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ZEN ZEN 23 janvier 2010 11:50

La calculette de l’auteur devrait être changée
Le problème est bien plus compliqué, quand on regarde certaines évolutions
Une autre approche :

La bombe P (comme population) annoncée par le prophète Paul Ehrlich en 1970 n’explosera pas. La population mondiale a franchi le seuil du milliard au milieu du XIXe siècle et celui des 6 milliards en 1999.
Contre toute apparence, elle est en voie de stabilisation rapide
.
___En 1969, la Terre comptait 3,6 milliards d’habitants ; aujourd’hui, 40 ans plus tard, elle en compte 6,8 milliards (+84%) et dans 40 ans, elle en comptera environ 9,4 selon les estimations de l’ONU.
Cet accroissement à venir peut sembler important en valeur absolue. Il n’est que de +38%, soit deux fois moins rapide que dans la période antérieure.Sur les 2,6 milliards d’hommes supplémentaires qui peupleront la Terre en 2050, 900 millions seront en Afrique et 1,7 milliard dans le reste du monde, ce qui correspond pour celui-ci à un accroissement de « seulement » 28%.Les démographes sont à peu près d’accord pour considérer que la population mondiale ne devrait pas dépasser les 10 milliards à la fin du siècle. « Mais c’est 3 milliards de gens en plus qui vont réclamer comme les autres de brûler du pétrole et consommer du steak, disent en substance les rapporteurs de l’ONU. Ne faut-il pas intervenir dès maintenant pour amplifier la baisse de la natalité, en premier lieu dans les pays riches, qui ont le plus d’impact sur l’environnement ? »

- Effet d’inertie :Ici intervient un premier principe : l’« inertie démographique », qui montre les limites de cette action. Les naissances des 30 prochaines années sont en effet déjà très largement programmées... de même que les décès !En voici un exemple : l’Algérie affiche cette année 0,4 décès pour 100 habitants (taux de mortalité) soit deux fois moins que la France (0,9%) ! Ne croyons pas que le soleil et la nourriture méditerranéenne entretiennent la santé... Simplement, les Algériennes, il y a un demi-siècle, faisaient de très nombreux enfants : plus de 6 en moyenne (c’est ce qu’on appelle l’indice de fécondité).- Comme l’Algérie n’avait alors que 9 millions d’habitants, le nombre annuel de naissances n’était jamais que de 270.000 naissances par an (soit un taux de natalité de 3% par an).- La population algérienne dépasse aujourd’hui les 35 millions d’habitants tandis qu’arrivent à la fin de leur vie les générations peu nombreuses nées du temps où l’Algérie était peu peuplée.De là ce taux de mortalité très bas (nombre de décès actuels / population actuelle).Depuis une vingtaine d’années, les Algériennes ont vu leur indice de fécondité chuter de plus de 6 enfants par femme à un plus de 2 aujourd’hui. D’ici une génération, elles auront le même comportement démographique que les Européennes actuelles (c’est aussi le cas des Tunisiennes, des Marocaines, des Iraniennes,...).
__________En attendant, l’« inertie démographique » nous réserve là aussi un singulier paradoxe : la population de l’Algérie continue d’augmenter à un rythme soutenu alors que la fécondité a beaucoup baissé !...C’est que les jeunes Algériennes nées il y a vingt ans ou plus ont le désir de fonder une famille comme la plupart des femmes. Même si elles ne doivent avoir qu’un ou deux enfants, ces naissances seront beaucoup plus nombreuses que les décès concomitants de personnes nées il y a plus de 50 ans.Il s’ensuit que la population algérienne poursuivra sa croissance pendant une génération avant de se stabiliser. Si l’on voulait la stabiliser au plus vite, il y faudrait des mesures dictatoriales pour empêcher des femmes d’enfanter. Cela ne serait pas seulement immoral ; ce serait également stupide avec le risque de déboucher sur un « coup d’accordéon »...On a connu ce type de phénomène dans les années 1970 quand nos dirigeants ont jugé qu’il y avait trop de médecins et pas assez de pêcheurs : ils ont donc brutalement fermé l’accès aux facs de médecine et subventionné l’achat de bateaux, cela pour s’apercevoir aujourd’hui que l’on manque cruellement de personnel médical et que l’on a beaucoup trop de chalutiers !De la même façon e
n démographie, les ruptures débouchent au bout d’une génération sur des tensions inédites  : c’est le dictateur roumain Ceaucescu qui interdit brutalement les avortements en 1967, d’où, l’année suivante, un trop-plein d’enfants qui ne trouvent pas d’accès dans les institutions et les écoles.
- Contrastes démographiques :Interpellé sur l’explosion démographique des années 1960-1970, Alfred Sauvy ne manquait jamais de souligner l’extrême diversité des situations : chaque région du monde a ses problèmes et requiert des solutions spécifiques  ; on ne peut guérir l’une en soignant l’autre, de même qu’on ne guérit pas un obèse en mettant son voisin à la diète, surtout si ce dernier souffre d’anorexie.
_______La diversité des situations est aujourd’hui tout aussi manifeste. On peut distinguer :- L’Europe et l’Amérique du Nord : fécondité très faible (1 à 2 enfants par femme) et immigration importante,- L’Extrême-Orient et l’Asie du sud : fécondité faible (environ 2 enfants par femme) et ratio très déséquilibré des sexes avec jusqu’à 140 garçons pour 100 filles à la naissance au lieu d’un ratio naturel de 110/100 ; pour des raisons culturelles en effet, les fillettes sont éliminées avant l’accouchement (ou après), ce qui risque de provoquer dans les pays concernés de très graves tensions sociales dans un- Le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et l’Amérique : fécondité déclinante (2 à 3 enfants par femme),- L’Afrique subsaharienne : fécondité toujours très élevée (5 à 7 enfants par femme sauf en Afrique du Sud).
Le planning familial (promotion de la contraception) a facilité la transition démographique chaque fois que le contexte politique et culturel s’y prêtait ; elle reste inefficace quand ce n’est pas le cas, comme aujourd’hui dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne._____En-dehors de cette région, les rares pays qui conservent une fécondité élevée sont l’Afghanistan (5,7 enfants par femme), les territoires palestiniens (4,6), l’Irak (4,4), le Guatemala (4,4), Haïti (4) et le Pakistan (4 enfants par femme alors que le Bangladesh, ex-pays frère, a un indice de seulement 2,5 enfants par femme).
_________Notons qu’à l’exception du Guatemala, il s’agit de pays en état de guerre et dépourvus d’institutions étatiques crédibles, tout comme l’Afrique subsaharienne... Notons aussi qu’Israël est, de tous les pays développés, celui qui affiche de loin l’indice de fécondité le plus élevé : 2,9 enfants par femme. On peut y voir le réflexe de survie d’une population confrontée au spectre de sa propre destruction.

Tout cela nous montre combien la démographie est rebelle aux calculettes des experts, même ONUsiens
. Le démographe Hervé Le Bras rappelle qu’il est illusoire de prétendre gouverner les mouvements de population. « L’invocation de la population mondiale donne l’illusion qu’on peut la modifier mais il n’existe aucune institution capable d’imposer une législation destinée à limiter la croissance démographique (ou à l’encourager) », écrit-il (Vie et mort de la population mondiale, Le collège de la cité, 2009).

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