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Voltaire Voltaire 2 janvier 2008 14:47

L’article ne manque pas d’intérêt, et mériterait de se replacer dans une analyse plus fouillée de l’évolution de notre société.

La France a longtemps méprisé la réussite financière, d’un point de vue général, même si elle faisait dans le même temps preuve d’une certaine hypocrisie. Il a en tout cas été longtemps malvenu d’étaler ses richesses. L’effet pervers en a été une frilosité excessive des élites pour le métier d’entrepreneur : le créateur d’entreprise a généralement, en effet, souvent pour motivation (pas uniquement bien sûr) de faire fortune, passion souvent jugée malsaine. Les élites françaises se sont donc retrouvées dans la haute administration et/ou au conseil d’administration de grands groupes sans passer par la case entreprenariat. Il suffit d’ailleurs de noter que l’immense majorité des grands groupes français est d’âge ancien, contrairement à des pays plus dynamiques. Ceci avait une double conséquence : un manque d’entreprenariat, et donc de création d’entreprises et de richesse (et d’emplois), et une gestion frileuse des grands groupes français.

On aurait donc pu espérer qu’avec l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, cette catégorie de la population aurait été favorisée, à la faveur de son goût pour la réussite individuelle. et un certain rééquilibrage eût pu avoir lieu.

Il semble hélas qu’il n’en est rien : comme l’indique l’auteur, si la vision de la société du Président de la République accorde effectivement une place très importante à la réussite financière, sa politique récompense d’abord le capital, et donc la situation de rente, et non le risque de l’entreprenariat.

On se retrouve donc dans une situation à l’américaine, qui se caractérise de façon croissante par la même dérive : une société individualiste, où le riche existant, l’héritier, et non le créateur de richesse est favorisé. Cette dérive américaine est récente mais inquiétante, au point qu’un certain nombre des américains les plus fortunés ont réclamé le retour à une taxation plus lourde à la fois sur le capital et sur l’héritage. Il faut d’ailleurs noter qu’il existe une longue tradition de création de fondations aux États-Unis, les plus riches préférant léguer leur fortune à des fondations plutôt qu’à leurs héritiers directs, contrairement à ce qui se passe en France.

Le changement sociétal proposé par Nicolas Sarkozy est donc bien un changement de valeurs, où l’argent n’est plus méprisé mais bien reconnu comme seul vecteur de réussite, sans que la création de richesse soit elle appréciée.

Plutôt que de s’entourer de nouveaux entrepreneurs, le Président de la République étale donc ses relations avec des puissants, souvent intimement liés aux affaires de l’État. Si l’on ajoute ceci avec leur proximité avec les groupes de médias, on peut comprendre le malaise exprimé par l’auteur.

Cette « collusion » est-elle sans risque ? De récents scandales, justement aux Etats-Unis ou en Italie, viennent nous rappeler que cette proximité n’est pas sans danger (il suffit de regarder les nombreuses affaires liées au vice-président américain ou à l’ancien président du conseil italien).

En directe opposition avec la tradition Française, Allemande ou des pays nordique, le Président de la République adopte un style qui semble emprunter au modèle anglo-saxon ses aspects les plus contestables (la valorisation de l’argent-puissance) sans y adjoindre les aspects les plus moteurs (le soutien à l’entreprenariat).

C’est donc à une révolution de valeurs que l’on assiste, et à une opposition frontale avec le modèle « européen » prôné le plus clairement par François Bayrou, où réussite professionnelle ou financière ne constitue qu’un élément parmis d’autres (famille, liens sociaux...) de la réussite.


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