à l’auteur,
J’ai horreur aussi des théories
psychanalytiques, mais quand on lit La psychologie de masse du
fascisme, de Wilhelm Reich, et quand on a vu quelques films
de Leni Riefenstahl, et en particulier Der Triumph des Willens,
on comprend beaucoup mieux.
Les pauvres bougres qu’on nous montre
sur les écrans - visages peinturlurés comme ceux de ces guerriers
des civilisations primitives et qui ont disparu – hurlant dans leur
excitation hystérique : « On a gagné ! »,
sont les premières victimes de ces media cautionnés par des
politiciens cons ou pervers, media qui auront consacré et perdu à peu
près le quart du temps d’antenne consacré aux informations à nous
parler de football, et sans la moindre distance critique. Face à ces
séquences de conditionnement psychologique, je ne suis plus un sujet
pensant, je suis forcément moi aussi un passionné de football attendant la fin
d’événements prodigieux (l’entrée d’une balle dans une petite cage
mal fermée !) dont dépend le sens même de mon destin et de
celui de tout un peuple ; on me le dit, on me le répète. Et si
je n’étais pas d’accord, je serais probablement un parfait salaud,
un traître, tel cet Allemand qu’on voit sur une ancienne photo,
perdu au milieu de la foule immense d’une grande manifestation à
Nüremberg, croisant les bras obstinément, alors que tout le monde tend son bras
vers le Führer dans une sorte de gigantesque érection collective.
Quand on voit un président de la
République s’associer à cette apothéose de la connerie, on se pose
la question suivante : le bonhomme est-il en train de se dire que
sa cote de popularité vaut bien un match, comme Paris valait bien une
messe pour Henri IV, ou bien se pourrait-il que derrière le très
mince vernis de « culture » un peu craquelé qu’il essaie vainement de
faire reluire en toute circonstance, il soit aussi con que la masse des
enfoirés ?