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Commentaire de Philippe D

sur La tragédie du droit d'auteur


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Philippe D Philippe D 6 juin 2007 11:43

Il y a dans de nombreux domaines liés à la création de vrais problèmes de droits d’auteurs. Ne nous y trompons pas, ce sont des pans entiers de différentes industries qui sont concernées et le coût économique des pillages des droits d’auteurs est astronomique. Par ricochet évident les créateurs qui travaillent pour ces industries sont eux aussi touchés de plein fouet.

Je ne parlerai pas de ce que je ne connais pas, mon domaine d’activité est l’édition d’artistes graphiques : peintres, illustrateurs, photographes, designers etc...

Après une formation artistique, j’ai crée et dirigé pendant 20 ans une petite société d’édition d’art qui travaille et rémunère des artistes vivants, sur la base de royalties. Nous avons toujours eu des problèmes de copies, et cela nous a valu des aventures judiciaires contre des copieurs ou leurs diffuseurs, dont je me serais bien passé.

Premier problème la Mondialisation : Dans de nombreux pays la copie illégale est une activité économique qui a pignon sur rue. Pour en citer quelques uns : l’Italie qui a fait des efforts, la Turquie, la Chine, les pays de l’Europe de l’est ... Les législations des droits d’auteurs ne sont pas harmonisées, même pas au niveau européen. La France est en ce domaine le pays qui protège le mieux la création. C’est donc un véritable casse tête juridique pour essayer vainement de stopper les copieurs dans leur pays d’origine.

Prenons le cas précis d’un artiste que j’édite sous forme d’affiches et de cartes postales. En 2000, des clients (professionnels) me rapportent avoir vu à la foire de Canton, en Chine, des centaines de produits avec des reproductions de toutes tailles de ses œuvres, sur des supports aussi variés que plateaux, petits meubles, cadres, boites, assiettes ... Les œuvres sont galvaudées sur des produits de mauvaise qualité qui sont diffusés partout à travers le monde sans évidemment aucune demande d’utilisation ni paiement de quelque droit que ce soit. Attaquer en Chine est impensable financièrement. La seule solution consiste à attaquer systématiquement en France, les importateurs des produits. Ce que j’ai fait, entre autres contre une société allemande qui a eu la mauvaise idée d’exposer à 1 même salon professionnel que moi. Prise de tête, huissiers, saisie d’objets contrefaits, avocats, jugement, appel, 3 ans de procédures pour arriver à faire condamner la société en question à payer une très forte somme pour partie à l’artiste et pour partie à ma société. Heureux dénouement d’une aventure qui m’a pourri la vie pendant 3 ans, tout cela parce que des commerçants sans aucun scrupule se foutent du droit d’auteur. J’estime qu’il y a mieux à faire dans la vie que faire des procès mais il est impératif de frapper les profiteurs (solvables) du système.

Deuxième problème l’invention du photocopieur et de l’imprimante couleurs : C’est une boutade pour indiquer que l’on est confronté à un phénomène d’une telle ampleur que l’on ne peut pas l’arrêter mais seulement porter quelques coups aux plus gros profiteurs. Tant que la copie reste privée il est illusoire de chercher à agir. Dès que la copie devient commerciale il est impératif de poursuivre.

Troisième problème, Internet. La culture internet se double d’une inculture générale des droits, ce qui arrange tout le monde ou presque. Les droits d’auteurs, donc les créateurs, sont ici les grands perdants de la toile. N’importe qui illustre son blog, son site commercial ou non, avec des visuels, des textes, des musiques dont il ne se demande même plus s’il y a des droits à payer. C’est tellement généralisé, anonyme et vaste qu’il est pratiquement impossible de se faire prendre, sauf pour des phénomènes d’ampleur importante qui mettent en cause des grandes sociétés, et encore.

Nous sommes donc entrés dans l’ère du pillage systématique et toutes les règles que nous avions essayé de mettre en place sont à revoir.

Je trouve un peu cavalier de parler du problème et de s’asseoir dessus en disant que les droits d’auteurs sont morts. Il faut au contraire réfléchir à de nouvelles façons de rémunérer les auteurs, ce qui ne sera pas facile, et faire payer tous les profiteurs professionnels.


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