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Commentaire de angelina

sur Une énième potion d'Harry Potter : la coupe est pleine !


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angelina (---.---.96.74) 23 juillet 2006 13:39

Cher Monsieur,

J’ai lu votre excellent article avec beaucoup de plaisir, étant donné que je partage entièrement votre avis ! « Harry Potter » est un livre inutle, où il ne se passe rien de passionnant. Comme vous le dites, mieux que moi d’ailleurs, on peine à croire que des millions de gens attendent avec frénésie chaque sortie du nouveau tome, pour ensuite s’y plonger avec autant de délectation. Cela cache quelque chose de plus grave : cette sorcière de JK Rowling a distillé dans tous ses romans des messages subliminaux afin de les convaincre de jouer à l’apprenti sorcier... Et puis, quelle mauvaise influence ont ces livres sur la jeunesse ! Des études menées par de bons scientifiques, non-lecteurs de Harry Potter, ont montré que lire ces livres poussaient les enfants à lire encore plus d’ouvrages, d’autres auteurs tels qu’Hemingway, Maupassant, Hugo et autres... Non mais vous vous rendez compte ? Enlever les enfants de devant leur télé et leurs consoles pour les amener à LIRE ?!! Quelle infamie !

Comme vous le sous-entendez dans votre brillante introduction, il vaut bien mieux les laisser devant leur écran de télé à s’affaler devant du bon vieux football. Sans oublier les fameuses chips et sodas qui l’ accompagnent. C’est comme ça que les enfants développeront leur intelligence ( en même temps que leur tour de taille) et pourront devenir, plus tard, de très bons journalistes sur le net, à votre image...

Je pense que vous avez deviné, cher Monsieur, que tout ceci n’est qu’ironie visant à mettre en exergue les déficiences de votre article. Neanmoins, j’ai pris le temps de le lire en entier, même si il va à l’encontre de mon opinion. Je vous saurais gré d’en faire de même avec mon commentaire.

Je voudrais me permettre de corriger certains de vos arguments. Dès l’abord, vous dénoncez une distribution manichéenne des rôles élémentaire, entre d’un côté les méchants, la famille Vernon avec « les Moldus » (ceux qui ne comprennent rien à la sorcellerie), et la gentille victime innocente, Harry et bientôt ses amis sorciers."

Il semblerait que certaines subtilités de ces livres vous aient échappé ( à force de sauter des passages ?) Les Moldus ne sont pas dénigrés, voyez par exemple les parents d’Hermione, ayant de nombreuses qualités. De plus, aucun manichéisme n’est présent dans cette oeuvre : que faites-vous de James Potter, le père de Harry, décrit dans le tome 6 (mais peut-être n’êtes-vous pas allé jusque-là) comme un personnage s’avérant cruel, orgueilleux, imbu de lui-même et doté d’un mauvais sens de l’humour... Dans ce même tome, Drago malfoy, l’ennemi juré de Harry, est montré sous un jour nouveau : on le découvre faillible, vulnérable, et il attise notre sympathie. On comprend mieux ses choix, sa situation, et finalement il n’est pas si mauvais qu’on le croie. Et que dire de Severus Rogue, sur qui on pourrait écrire des pages... Personnage-clé de cette saga, il était du côté des « méchants », comme vous dites, à l’origine mais s’est racheté. Il voue sa vie à servir le bien, même si des souvenirs le hantent. Il a plusieurs fois risqué sa vie pour cela, mais rien ne semble l’écarter de la mission sacerdoçale qu’il s’est vu confier... Sa fidélité est sans cesse mise en doute au cours des tomes, il est sans conteste le personnage le plus mystèrieux ( et passionnant) de la saga. Le thème du pardon est évoqué, de la culpabilité, de la confiance. On est loin de la vision manichéenne que vous soupçonnez.

« on naît supérieur - ici avec des dons de sorcier ; Harry porte la marque à son front d’une cicatrice qui reste la trace de sa résistance, tout bébé, aux forces du mal qui ont emporté ses parents. Autrefois, on naissait noble ou manant, et rien ou presque dans la vie ne pouvait rien y changer. Est ainsi ignoré qu’on peut développer son intelligence ou non par son travail, puisqu’en somme, on est (on naît) intelligent comme Harry ou on ne l’est pas ! Pas question de le devenir ! »

Heu, avez-vous lu le même livre que des millions de lecteurs ?? Que faites-vous des paroles de Dumbledore, le directeur, qui affirme que la cicatrice n’est pas le plus important, que ce sont les choix les plus probants. « On est jugé selon nos actes, non selon notre origine »... Harry a failli aller à Serpentard, maison vouée à la magie noire, mais il a demandé à aller à son opposé, Gryffondor. Malfoy lui a proposé ses conseils à son arrivée, mais il a refusé...Ce n’est pas sa cicatrice, mais lui qui est maître de ses décisions et donc de son destin. De surcroît, il est loin d’être le plus intelligent de l’école. Ses notes en divination, histoire de la magie et en potions le prouvent. Hermione, en revanche, est la meilleure élève dans -presque-toutes les matières. Et pourquoi ? As-t-elle des parents célèbres, qui lui ont transmis leurs pouvoirs ? Rien de cela, elle est fille de moldus, dénués de pouvoirs magiques. Mais à force de travail acharné, de lectures ( tient, encore elles ! ) et d’assiduité, elle est parvenue à se isser, par ses seuls efforts, à la première place. N’est-ce pas à l’opposé de ce que vous affirmiez d’un ton si péremptoire ?

Argument suivant : « Harry Potter est connu de tous avant même qu’il ait accompli le moindre exploit ». Oui, c’est vrai. Et il est le premier à s’en plaindre. Comme il le répète fréquemment, être connu parce que ses parents ont été assassinés, ça n’a rien d’agréable. En outre, Harry a fait ses preuves plus d’une fois : il a empêché Voldemort de s’approprier la pierre philosophale, sauvé Ginny de la chambre des secrets et détruit un horcruxe ( ce qui n’est pas rien), libéré son parrain, gagné la coupe des 3 sorciers et échappé à Voldemort et ses dévôts, il s’est battu contre plusieurs mangemorts... Il est davantage célèbre pour ses propres exploits que pour son origine.

Vous continuez ainsi : « les enfants sont répartis en équipes (les quatre maisons) et une concurrence effrénée est stimulée, assujettissant chaque élève à la pression du groupe ! Quelle éducation ! » Ce livre s’inspire de la réalité des faits d’aujourd’hui. Dans une équipe de foot ( puisqu’il semblerait que vous en êtes un fan , chaque équipe ne joue-t-elle pas contre l’autre ? Il y a bien concurrence, non ? De manière plus prosaique, le système des bons points, très ancien, fait également l’éloge de la concurrence, si l’on va par là ! Puisque chaque enfant compare avec ses copains le nombre d’images qu’il a, et fait des efforts afin d’en obtenir davantage. Quelle éducation !

De plus, le directeur met l’accent sur l’entraide entre les maisons, la fraternité qui doit exeiter, les liens qui doivent s’y tisser...Et proscrit toute rivalité, en mettant en garde contre les dangers de la jalousie et des disputes.

« Seules la connaissance des rapports de force, celle du droit, et la détermination à assurer sa dignité ou sa survie sont des moyens raisonnables et parfois efficaces. » Là, il faudrait savoir ! Soit la séparation entre bien et mal est trop visible, soit pas assez... Les rapports de force sont clairs, et il me semble qu’avec tout ce que Harry a fait, il a clairement prouvé sa « détermination à assurer sa dignité et sa survie ».

« Une sixième idée archaïque, enfin, donne surtout une représentation fictive de la sorcellerie ». Effectivement, et je croie que c’est le seul point sur lequel vous soyez dans le vrai concernant Harry Potter : il s’agit d’une fiction. Mais a-t-on besoin d’un article si critique pour le dire ? A l’évidence, « Harry Potter » n’est pas un une encyclopédie en douze volumes des méthodes d’envoûtements et de désenvoûtements modernes. Pour ça, il y a des boutiques spécialisées.

Vous achevez votre article par : « Il est à craindre que des enfants nourris d’Harry Potter et autres fadaises de même farine, ne puissent compter sur aucune baguette magique pour résister aux agressions qui seront l’ordinaire de leurs relations sociales à venir. » Au contraire. La vérité est toute autre. JK Rowling fait découvrir aux enfants des sentiments essentiels à la vie en société, et chaque évènement qui se déroule dans les livres éclaire d’une certaine manière le monde moderne qu’ils auront à affronter. Il s’agit d’une série qui a pour vocation de faire rêver les lecteurs, de leur faire vivre par proocuration des aventures passionnantes et de leur faire découvrir les plaisirs de la lecture. En outre, JK Rowling met en exergue les notions de courage, de fidélité et d’amitié. Mais force est de constater qu’elle ne s’arrête pas là. Elle aborde également les questions de la responsabilité de ses actes, des conséquences parfois lourdes de ses propres choix, du poids de la conscience.

Les problèmes du racisme, de la descrimination et des moyens de s’en prémunir et de les combattre sont des thèmes qui transparaîssent dans ses ouvrages. La pauvreté également, l’ombre de ses parents, le mensonge, la trahison, mais également le pardon, le sentiment d’impuissance, la mort d’un proche, la capacité de continuer à vivre malgré la tristesse...Et pour finir les joies simples de la vie, le partage, un fou rire entre copains, un souvenir émouvant... C’est tout cela que JK Rowling distille dans chacun de ses livres, par un mélange savamment dosé dont elle seule a la recette...

Voilà, j’espère, Monsieur Villach, que vous aurez pris le temps de lire mon avis comme j’ai pris le temps de lire le vôtre. Je respecte tout à fait votre avis et j’accepte que chacun aie le sien, néanmoins il est essentiel qu’il s’appuie sur des arguments solides et sérieux, étayés d’exemples comme j’ai essayé de le faire aujourd’hui.

J’espère vivement avoir votre avis sur ce que je viens d’écrire, c’est pourquoi je vous laisse mon adresse e-mail en attendant votre réponse. Merci beaucoup d’avance !

Angelina


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