Bruno Julliard finira-t-il sénateur de Haute-Loire, conseiller de Ségolène ou de Sarkozy, ou directeur marketing des Inrockuptibles ? ? ?
Les paris étaient ouverts. (À Marseille, on le jouait gagnant à 3 contre 1 pour un mandat d’administrateur à Kiloutou, mais la cote peut encore évoluer.)
Attention cependant : pas de procès d’intention !
Ce n’est pas parce qu’en France le rôle de porte-parole étudiant est le marchepied le plus sûr pour un fauteuil d’élu ou de bouffon du prince que le président de l’Unef va forcément s’engorger dans un double menton de notable socialo.
Ce n’est pas parce que Bruno Julliard a été membre des « jeunesses socialistes » et qu’il fréquente Hollande et Emmanuelli (comme il l’admet dans Le Figaro du 7 mars 2006), ni parce qu’il a une tête de gendre au poil et qu’il cause déjà la langue de bois verni à la cire d’abeille qu’il faut prédire un avenir sordide à ce pauvre garçon.
Si ? Allons, halte aux amalgames.
Il y a peu de temps, personne ne le connaissait. Mais à la faveur de l’explosion anti-CPE, l’apparatchik du « principal syndicat étudiant » a été bombardé en première ligne. Ça ne rate jamais : les médias veulent un « porte-parole » pour « représenter » les foules rangées à bonne distance derrière lui. Bruno Julliard ne les a pas déçus.
Le 31 janvier 2006, Bruno Julliard était sur France 3 chez Ockrent,
le 7 février 2006, sur LCI,
le 8 février 2006, au forum web du Nouvel Obs,
le 27 février 2006, dans Libération,
le 16 mars 2006, sur France Inter, puis chez Chabot sur France 2,
le 17 mars 2006, sur RMC,
le 24 mars 2006, chez Ardisson,
le 25 mars 2006, sur France Info,
le 27 mars 2006, sur Europe 1,
le 31 mars 2006, sur RTL puis au JT de TF1,
le 1er avril 2006, chez Pascale Clark sur Canal +,
le 9 avril 2006, chez Schneiderman... Même Duhamel et Bigard ne font pas aussi bien.
Les médias adorent Julliard, il cause comme eux. Convenable, sympa, sachant se tenir à table. Que les organes de presse qui l’invitent soient les principaux vecteurs idéologiques de la précarité, qu’ils biberonnent aux mêmes mamelles que les recruteurs d’employés-kleenex, qu’au fond ils constituent une cible au moins aussi légitime que le CPE, tout ça n’est pas un problème pour Bruno Julliard, ni pour l’Unef.
Peut-être y a-t-il là un bon critère pour évaluer le muscle d’une organisation qui se veut contestataire : sa capacité ou non à réfléchir au bon usage des médias, s’il faut leur parler, si oui à qui, quand, comment et à quelles conditions. Pourquoi par exemple ne pas conditionner sa prestation télé à la garantie que l’on s’en servira pour placer un laïus sur la presse et ses bourrages de crânes anti-grévistes ? Pourquoi ne pas se payer le luxe aussi d’envoyer ces guignols se faire voir ?
Au lieu de ça, Bruno Julliard court les plateaux pour l’ouvrir au nom de ceux qui ne lui ont RIEN demandé tout en fermant le bec sur ses convives.
(Cette manie de dire « JE » toutes les trois phrases... pour un porte-parole... ? Au lieu de « mon orga pense que... », Faute de quoi on lit dans les journaux : « Héraut de la bataille contre le CPE, le jeune homme a réussi à faire défiler derrière une même banderole représentants de salariés et de la jeunesse. » (Le Monde, 06/03/2006) Trop balèze ! Toul seul le bonhomme a réussi à faire descendre trois millions de gus dans la rue ! Le Monde n’ayant pas publié de rectificatif, on suppose que cette information n’a pas gêné le jeune homme.
Alors on pose la question : sachant que David Assouline (porte-parole étudiant de 1986) est aujourd’hui sénateur de Paris et qu’Isabelle Thomas (autre porte-parole de 1986) est devenue ensuite conseillère à l’Élysée, que sera Bruno Julliard dans 20 ans ?
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