Ecologie : la nécessité du débat
Pascal Bruckner fait actuellement l'objet d'une couverture médiatique importante à la suite de la parution de son pamphlet antiécologiste "Le fanatisme de l'apocalypse".
Le courant écologiste mérite plus de considération que ce ramassis d'insultes et de raccourcis, néanmoins, il faut reconnaitre que l'arrogance et les amalgames dont font parfois usage les militants verts ne contribue pas à élever le niveau du débat.
Débat certes clos en ce qui concerne le constat de gravité planétaire, mais débat qui reste indispensable sur les moyens à mettre en oeuvre afin de préserver un avenir à nos descendants.
La notion d'écologie est aujourd'hui mise à toutes les sauces.
Elle est souvent utilisée de façon péremptoire pour justifier des approches ou des interdits parfois contradictoires.
Par exemple, au nom de l'écologie et il est possible de défendre ou de condamner les composteurs chez les particuliers. Ces appareils présentent en effet l'avantage de diminuer et de recycler les déchets organiques « à la source » ,mais par ailleurs, ils ont l'inconvénient, en accélérant le processus de fermentation, d'être très producteurs en méthane, gaz à effet de serre par excellence !
Dans la même veine, il existe un débat (probablement un peu réducteur) entre partisants d'une agriculture raisonnée conventionnelle avec labour et utilisation d'un minimum de pesticides et adeptes d'une agriculture intensive, indispensable si l'on veut parvenir à nourrir 7 milliards d'êtres humains, sans labour (afin de limiter l'érosion des sols arables) avec utilisation d'herbicides.
On pourrait ainsi multiplier les exemples de moyens ou d'objectifs qui méritent discussion.
Cet espace de débat, qui est aussi un espace d'incertitude doit absolument rester ouvert pour pouvoir déboucher sur un véritable changement de mentalité pouvant conduire à un changement de mode de vie. Changer le monde ne pourra se faire par la contrainte, il est impératif de préserver un champ d'expression par lequel il est possible de convaincre,
Pourtant, actuellement, tout se passe comme si l'adhésion à un point de vue écologiste impliquait de fait une position consensuelle sur un ensemble de moyens que l'on se doit de cautionner ou de rejeter.
C'est la caricature de « l'écolo bobo » qui roule à vélo quand il fait beau, ne se nourrit que de bio , milite contre le nucléaire et tire sa chasse d'eau avec parcimonie !
La question écologique se pose maintenant de façon cruciale et il est indispensable de dépasser ce stéréotype, sympathique mais qui a une fonction de cache-misère qui occulte la gravité des enjeux.
Car il est évident qu'il y a urgence. L'avenir de la planète est aujourd'hui, c'est une certitude, bien sombre si nous ne changeons rien à nos modes de vie. Sur le constat du réchauffement climatique et de la dégradation des écosystémes les arguments donnés par les scientifiques sont suffisamment robustes pour ne plus être mis en doute.
Concernant la gravité de la situation actuelle, l'heure n'est effectivement plus au débat.
Mais cette évidence ne remet pas en cause l'absolue nécessité d'une confrontation des points de vue sur les moyens à mettre en œuvre pour sauver ce qui peut l'être encore.
Alors, en quoi la position écologiste est-elle spécifique ? D'ailleurs l'est-elle vraiment ? On est en droit de se poser la question lorsque l'on observe les ridicules querelles intestines qui, régulièrement, discréditent l'écologie en tant que positionnement politique,
L'une des spécificité de l'écologie tient à sa préoccupation fondamentale de l'avenir du vivant, non pas seulement à court ou à moyen terme, mais à long terme.
Être écolo, c'est dépasser l'ambition individualiste de réussir à n'importe quel moyen, sa propre vie, pour prendre en compte l'avenir (et la situation actuelle) du reste de l'ensemble de l'humanité.
Se dire écologiste c'est se positionner en défenseur d'un point de vue humaniste respectueux de l'autre, de sa valeur, de ses différences et de son originalité.
En adhérant à cet ensemble de valeurs on évite l'écueil de la misanthropie et on dispose d'une position privilégiée pour conduire un débat de qualité.
La considération respectueuse mais sans concession des arguments des contradicteurs (défenseurs d'une société courant après le profit immédiat ou à très court terme pour quelques privilégiés) est, à mon avis, le préalable indispensable à l'émergence d'un débat de fond sur les moyens à mettre en œuvre pour réorienter les activités humaines dans une perspective compatible avec la pérennité du vivant.
Cette option sera sans aucun doute plus productive et plus favorable à une évolution des mentalités pouvant conduire au changement, que celle qui consiste à proférer des anathèmes catastrophistes qui ne servent qu'à renforcer la peur et l'aveuglement défensif de ceux qui se sentent alors insultés,
Je sais qu'il y a urgence et c'est au nom de cette urgence qu'il faut que débute d'abord le débat !
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