Bonjour Olivier Cabanel,
Je lis avec intérêt les articles que vous publiez sur des sujets très différents et suis impressionné par l’universalité de votre savoir.
Permettez-moi, pour une fois, de vous contredire sur quelque point et vous compléter sur d’autres. J’ignore où vous avez puisé vos chiffres mais le déficit des retraites n’est pas celui que vous annoncez.
Avant de développer mes arguments voici les sources auprès desquelles vous trouverez la confirmation de ceux-ci :
Rapport 2010 des comptes de la sécurité sociale (Cour des Comptes) http://www.ccomptes.fr/fr/CC/documents/RELFSS Rapport_securite_sociale_2010_septembre_2010.pdf ;
Rapport de la Caisse Nationale d’Assurance Vieilliesse : http://www.cnav.fr /pdf/assurance-re...
Projet de loi de finances 2010 (Assemblée nationale)
Projet de loi de finances 2011(Assemblée Nationale)
Rapport de synthèse du Conseil des Prélèvements Obligatoires :
http://www.ccomptes.fr/fr/CPO/documents/divers /Rapport_de_synthese_Entreprises_et_niches_fiscales_et_sociales2.pdf
En page 15 du rapport 2010 de la sécurité sociale vous constaterez que, en 2009, la branche vieillesse, tous régimes obligatoires de la Sécurité sociale pris en compte, affiche un déficit de 8,9 milliards pour une charge de 188,3 milliards, et que la branche vieillesse du régime général, elle, présente un déficit de 7,2 milliards.
En page 56 du rapport de la CNAV (régime général) les recettes de cette branche sont détaillées dans un tableau et les explications correspondant aux différents postes sont expliquées, une à une, sous celui-ci. L’ensemble des produits de ce régime est de 92, 704 Mds. En page 58, l’ensemble des charges est de 99,937 milliards.
Vous le savez en 1982, après la loi de finances instituant la retraite à 60 ans aucune mesure en faveur de l’assurance vieillesse n’avait été prise. Avec la création de l’allègement Aubry, dont le principe était la réduction des cotisations sociales patronales pour favoriser ou maintenir l’emploi, la Sécurité Sociale était en plein désarroi de voir à l’avenir un manque patent de recettes. L’état s’était alors engagé à compenser les effets privatifs de recettes qu’il imposait à la Sécurité Sociale (loi du 25 juillet 1994). Hélas ! Cette loi ne réglait pas l’envolée des dérogations et exonérations en tous genres qui marquèrent la poltique de soutien à l’emploi depuis 2005 pour atteindre 172 milliards en 2010.
Ceci conduisit à modifier le dispositif de compensation des pertes infligées à la Sécurité Sociale, mesure à laquelle participent aujourd’hui 9 taxes et contributions et pas seulement la CSG CRDS. Il fut décidé selon une disposition de la loi organique relative au financement de la Sécurité sociale du 2 août 2005 de laisser ce dispostif à l’appréciation du Gouvernement.
Cette loi organique avantage l’état au détriment de la sécurité sociale. Elle permet, peu importe les effets pervers des mesures de soutien à l’emploi sur les recettes de cet organisme, de n’en compenser qu’une partie, au bon vouloir du Gouvernement, à l’occasion de l’adoption des projets de loi de finances publiques et de financement de la sécu.
Ainsi, en 2009 l’Etat a pris en compte environ les 2/3 du manque de recettes de l’organisme social. Un préjudice estimé par la Cour des Comptes à 44 milliards. C’est-à-dire que l’Etat a compensé un peu moins de 27 milliards, lesquels sont, bien entendu. répartis sur les différentes branches de la sécurité sociale dont la Retraite pour 11,349 Milliards. Ceci n’est ni un financement ni une subvention mais une cotisation ou, plus exactement, la réparation partielle du préjudice causé sans même qu’il soit besoin de l’accord de l’organisme !
En supplément, l’Etat est, constitutionnellement, en charge de la solidarité, il a donc été créé en 1993 un fond de solidarité vieillesse, FSV, établissement public administratif, dont la mission est de prendre en charge les avantages de retraite relevant de la solidarité nationale. Une solidarité qui ne saurait être à la charge d’un seul régime de retraite et d’une seule caisse : la CNAV, même si elle est en charge de sa gestion.
En 2009, comme l’indique le rapport annuel de la CNAV, cette « cotisation » du FSV est de 13,830 milliards tandis que la CNAV a payé 16,2 milliards aux bénéficiares de cette solidarité ( Rapport 2010 de la sécurité Sociale p.15, version PDF)
Le poste « transferts recus » indiqué dans les recettes, en page 56 du rapport annuel 2009, s’élève à presque 5 milliards . Ce n’est pas une compensation de l’Etat, mais comme l’indique l’explication du rédacteur de la CNAV : le total des sommes dues par les salariés agricoles, des cotisations AVPF ( assurance vieillesse des parents aux foyers) et le montant de la régularisation définitive de la compensation généralisée entre régimes de retraite, lesquels sont solidaires afin d’établir un équilibre entre les régimes excédentaires et déficitaires. Ainsi en page 58 du même rapport il apparaît sur le tableau des charges de la CNAV que celle-ci a transféré pour 5,844 milliards à d’autres régimes. Elle a donc versé de sa poche 0,9 milliards au profit d’autres caisses et, en totalité, le montant des transferts recus inscrits dans les recettes de la page 56. Vous noterez également que indépendamment de ces transferts inter-caisses, la CNAV a versé 1,5 milliard à la Caisse de Retraite des Industries Electriques et Gazières (IEG), une caisse dont les affiliés ne lui paient aucune cotisation.
En supplément le rapport de la Cour des Comptes fait apparaître une différence de 1,23 milliard entre le total des charges présenté dans le rapport de la CNAV et celui que lui a fourni la direction de la sécurité sociale. Lequel est juste ? Le premier a été diffusé le 16 juillet 2010, le second date de septembre 2010. Il est probable que le second corrige une erreur du premier.
La réalité est que la CNAV sert à ses adhérents 91 milliards de prestations et paie 2 milliards de charges (gestion courante, techniques et financières, dont 569,3 millions d’impayés irrecupérables, etc..) L’assurance vieillesse dont vous parlez est donc bien déficitaire de 7,2 milliards et non de 39. Un déficit de 7 milliards qui, si l’Etat respectait le principe de compensation de 100% du préjudice causé aux recettes de la Sécurité Sociale, prévu par la loi de juillet 1994, n’existerait pas en 2009. Certitude d’autant plus évidente que, selon le rapport de la Cour des Comptes, le mesures dérogatoires et les exonérations fiscales et sociales ne font pour la plupart d’entre elles l’objet de la moindre évaluation et que les 44 milliards de pertes de recettes évoqués sont une estimation très modeste, inférieure à la réalité.
Ce n’est donc pas, comme du reste vous le laisser entendre, la durée de cotisation qu’il faut réformer. C’est la politique du soutien à l’emploi. Peu importe la pyramide des âges, quand il n’y a pas d’emploi, la prolongation du départ à la retraite ne résout rien si ce n’est à diminuer la prestation retraite de la plupart des salariés du privé qui seront bien en peine de remplir les conditions pour recevoir une pension à taux plein.
Quant à la politique d’aides à l’emploi elle coûte en 2010, 172 milliards de manque à percevoir pour l’Etat dont le déficit prévu 152 milliards améliore de 10% le triste record de l’an dernier et atteint pratiquement les 8% du PIB envisagé. C’est le constat de la pire des mauvaises gestions gouvernementales de l’histoire républicaine.
La réforme allemande de ce que l’on peut appeler le régime général, tant il y a de régimes particuliers, démarre en 2012 et s’étale graduellement jusqu’en 2029. Elle exige 45 années de cotisations ou équivalent pour que la retraite soit payée à taux plein. Le départ à 67 ans s’appliquera aux personnes nées en 1964 en 2029.
Pour le calcul des 45 années, les années d’études effectuées après 17 ans révolus sont prises en considération, même si celles-ci n’étaient pas soumises à cotisations sociales. Exemple : un bachelier qui aurait trainé sur les bancs de l’école jusqu’à 21 ans verra 4 années inscrites comme cotisées, une personne en formation technique ou étudiante le temps où il aura été enseigné. Ainsi un diplômé d’une école à 25 ans sera gratifié de 8 années et ainsi de suite,... Il est donc très difficile de comparer les formules.
Bonne journée
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