Sanogo le putschiste qui se compare à Charles de Gaulle
Si le ridicule tuait, il aurait tué Amadou Haya Sanogo depuis longtemps.
Dans une tribune publiée le 25 octobre dernier dans les colonnes du Quotidien Le Monde, le capitaine malien Amadou Haya Sanogo affirmait sur un ton péremptoire :
« ATT a été ce que le Maréchal Pétain a été pour la France de 1940 et je n’ai été pour le Mali que ce que de Gaulle a été pour la France ».
Paraphrasant par la suite le chef de la France libre, le capitaine putschiste assure que si Tombouctou est outragée, Tombouctou est brisée, Tombouctou est martyrisée, Tombouctou sera libérée comme Paris l'a été. D'après lui, cette libération sera l'œuvre d'une armée malienne moralement réarmée et rééquipée.
Tourmenté par les démons du pouvoir, Sanogo puise l'essentielle de ses références et de ses modèles dans l'Histoire de l'ancienne puissance coloniale et réserve la primeur de ses sorties médiatiques inédites aux médias français.
On est tenté de se demander si l'Histoire du Mali et de l'Afrique en général manque de héros au point où l'on soit obligé d'aller s'abreuver à la source des références historiques étrangères.
Et pourtant l'Histoire du Mali et de l'Afrique en général regorge à profusion de modèles aussi redoutables que puissants parmi lesquels : Soundiata Keïta, l'Almamy Samory Touré, Behanzin, Prempeh. Pour ne citer que ceux là.
Les hommes de Sanogo ont procédé depuis le putsch à de nombreuses arrestations dans les milieux politiques, économiques, médiatiques et militaires, proches de l'ex-président Touré ou considérés comme tel. Et le dernier fait d'arme du Trublion de Kati est d'avoir arrêté le Premier ministre Cheick Modibo Diarra et de l'avoir poussé par la suite à la démission.
Les ingérences intempestives de Sanogo dans les affaires de l'Etat freinent l'avancée des négociations pour la reconquête du nord du Mali désormais aux mains des mouvements terroristes. Sanogo viole l'ordre constitutionnel en s’immisçant dans des affaires qui ne sont pas de son domaine de sa compétence. Cette attitude désinvolte du Trublion de Kati a amené Yayi Boni, président du Bénin et président en exercice de l'Union africaine à inviter fermement Sanogo et les militaires à se retirer de la vie politique au Mali : « Pour nous faciliter la tâche, il faut absolument que les militaires retournent dans leurs casernes définitivement et cessent leur interférence dans la vie politique de ce pays .Ce qui nous permettra d'obtenir l'adhésion de certains partenaires qui en font des préalables et c'est pourquoi nous voulons demander au capitaine Sanogo de se retirer de l'animation de la vie politique dans ce pays. Il peut prendre la retraite et devenir civil pour nous faciliter la tâche ».
L'un des actes cocasses du drame malien a été la nomination en août dernier de Sanogo à la tête du comité de réforme de l'armée par le président intérimaire Dioncounda Traoré. On est tenté de demander comment ce « petit capitaine » qui jusqu'alors, dispensait des cours d'anglais au Prytanée militaire de Kati, école où il a été formé et qui ne possède pas de compétences particulières procédera pour réformer une armée en déliquescence et actuellement gangrénée par la corruption et l'affairisme.
Déjà, en juin dernier, Sanogo a dû à son grand dépit, renoncer au statut « d’ancien chef d’Etat » que les pontes de la Cédéao lui avait octroyé avec une coupable légèreté. A l’heure où se dessinent, fût-ce dans un épais brouillard, les contours d’une opération militaire ouest-africaine, il s’agit pour l’ancien prof d’anglais du prytanée de Kati de sauvegarder une rente de situation et les privilèges qu’elle procure.
Amadou Haya Sanogo fait partie de la catégorie des personnages qui méritent d'entrer dans les oubliettes de l'Histoire et doivent y être rangées dans le tiroir des « accidents de l'Histoire ». L'Histoire africaine contemporaine a souvent mis accidentellement au devant de la scène des trublions fantasques à l'instar de : Jean-Bedel Bokassa, Mobutu Sese Seko, Idi Amin Dada Moussa Dadis Camara.
Amadou Haya Sanogo a d'ores et déjà signé son entrée triomphale dans la liste non exhaustive des « accidents de l'Histoire ».
Il est préférable pour le capitaine Amadou Haya Sanogo de se retirer de la scène publique et de renter dans les casernes.
Puisque l’intéressé invoque avec tant de ferveur les mânes de son grand idole « Charles de Gaulle », il ferait mieux de méditer sur l'exemple de son modèle. Lequel s’exila à Londres, sut s’effacer un temps, ne revint au sommet qu’avec l’onction des urnes, puis se retira en Irlande à l’heure du désaveu de 1969.
Les populations maliennes meurtries du Nord attendent toujours la libération promise par le capitaine Sanogo lorsqu'il déclarait dans Le monde : « Notre pays doit se libérer ! A l'image de la France de 1940 ».
Cher capitaine Sanogo, il faut savoir quitter les choses avant que les choses ne vous quittent.
L'ancien putschiste guinéen Moussa Dadis Camara en sait quelque chose.
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