d’Emmanuel Macron.
Le président de la République
détiendrait-il de l’argent placé dans un paradis fiscal ? Les
journalistes Jean-Baptiste Rivoire et Gauthier Mesnier, co-auteurs
d’un documentaire-enquête diffusé ce mardi sur le site d’Off
Investigation, soupçonnent qu’une part de la rémunération versée
en 2012 par la banque Rothschild à l’actuel locataire de l’Élysée
l’ait été dans un trust à l’étranger.
Sur ses déclarations à la Haute
Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), Emmanuel
Macron ne déclarait que 156 000 euros de patrimoine en 2014,
500 000 euros en 2022. Des sommes qui ont étonné, alors que
l’intéressé avouait lui-même avoir perçu près de 3 millions
d’euros entre 2009 et 2013.
En enquêtant sur cette étrange
disparition, Jean-Baptiste Rivoire, ancien responsable de
l’investigation à Canal Plus, et Gauthier Mesnier n’ont pas
trouvé la trace de cet argent, mais ont soulevé un autre lièvre :
Emmanuel Macron pourrait avoir perçu bien plus que 3 millions
d’euros chez Rothschild.
Un documentaire-enquête devant être
diffusé ce mardi sur le site d’Off Investigation émet de sérieux
doutes sur les honoraires reçus par le chef de l’État en 2012 à
l’occasion du rachat par Nestlé d’une filiale de Pfizer. Une
source anonyme affirme que la banque Rothschild avait coutume de
verser une part importante de ce type de rémunération sur des
structures opaques dans des paradis fiscaux. Si des éléments
matériels manquent, le documentaire d’Off Investigation
« Patrimoine de Macron : où sont passés les millions ? »
met en lumière de sérieux soupçons sur le patrimoine d’Emmanuel
Macron.
L’Humanité : Pourquoi doutez-vous
que, dans le cadre de l’acquisition par Nestlé d’une filiale de
Pfizer en 2012, Emmanuel Macron ait perçu plus que ce qu’il n’a
déclaré ?
Jean-Baptiste Rivoire : En avril
2012, Emmanuel Macron a un rôle absolument clé dans ce deal énorme,
qui est le rachat de la branche nutrition infantile de Pfizer par
Nestlé pour plus de 9 milliards d’euros. D’après les
chiffres qui circulent dans les banques d’affaires, pour une
acquisition comme celle-ci, la banque qui l’a menée touche entre
0,5 et 1,5 % du montant du deal. Rothschild aurait donc touché
entre 45 et 135 millions d’euros.
Ensuite, la question c’est combien
gagnent les différents associés de la banque. Or, Emmanuel Macron
était en première ligne. C’est lui qui a fait de Nestlé un
client de Rothschild puis qui, en un week-end, les a convaincus de
faire la proposition déterminante, alors que les négociations entre
Pfizer et Danone capotaient. Dès lors, nos sources estiment qu’il
aurait très probablement touché entre 5 et 10 millions de
« bénéfices industriels et commerciaux ».
L’Humanité : Or, il n’a déclaré
à la HATVP, en 2014, que 720 000 euros pour l’ensemble de
ses bénéfices industriels et commerciaux touchés en 2012. Où
serait parti cet argent ?
Jean-Baptiste Rivoire : Une
personnalité proche de la banque Rothschild qui n’apparaît pas à
visage découvert dans notre enquête, mais est une personnalité
bien connue, nous en a dit un peu plus. Elle nous explique que cette
banque franco-britannique a conclu des arrangements avec Bercy dans
les années 2000 pour que les honoraires de ses associés gérants ne
soient pas forcément fiscalisés en France. Cette source nous dit
que chez Rothschild, une partie minoritaire de ces rémunérations
est versée sous forme de salaire, en France. Et une partie
importante serait versée à l’étranger, dans des trusts qui ne
sont même pas au nom des associés gérants ou de la banque.
L’hypothèse de notre source, qui ne
sait pas où serait le trust de Macron, soyons clair, c’est que
Rothschild étant franco-britannique, ces structures opaques seraient
installés à Jersey, Guernesey ou sur l’île de Man. Nous n’avons
pas de preuve absolue mais, ce qui nous trouble, c’est que quand on
contacte l’Élysée et Rothschild, avec des éléments précis, on
n’a pas le début d’une réponse.
L’Humanité : Cette évasion ou
optimisation fiscale serait-elle illégale ?
Jean-Baptiste Rivoire : Il y a
plusieurs zones d’ombre. D’une part, ce compromis accepté par
Bercy n’autorise pas la banque Rothschild à verser les
rémunérations de ses collaborateurs dans des paradis fiscaux, mais
cela aurait été le cas dans les faits. Par ailleurs, ces fameux
trusts ne sont pas au nom de la personne concernée, ainsi ce n’est
pas à proprement parler illégal. De ce point de vue, Emmanuel
Macron ne serait pas un fraudeur fiscal. Mais les vrais bénéficiaires
de ces trusts peuvent demander ensuite qu’on libère les fonds mis
à l’abri, et un avocat missionné par Rothschild les verse alors
sur un compte souhaité par la personne.
En revanche, dans sa déclaration à la
HATVP, Emmanuel Macron a l’obligation de déclarer la totalité de
ce qu’il possède. Il ne peut pas omettre le fait que des sommes
importantes lui aient été remises à l’étranger. Ce ne serait
donc pas fiscalement répréhensible, mais il pourrait tomber dans le
délit d’omission d’une partie de son patrimoine.
https://www.humanite.fr/politique/emmanuel-macron/lenquete-qui-jette-le-soupcon-sur-le-patrimoine-demmanuel-macron-743752