Le débat sur Tintin au Congo ne date pas d’hier, et la plupart des BD de l’époque exsudent la même condescendance et le même racisme. Leur lecture me choque toujours autant, et j’éprouve le même choc en retrouvant sous des plumes célèbres des termes comme « nigger ».
Tintin et Hergé ont fait du chemin sur le papier mais l’oeuvre demeure et la question se pose : faut-il « éditer », faire disparaître certains passages ? Supprimer de la langue certains termes du vocabulaire, comme le suggère une association afro-américaine ?
Ces oeuvres reflètent leur époque dans toute sa bétise (au mieux) et permettent de l’éclairer. Les détruire reviendrait à effacer la mémoire, les preuves de blessures au quotidien. Mais pas question pour autant de laisser circuler dans la nature un bus ségrégationniste avec ses panneaux indiquant les places pour les blancs et les places pour les gens de couleur, sans expliquer ni dénoncer.
A mon sens, il convient d’éditer Tintin au Congo. Sans modifier l’oeuvre de Hergé, mais en signifiant très clairement au lecteur les défauts, en présentant le contexte, en lui donnant les clefs pour se distancer de l’humour raciste. Dans une édition plus étoffée et nettement pédagogique, on pourrait même mettre à profit cette oeuvre polémique pour éclairer sur le colonialisme et le racisme, par exemple en préambule (contexte, nature de la polémique sur l’oeuvre), au fil des pages (notes), et en conclusion (encourager à la discussion, à s’informer sur le sujet).