Bonjour,
Encore un de ces débats où les extrêmes et extrémistes se rencontrent sans pouvoir se comprendre, et les modérés sont noyés. Lorsque j’ai connu Agoravox, j’en attendais mieux, mais le niveau, surtout des commentaires, en arrive à ceux d’un Slashdot.
Je le dis, j’ai travaillé pendant quelques années pour Monsanto il y a plus de 10 ans. Pendant quelques années, j’ai eu le plaisir d’y travailler et cotoyer des gens sympatiques et remarquables (à l’époque, ça a pu changer), mais aussi quelques - rares - crétins finis (je doute qu’ils aient changé). In fine, une entreprise ce sont des personnes, un échantillon de ce que l’on trouve autour de soi. Alors et depuis lors, j’ai aussi pu me forger une idée sur la biotechnologie en général et les OGM en particulier, avec l’avantage de connaître une telle société tant de l’intérieur que de l’extérieur.
Mon opinion, que je présente sans vouloir en gaver les autres, est la suivante :
(1) Sécurité des personnes
La biotechnologie est une technologie plutôt sûre pour les personnes. Des risques peuvent exister, mais il relèvent souvent de l’évidence (imaginons un cas d’utilisation d’une gène issue d’une source à risque, e.g. arachides, dans une plante).
Personellement, je mangerais des produits issus peu ou prou d’OGM sans souci, mais voir aussi le point 3 ci-dessous.
(2) Environnement
La biotechnologie peut représenter un risque environnemental, mais il y a aussi des avantages importants.
Oui, e.g., des croisements peuvent se passer entre OGM et plantes sauvages dans certaines régions ou conditions. Ceci dit, il faut encore mesurer quel risque celà représente, sans tomber dans le fantasme.
Oui aussi, l’utilisation d’OGM permet de se passer de quelques produits pesticides plutôt crasseux.
(3) Point de vue économique
Je pense que c’est ici un des noeuds du problème.
Oui, Monsanto, mais celà est vrai de pratiquement toute entreprise commerciale sur cette planète, rêve d’argent qui coule a flot, et je crois ne s’en cache pas. D’ailleurs ils font du fric, et ça en énerve certains qui crient à l’exploitation,... Peut-être les pratiques actuelles de Monsanto sont-elles condamnables moralement sinon légalement, mais ce n’est intrinsèquement pas un problème de biotechnologie, mais économique (tout comme la position de monopole de Microsoft n’est pas un problème informatique).
Par ailleurs, nous autres, consommateurs d’économies riches, gras sinon bien nourris, n’en avons rien à foutre des OGM dans notre assiette ! Notre bouffe n’est pas trop chère, plutôt bonne et très copieuse. On n’a pas besoin des OGM, on est bien comme on est, donc on est plutôt contre.
Donc, si on me propose des produits issus d’OGM, celà ne m’intéresse tout simplement pas (voir point 1 ci-dessus).
Par contre, des pays plus ou moins affamés peuvent avoir une autre opinion quant à ce qui leur est nécessaire.
Petite note : C’est un peu une coïncidence malheureuse si les premiers produits de la biotechnologie agricole sont de type résistance à des herbicides ou insectes plutôt qu’à la sécheresse ou au sel, par exemple. La raison, il y a 10 ans en tout cas, était simplement que les premiers sont plutôt faciles (dépendent de 1 ou au plus quelques gènes) alors que les seconds sont compliqués (multigènes). Pour mémoire - j’y étais.
(4) La communication
Dans ce domaine, je dois dire que les responsables de la communication ont été particulièrement mauvais - ce qui s’appelle se tirer au bazooka dans le pied. Il y a 12 ans, l’écart entre leur discours interne et la réalité quant à leur succès sur le dossier BST laissait le personnel ébahi et incrédule.
A l’époque, parler par exemple d’accroissement de production de lait dans une Europe qui ne sait qu’en faire ! Plutôt que de parler de meilleure productivité permettant une diminution du cheptel et des déchets qu’il génère.
(5) Convictions, morale, éthique et religion
Outre le point de vue économique, je pense que c’est ici un des autres points critiques.
Je pense qu’une personne a le droit de réprouver une technologie parce qu’elle contredit ses convictions morales ou religieuses (e.g. "C’est mal de toucher à l’oeuvre de Dieu").
Une personne peut aussi s’opposer étiquement à une technologie, par exemple parce qu’elle est promue et exploitée par des gens, sociétés ou gouvernements qu’elle pense iniques.
Mais, in fine, il s’agit la de convictions que l’on ne peut on ne doit pas imposer aux autres, ni pour, ni contre. Quelles que soient ses convictions, leur poids ne sera que celui que la société lui reconnaîtra au travers de ses systèmes de représentation, aussi démocratiques que possibles.
On n’impose pas d’être musulman, chrétien, juif, athée ou autre : on établit une société qui permet à chacun de vivre ses croyances sans les imposer aux autres.
(X) Ma conclusion perso
Les multinationales veulent gagner du fric - beaucoup. Elles sont également férues de succès technologiquees. Obnubilées par ceci, elle ont communiqué comme des pieds.
En face, des opposants de premier rang aux OGM, voire à la biotechnologie, le sont souvent pour des raisons de l’ordre de la croyance, morale, étique ou religion. Mais celà ne se dit pas car ce n’est pas vendeur - surtout en Europe. Alors, pour convaincre des opposants de second rang, on fait du judo ; des forces des grosses sociétés on fait des faiblesses : un risque possible devient certitude de catastrophe à venir ; et un succès commercial est une exploitation monopolistique.
Et les arguments technologiques là dedans ? Peu de personnes les comprennent (Vous y connaissez vraiment quelque chose, vous qui lisez ceci ? Si électrophorèse ou hybride F3 vous disent quelque chose - peut-être), et tout le monde s’en fout au fond : les multinationales parce qu’elles savent que, vraies ou pas, leurs études ne convainquent pas, les opposants parce que les études sont plus un moyen superficiel de communication qu’un outil de conviction rationnelle.
In fine : (a) Je ne mangerais pas d’OGM frais, parce que les produits frais actuels me conviennent. (b) Je souhaite savoir quels ingrédients d’un produit transformé sont issus d’OGM (e.g. le sucre je m’en fous, ma farine à patisserie un peu moins). (c) Si semences OGM et cultures OGM il y a, celà doit être sans contrainte aucune pour les agriculteurs qui n’en veulent pas (Éviter tout monopole, quand bien même les OGM deviendraient très populaires. Maintenir le droit aux semences de ferme. Eviter la brevetabilité des gènes en soi).
Note
Les mots agents orange, PCB, hormone de croissance (bovine je suppose) ont été lancés.
Oui l’agent orange est une saleté et Monsanto y a son nom lié. Mais la société et ses personnes ne sont pas celles d’il y a 30 ou 40 ans. Elles sont peut-être meilleures, peut-être pires, mais en tout cas différentes (Mes collègues allemands ou français seront heureux de savoir que je ne leur en veut pas pour 14-18, 40-45 ni pour les guerres napoléoniennes).
Je crois me souvenir que les PCB ont été encensés pour leur qualités avant que l’on ne découvre leurs dangers. Encore une technologie qui a mal tourné. Les questions sont de savoir comment une société réagit à cette découverte (souvent mal) ; et si l’on doit arrêter tout développement potentiellement dangereux un jour (caricature : l’agriculture au neolitique parce que celà va appauvrir l’écosystème européen).
L’hormone de croissance bovine (qui permet une prolongation du cycle de lactation des vaches). Le problème a été surtout une médiocre communication. Le problème était : lactation prolongée, donc plus de cas de mastite (inflamation de mamelles (demandez aux mamans, elles connaissent aussi parfois), donc des antibiotiques, donc des antibiotiques dans le lait SI la vache et son lait n’est pas mise à l’écart (ce que la loi prévoit de toute façon, BST ou pas).
Maintenant, en Europe, on n’a pas de BST, donc plus de vaches, donc plus de merde pleine d’azote pour nos nappes phréatiques, et plus de méthane à effet de serre que les vaches pètent à longueur d’année. Mais bon le lait est naturel et assez bon marché, donc je suis content.
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
Agoravox utilise les technologies du logiciel libre : SPIP, Apache, Ubuntu, PHP, MySQL, CKEditor.
Site hébergé par la Fondation Agoravox
A propos / Contact / Mentions légales / Cookies et données personnelles / Charte de modération