Le vaccin H1N1 présente des risques et des dangers, mais pas où l’opinion les attend

Voici quelques semaines, les Français boudaient la vaccination, mais voilà-t-il pas qu’un centre messin a été débordé ce samedi par une affluence inattendue. Colère des uns, questionnement des autres. C’est quoi ce bordel ? Les autorités font tout pour nous faire piquer et une fois qu’on est sur place, c’est quatre heures d’attente dans la chaleur et une promiscuité avec une horde de souffreteux susceptible d’engendrer un phénomène inédit, le premier cas de maladie nosocomiale contracté dans un gymnase. Le scrutateur attentif de la société, féru de philosophie sociale, ne pourra que constater une pathologie sociale. La raison ne gouverne plus les esprits. Les gens ne savent plus s’il faut ou pas se faire vacciner. Et tout ceci ne génère qu’un désordre social dont on se passerait volontiers. C’est un effet secondaire du vaccin assez inattendu. La faute à qui ?
Les Verts aquitains dénoncent la « stratégie Bachelot » visant à promouvoir la vaccination généralisée de la population tout en mettant en place un dispositif sanitaire sans précédent. C’est cette erreur, relayée par des communiqués d’experts dignes d’une propagande soviétique, qui a abouti à ce foutu merdier qu’on constate et surtout, à désorganiser les esprits en opposant les ayatollahs sanitaires aux résistants et mécréants anti-vaccin. Avec le recul, on constate comment cette campagne a été une faute et comment les médias de masse ont été complices, au lieu d’offrir leurs plateaux et colonnes à des débats contradictoires. Dès l’annonce du niveau 6 de pandémie, tout le monde a obtempéré et s’est rangé sous les ordres du ministère. Jean-Louis Roumégas, porte parole des Verts aquitains, espère que la lumière sera faite par l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques. Mais l’affaire semble déjà jugée par l’opinion critique. Il aurait été plus judicieux de présenter le vaccin H1N1 de 2009 comme facultatif pour la plupart, et recommandé pour les populations habituellement visées par le vaccin contre la grippe saisonnière. Mais le choix fut différent. L’engrenage est aisé à remonter. La vaccination nationale ne pouvait que s’effectuer dans des centres, avec des flacons de dix doses. C’est ce conditionnement qui a empêché l’intervention des médecins de ville. Enfin, que penser de cette stratégie inadéquate ? La ministre a-t-elle usé du principe de précaution contre la colère de l’opinion publique au cas où une demande de vaccins n’aurait pas été satisfaite. Confirmation du verdict. Pathologie sociale en vue.
C’est l’occasion de revenir sur cet emballement où l’émotion l’emporte sur la raison. Ne pourrait-on mettre en relation l’afflux des patients avec l’annonce ce samedi matin de trois cas de mutations du H1N1 en Norvège et bien évidemment, le communiqué laconique des autorités médicales sur une protection par le vaccin contre ce virus mutant. Des conclusions scientifiques ont été délivrées dans la presse sans aucun souci des procédures en œuvre lorsqu’il s’agit d’établir des faits scientifiques. Ces savants sont-ils des devins pour savoir à l’avance que le vaccin sera efficace contre cette mutation ? Pourtant, chaque année, les souches du vaccin grippal sont modifiées, preuve s’il en est qu’un vaccin ne garantit pas une immunité croisée. En plus, d’autres mutations ont été identifiées ces derniers mois. Enfin, ce n’est pas avec trois cas de contamination qu’on construit une nouvelle épidémie avec un nouveau virus. Bref, si cette annonce avait pour effet d’affoler les populations et de les amener vers les centres de vaccination, alors, c’est plutôt réussi. Le scientifique connaît très bien les procédés de validation des publications. Un comité d’évaluation prend le temps de tout décortiquer et le cas échéant, de demander des expériences supplémentaires. Parfois, un article est publié un an après l’envoi du premier manuscrit. Certes, le Net a changé les choses mais l’urgence pandémique n’autorise pas à la science de donner des faits sans contrôle, prenant alors la tournure du cirque médiatique qu’on voit quand un fait crapuleux se produit. Sans qu’une instruction judiciaire ait eu lieu, les médias livrent un coupable.
Pour finir, un élément pour discuter de la vaccination anti-grippale. Cette stratégie de santé publique mérite d’être discutée. Tout d’abord, parce que certaines voix mettent en doute l’efficacité du vaccin. Des biais statistiques pouvant intervenir. Ensuite, connaît-on vraiment l’organisme et le fonctionnement de l’immunité. Ne peut-on penser qu’une vaccination intempestive pourrait dérégler le système immunitaire en le mettant en contact avec des antigènes grippaux et le faisant produire une réaction précoce qui ensuite mémorisée, pourra être déclenchée avec plus d’efficacité et de rapidité lorsque la souche virale se présentera ? C’est là le principe de la vaccination, qui du reste a fonctionné avec d’autres virus, la variole, la polio, le tétanos… Mais ces virus n’avaient pas cette propriété de mutation intempestive qu’on connaît avec la grippe dont la singularité est d’avoir un patrimoine génétique scindé en quatre, ce qui permet les réassortiments. Au final, deux arguments s’opposent. Faut-il faire de la vaccination une ligne de Maginot anti-grippale ou bien ne vaut-il pas mieux laisser les organismes se coltiner une grippe, se défendre et de ce fait, jouer sur l’apprentissage naturel des défenses et le renforcement de l’organisme après un combat contre l’envahisseur ? N’oublions pas que notre système immunitaire est tout de même le résultat de millions d’années de perfectionnement grâce à l’évolution. On peut alors se demander si la vaccination généralisée contre la grippe ne relève pas d’une vérité théologique, au lieu de faire l’objet d’une évaluation critique, ainsi que d’une discussion sur de possibles dérèglements du système immunitaire dans ce contexte précis d’un virus qui mute et remute.
Déjà en 1976, Foucault, dont les analyses manquent cruellement ces temps-ci, avait critiqué ce qu’il appelait la somatocratie, évoquant entre autres choses la productions d’individus plus fragiles par excès de thérapies. Mais aussi dénonçant la marchandisation des soins. La médecine a rencontré l’économie. Le système sanitaire s’est industrialisé. Ce qui pose problème, c’est le mélange des genres et l’intervention du politique dans l’expertise sanitaire, le tout relayé par la communication médiatique dont on voit comment elle court-circuite, avec son timing effréné, la temporalité plus longue nécessaire à l’élaboration de conclusions scientifiques. Alors que du point de vue normatif, nous voyons une évolution se dessiner depuis la santé considérée comme un droit, vers une sorte de devoir de santé qu’on pratiquerait comme il y a des siècles, on se devait d’aller à la messe.
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