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Commentaire de Dominique Larchey-Wendling

sur Le syndrome Tchernobyl à l'épreuve de l'enjeu énergétique et climatique


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Dominique Larchey-Wendling 14 avril 2007 11:50

@ l’auteur,

La peur engendrée par le nucléaire est causé par l’attitude du lobby nucléaire lui même : secret et dissimulation. Le cas de Tchernobyl est exemplaire de ce point de vue. Peut-être que l’ampleur de la catastrophe a été dissimulée par peur d’une réaction « irrationnelle » de rejet immédiat. Toujours est-il que la dissimulation n’a pas empêché le rejet et que les gens qui auraient pu prendre des précautions élémentaires ne l’ont pas fait.

Parlant de mon expérience personnelle, je vivais en Alsace à l’époque et je peux vous dire que l’attitude vis-à-vis de la catastrophe était bien différente d’un côté et de l’autre du Rhin. J’étais enfant mais je me rappelle parfaitement avoir mangé des tomates du jardins « extraordinaires » : certaines faisaient de 15 à 20 cm de diamètre. Ma mère n’aurait peut-être pas été émerveillée par son jardin et nous n’aurions peut-être pas mangé ces légumes si nous avions fait le rapprochement avec Tchernobyl. Je précise que jamais un tel phénomène de s’est produit à une autre occasion dans notre jardin.

Qui est à l’origine des fables du père Noël dont on a bercé tous les français, et que moi, certes enfant à l’époque, j’ai cru ? Peut-être ma visite de la centrale de Fessenheim m’avait-elle efficacement convaincu de la sécurité des installations nucléaires ...

Un autre problème du nucléaire (de fission) est qu’il nous donne à nous français l’impression qu’on peut résoudre la crise énergétique avec.

Pour plusieurs raisons, le nucléaire est un marché de niche. La première est que les réserves sont estimées à 250 ans au rythme de consommation actuel qui est de 2% de l’énergie totale consommée contre 37% pour le pétrole par exemple. Sachant que le « Peak Oil » a peut-être été atteint début 2007 et que d’après M. Simmons (auteur de « Twilight in the desert »), il est certain que nous atteindrons le pic avant 5 ans, il faut envisager le déclin de la production de pétrole.

D’autre part, la consommation d’énergie est censée croitre sans quoi il n’y aura pas de croissance économique. Donc imaginons par exemple que d’ici 15 ans, la production d’énergie nucléaire viennent se substituer au déclin de la production de pétrole pour constituer disons 20% de la production totale d’énergie. Même en supposant cette production totale n’a que peu augmenté, ça veut dire une multiplication par 10 de la capacité de production d’énergie nucléaire et donc de la consommation d’uranium. Par une simple règle de 3, dans 15 ans, les réserves d’uranium seront donc d’au plus 250/10 = 25 ans.

Dans ce scénario de la fission qui nous sauve tous de la crise énergétique, il n’y a plus d’uranium dans 40 ans. Alors non, l’énergie de fission ne pourra JAMAIS se substituer au déclin de la production de pétrole, puis de celle de gaz, au niveau mondial en tous les cas.

Ca ne veut pas dire qu’elle ne peut pas constituer une solution pour la France mais il faut comprendre que cela implique que nous allons devoir payer ou défendre militairement un privilège de plus en plus exorbitant.

L’autre problème, c’est celui de la prolifération de l’uranium 235 et du plutonium, les risques d’accidents sur les centrales et d’éventuelles utilisations militaires. Inutile d’insister ... si on écoute la candidate socialiste, il faut dès aujourd’hui imposer notre hégémonie nucléaire civile à tous les pays non alignés. Bref encore des conflits en perspectives.

Enfin, le lobby nucléaire constitue un problème pour la gestion de la recherche en France car il capte une part énorme des moyens financiers de recherche et s’oppose systématiquement aux développements des énergies renouvelables par peur de voir s’enfuir les moyens, et surtout le pouvoir que lui donne de son hégémonie. Ceci est simplement inacceptable pour les citoyens français.

Enfin, derrière le miracle nucléaire français se cache des couts énormes de démantèlement des centrales obsolètes auxquels nous allons bientôt devoir faire face : une dette aux générations futures aussi, mais de celle là, vous n’en avez pas parlé. Sans oublier de la gestion des déchets nucléaires ...

Bref, le nucléaire n’a pas que des inconvénients pour la France mais ce n’est pas du tout une solution miracle et elle risque d’avoir un cout terrible si nous devons défendre notre accès exclusif à cette source d’énergie contre d’autres pays peu enclins à accepter notre domination et à mendier les miettes que nous voudrons bien leur laisser.


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