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Bulgroz 2 janvier 2012 14:56

http://www.lefigaro.fr/international/2011/04/16/01003-20110416ARTFIG00004-bienvenue-a-tchernobyl.php

La nature a horreur du vide !

A peine 200 mètres après le premier check-point de la zone d’exclusion..Autour, les herbes hautes de la prairie ondulent sous une brise vagabonde. Soleil fringant mais froid d’acier. Une harde d’équidés sauvages broutent paisiblement ; mythiques chevaux de Prjevalski. Le troupeau compte une dizaine d’animaux, juments et poulains légèrement en retrait de l’étalon dominant, qui, tête haute et naseaux ouverts à l’effluve étrangère, défie quiconque de s’approcher. Malgré la mue de printemps qui tigre la robe isabelle, force est de constater l’insolente santé des bêtes, une population d’autant plus fragilisée que l’espèce est classée en voie d’extinction. Aujourd’hui, une cinquantaine de spécimens profite de ce havre de paix.

Bienvenue dans le laboratoire le plus étonnant de la planète où énigmes et paradoxes se succèdent, où enjeux politiques et querelles scientifiques nourrissent un débat cacophonique. Chiffres, études et publications s’enchaînent, les uns invalidant souvent les autres au gré de l’opinion des protagonistes pro ou antinucléaires.

Autour, la nature a repris ses droits. Partout, une faune et une flore aussi inattendues qu’insolentes de prospérité. Elans, lynx, ours, chevreuils, cerfs, loups se sont réapproprié l’espace. Ambiance... Un couple de rouges-queues noirs trille à la cime d’un arbre alors qu’une pie jacasse sur les basses charpentes. Une martre poursuit un rongeur dans les ramures d’un bouleau. Décelant la présence du prédateur, une portée de mulots disparaît dans un trou. Un tronc balafré de frayures témoigne de la présence de grands cervidés. Les lapins bondissent comme des jouets mécaniques dès qu’un intrus les surprend au gîte. Même si le désastre a métamorphosé son milieu naturel, le monde sauvage semble se moquer de l’impact des rayonnements ionisants, grignotant à toute allure le moindre espace laissé par l’homme, sans qu’aucune menace ni altération visible semble le freiner dans sa progression.

Pourtant, de profondes modifications sont survenues dans leur habitat. Les forêts sont devenues des réservoirs de radioactivité dont 90 % se trouve dans la litière. Mousses, champignons et lichens, vivant dans les couches superficielles du sol où ils puisent leurs nutriments, présentent de fortes concentrations de radionucléides. Certains champignons peuvent atteindre le million de becquerels (100.000 Bq par kilo = 1000 fois la limite autorisée). Les arbres, quant à eux, se sont mal adaptés aux radiations. Les conifères, beaucoup plus sensibles que les feuillus, sont morts ou ont muté, remplacés par les bouleaux. L’espèce pionnière, résistante à tout, a supplanté pins, vergers, hêtraies. Cela pourrait s’expliquer par les différences de taille des génomes : plus petits chez les bouleaux, ils sont moins vulnérables aux rayonnements.

Les espèces végétales les plus résistantes ont recolonisé les espaces appauvris et stériles, redessinant la forêt originelle et usurpant l’identité de ses occupants.

A la caserne des pompiers de Tchernobyl, quelques animaux sauvages sont exhibés dans des cages comme dans un zoo miniature. Apeuré, un goupil brun-roux à la queue en panache creuse son fossé le long du grillage. Plus loin, un énorme sanglier, les jarres roides de boue, glisse son imposant groin dans un orifice de l’enclos, histoire d’apprécier la valeur de ses hôtes. Sacha, un géant de 2 mètres au crâne rasé raconte sa plus belle capture. Il y a un an, il a ramené un louveteau que ses chiens avaient acculé au fond de la lovière. A peine sevré, l’animal s’en est retourné à la vie sauvage. Depuis, Viy (son surnom) vient fréquemment rôder autour des baraquements, alléché par l’odeur des poubelles et de la volaille.

Les meutes de loups prospèrent dans la zone interdite. De plus en plus d’attaques de personnes leur sont attribuées. Pour juguler les populations, une soixantaine de chasses sont organisées chaque année. Un « sport » réservé aux chasseurs fortunés amateurs de sensations fortes. (Cédric Faimali) 

Le loup : un beau spécimen à la toison d’or regarde fixement de ses yeux fendus, truffe à l’évent, oreilles aux écoutes. Tenter une approche, et la bête se pétrifie. Le jeune mâle hume l’air avec le sérieux de ceux qui savent ce qu’il en coûte d’être imprudent en terrain découvert. Plus tard, on l’entend japper sur un ton excité avant de disparaître à la vitesse de la lumière. Les vieux revenus vivre dans les villages désaffectés racontent que, la nuit, les meutes unissent leurs hurlements, poussant graduellement leur cri jusqu’à l’aigu.

http://www.lefigaro.fr/international/2011/04/16/01003-20110416ARTFIG00004-bienvenue-a-tchernobyl.php


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