• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Tama

sur Prostitution : « Avant les lois Sarkozy, la police passait et les choses s'arrêtaient là »


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Tama (---.---.62.23) 17 août 2006 20:54

Cool Mel

« si un gamin de 10 ans est incapable de distinguer, spontanément - du fait même de la »succesion d’observations« -, le bien du mal, en quelque matière que ce soit, moi, j’incline à le considérer comme perdu, c’est-à-dire promis à une carrière de voyou, plus ou moins irrécupérable. Et je me réfère à un certain nombre de cas que j’ai connus... »

Tout d’abord, il serait idylique de croire qu’un enfant de 10 ans maîtrise réellement les notions de bien et de mal.

En effet, malgré le stupide adage qui veut que la vérité vraie sorte tout droit de la bouche des enfants, ceux-ci sont de sacrés raconteurs de sornettes. Que ce soit par plaisir (dire du mal, salir l’image d’un camarade par jalousie, vengeance), par intérêt futur (inventer un prétexte pour faire une connerie ou braver une interdiction), par honte du flagrant délit (raconter des histoires pour nier/expliquer/justifier une faute pour laquelle ils ont été pris).

Or, à 10 ans, selon vous, l’enfant devrait pertinemment savoir que mentir pour nuire ou se décharger de sa responsabilité est MAL.

De là, il faut séparer 2 choses : la honte et la culpabilité.

La culpabilité résulte de la prise de conscience qu’un fait commis a causé du tort, contre des règles généralement admises et relativement bien intégrées par le sujet. Exemple : « il y a 1 an, j’ai volé un CD a un ami, il en a été triste, je ne peux continuer à le fréquenter sans le lui avouer ou à tout le moins trouver un moyen de me racheter. »

La honte est tout autre, elle résulte de la publicité faite à une faute, de se découverte, et donc du jugement faite ensuite par la société (parent, école, dans le cas d’un enfant).

Les enfants sont parfaitement capables de n’éprouver ni l’un ni l’autre et généralement ils éprouveront plus vite la honte, qui est défensive, réactive et ne remet pas le fait commis en question, mais constate simplement que le sujet a été infoutu de cacher la vérité efficacement.

Mais, je m’égare. Quoique... Le simple fait de constater qu’un enfant ment assez naturellement, du fait d’un risque (d’être pris) ou de l’absence de risque (personne ne sait que je mens), alors que le mensonge n’est pas tout à fait une valeur propagée, établit que l’enfant ne saisit pas totalement la nature du bien et du mal.

Il peut en être pareil des bagarres de cour de récré, qui sont pourtant autant de coups et blessures volontaires et du chapardage discret dans l’école ou chez des amis, qui sont autant de vols simples, etc.

Maintenant, soyons honnêtes, un enfant de 10 ans ne perçoit pas encore la nature exacte du viol. Il peut répéter des mots, comme un perroquet, mais ne conceptualise pas le viol comme un adulte le fait, notamment par son expérience personnelle des rapports sexuels.

Quand bien même l’enfant aurait eu la capacité d’intégrer le bien et le mal dans une proportion qui vous fût satisfaisante, souvenez-vous qu’à un âge peu avancé (10 ans) on n’a pas un surmoi démesuré. Tout au plus est-on sage comme une image, mais certainement pas par conceptualisation des notions abstraites et arbitraires que sont le bien et le mal.

« Quand à dix ans, vous entendez dire qu’un violeur a été condamné à huit ans de prison, vous pensez que le viol est quelque chose de »vilain« , qui ne doit pas être commis. »

Ceci faisait réaction à mon propre texte.

J’essaie de me souvenir de mes 10 ans. Non pas que ce soit terriblement loin, mais ce n’est pas hier non plus...

Je me souviens avoir entendu des centaines de JT, le soir, avec les parents. On parlait de corruption, de balance commerciale, de viols, de scrutins électoraux, etc. Et je comprenais en effet que « corruption » devait être un truc de riches et d’hommes politiques et que ce n’était pas bien. Quant à savoir si je pouvait en définir les éléments constitutifs... Non, je n’aurais pas vraiment pu je crois.

Ce que je veux dire par-là, c’est que oui, un enfant doit savoir que le viol est une chose vilaine à ne pas faire, mais quant à savoir à quoi ça ressemble et ce que cela implique... A moins qu’il en ait vu dans des films : une victime se fait attaquer par un psychopathe, qui la plaque au sol, lui déchire ses vêtements alors qu’elle hurle au secours, glisse sa main pour lui entr’ouvrir les jambes, etc.

Je décris volontairement la scène pour essayer de comprendre si un parent non-démissionnaire accepterait de laisser voir ce genre de chose à son enfant de 10 ans.

Et je pense justement que ce serait bien, pour autant que le parent explique, contextualise, rassure et réponde à toute question. Questions qui l’éclaireront d’ailleurs sur la perception qu’a l’enfant. S’il dit « pourquoi le méchant monsieur fait ça », c’est qu’il a saisi au moins les bases. S’il demande « pourquoi la madame elle est pas contente », il faut sans doute établir ces bases...

Ajoutons aussi qu’à 10 ans on n’a pas encore une connaissance précise du sexe et des rapports de force ou de respect qu’il implique. De même pour la morale (combien de familles évitent le sujet avec les enfants et même les adolescents, ce que je ne juge pas par ailleurs).

Quant à votre défaitisme sur un enfant de 12 ans, je ne peux l’accepter. Sauf à créer des prisons pour les enfants de cet âge et refuser de penser qu’on a encore du chemin à parcourir avant d’être une personne responsable.

Au fait, ne vous méprenez pas, je ne suis pas un ardent défenseur du « tout n’est affaire que d’éducation ». Je suis éminemment pour les prisons (quoique dans de meilleures conditions) et la répression. Mais je constate bien trop souvent que les crapules et autres racailles que mon métier me fait cotoyer sont souvent des abrutis illettrés et incultes. Alors je me dis que, si on prend le temps et le recul nécessaires, on peut en arriver à se dire que le travail a été bâclé, tant par les parents que par la société en général.

Pour autant, nul besoin d’exonérer un jeune délinquant de ses fautes. A 10 ans, le crime est pathologique. A 16, il résulte certes du milieu, mais principalement de la volonté propre du commettant.

J’ai été long et incomplet et m’en excuse. Il faudrait des pages entières pour ne serait-ce que cerner les limites du débat sur le bien, le mal, les enfants et les pulsions...

Bien à vous.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès