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Le Médoc ou l’envers du décor

Oui c’est vrai nous avons quelques rares espaces non encore accaparés par les néo-constructions, la proximité des plages miraculeusement pas trop polluées par des naufrages de pétroliers, des forêts où poussent des ceps pas encore irradiés, mais où pour s’aventurer il faut jongler avec l’emploi du temps des chasseurs.

Nous avons également la chance de posséder de magnifiques propriétés viticoles qui font tant pâlir d’envie les pays étrangers qu’ils dépensent des fortunes pour en reproduire des micro-copies ou finissent par nous usurper le titre de « châteaux » tant convoité.

Des vignobles aux noms de réputation mondiale jalonnent les routes sinueuses, au détour desquelles des touristes paient pour avoir le privilège de couper quelques grappes de raisin et s’enorgueillir du titre de vigneron d’un jour.

Avec une telle vitrine médiatique, le Médoc pourrait être un lieu de prédilection du bien-vivre.

Un leurre !

Derrière cette vitrine il y a une réalité moins reluisante.

Les journaux vous informent de la reconnaissance des riches étrangers amateurs de bons Bordeaux, des prix ahurissants auxquels peuvent s’arracher des bouteilles imbuvables, mais ne vous parleront jamais du sort des mains rêches, déformées par le mauvais temps et les années de travail qui ont œuvré, souffert, tremblé, sué pour faire d’un cep de vigne ordinaire un vin extraordinaire.

La vie des gens ordinaires n’est pas vendable, les travailleurs de l’ombre sont faits pour rester dans l’obscurité.

Mais il y a un mal plus pervers, plus vicieux et plus fatal que le manque de reconnaissance sociale et financière qui ronge ces ouvriers agricoles, la maladie.

Celle qui leur tombe dessus à l’aube de la cinquantaine après une quasi-quarantaine d’années de labeur, pourtant ne leur avait-on pas dit qu’ils avaient de la chance de vivre et travailler au milieu des vignes ? donc il faut chercher ailleurs la cause de ce mal, même le médecin de famille n’y voit aucune explication, peut-être l’hérédité ? le frère ou l’oncle n’est-il pas mort dans les mêmes conditions au même âge ? le fait qu’il ait lui aussi travaillé dans les vignes n’étant bien sûr qu’une coïncidence !

Il y a bien ce documentaire qu’ils ont regardé, mais ça ne se passait pas ici, les gens qui se disaient malades avaient utilisé plus de produits qu’eux. Ils ont bien un doute mais les paroles rassurantes de leur employeur et dissuasives de la MSA ont vite fait de le balayer.

Le copain du village qui a osé demander la reconnaissance de maladie professionnelle ne l’a-t-il pas payé cher ? Il est depuis mis à l’index, on le dit ruiné par des soi-disant frais de procédure, et même s’il s’en sort plus personne ne l’embauchera, non au village il ne fait pas bon remuer tout ça.

Le patron, n’a-t-il pas fait preuve de grande sympathie, de compréhension lorsqu’une employée a dû arrêter de travailler à force de faire des fausses couches ? elle est trop fragile …

Son enfant a hérité de cette prédisposition à la maladie, il est né prématurément et est toujours souffrant…

Son cas n’est pas isolés, l’enfant d’une famille récemment installée est atteint d’une tumeur, la preuve que cela n’a aucun lien avec le fait de travailler les vignes, non ils travaillent en ville mais habitent au milieu des vignes, le fruit du hasard….

Non on ne leur aurait pas menti sur un sujet aussi grave, s’ils sont plusieurs à être malades c’est à cause de la dureté du travail, de l’exposition au froid, aux fortes chaleurs. Mais ils sont rassurés, leurs employeurs préparent déjà leur remplacement, une main d’œuvre étrangère temporaire, est là pour leur succéder à moindre coût, ils l’ont lu dans la presse locale.

La presse locale, une presse à leur portée qui leur parle de chez eux, s’il n’y a jamais eu d’article sur un éventuel danger à travailler dans les vignes, c’est qu’il n’y avait rien à redire non ?

 

Quand ils liront un article sur le Médoc viticole, ils ne liront jamais la réelle dangerosité des pesticides, ils ne liront jamais que les femmes enceintes devraient fuir les vignes, ils ne liront jamais que les enfants juste conçus sont déjà exposés à un risque majeur de développer un cancer durant leur plus jeune âge ou toute autre pathologie, ils ne liront jamais que la maladie de parkinson n’est pas une fatalité, ils ne liront jamais qu’ils peuvent se rapprocher d’associations de défense des victimes des pesticides, ils ne liront jamais qu’ils peuvent être représenté gratuitement par un grand cabinet d’avocat, ils ne liront jamais que s’il se battent ils contribueront à mettre un terme à ce règne du silence qui asphyxie nos campagnes…

Ils ne le liront jamais pourtant j’ai essayé…


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3 réactions à cet article    


  • Jason Jason 30 octobre 2012 13:45

    Quand la charge de la preuve d’inocuité des pesticides n’est toujours pas du côté du fabricant, ou si elle existe, c’est à partir d’essais tronqués et de normes fantaisistes.

    La France est le pays d’Europe qui emploie le plus de pesticides et de déshebants à l’hectare. C’est particulièrement vrai pour les vignobles.

    Bruxelles et Paris le savent. MAIS la balance des paiements (il faut bien exporter nos produits mortifères) pour le commerce extétieur est une priorité, même si tout le monde doit crever de cette politique.

    Quant aux médecins, très peu ont l’esprit critique et la volonté ou le temps de prendre le problême à bras le corps. Quand on sait que depuis les années 70, dans les congrès mondiaux il est dit que les cancers sont causés par l’activité humaine, il y a encore des médecins (dont le mien) qui ânonent que si vous êtes malade, c’est parce que vous n’avez pas les bons gènes. Ahurissant.

    Pour les autres maladies, c’est la même chose. Et la France interdit les « class actions » ou actions collectives en justice. Il faut attaquer ces entreprises à partir des USA, et là, peut-être on aura un résultat.

    La question centrale : où se situe le nombre de morts pour interdire un produit ?


    • tchoo 30 octobre 2012 22:38

      La France est le pays d’Europe qui emploie le plus de pesticides et de déshebants à l’hectare. C’est particulièrement vrai pour les vignobles.

      Pouvez vous nous citer des chiffres d’où vous devez puiser cette affirmation ?


      • Jason Jason 31 octobre 2012 08:55

        Oui, c’est une étude qui date de 2008 :

        PAN Europe
        56-64 Leonard Street
        London EC2A 4LT
        United Kingdom
        Tel : +44 (0)20 7065 0920
        Fax : +44 (0)20 7065 0907
        www.pan-europe.info
        coordinator@paneurope.
        info
        MDRGF :
        40 rue de malte,
        75011 Paris
        Tel/fax :+33 (0)1 45 79 07 59
        Portable : 06 87 56 27 54
        www.mdrgf.org
        [email protected]

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