Communiqué de l’ACADÉMIE NATIONALE DE MÉDECINE : Faut-il continuer à rembourser les préparations homéopathiques ?
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L’homéopathie est une méthode imaginée il y a 2 siècles à partir d’a priori conceptuels dénués de fondement scientifique.
Elle a vécu jusqu’à maintenant comme une doctrine à l’écart de tout progrès et un secteur marginal, complètement en-dehors du remarquable mouvement scientifique qui a bouleversé la médecine depuis deux siècles en faisant de celle-ci un secteur essentiel de la vie de l’humanité.
De façon surprenante cette méthode obsolète continue à avoir de nombreux partisans des préparations homéopathiques continuent à être produites et vendues d’ailleurs uniquement au public car dans aucun secteur de la médecine elles ne sont achetées et utilisées par les centres hospitaliers.
Mais il est également surprenant que le Ministère de la Santé leur accorde des autorisations de mise sur le marché et un remboursement par la Sécurité Sociale à ses assurés.
Il est compréhensible que la vente de ces préparations soit autorisée au moins dans la mesure où elles ne sont pas toxiques et ne constituent donc pas un danger pour le consommateur ; et dans un pays comme le nôtre avec sa tradition de liberté il n’est pas question d’entraver leur fabrication et leur commercialisation ; encore faut-il ajouter que celles-ci s’accompagnent souvent d’une publicité plus ou moins intéressée ce qui est une dérogation à la situation habituelle dans le domaine de la santé.
Mais cette propagande présente ces préparations d’un type très particulier comme des médicaments. Or quand on les examine en détail on voit qu’elles ne répondent en rien à la définition du médicament ni dans leur nature ni dans leur destination.
En ce qui concerne leur nature on sait qu’elles sont produites par une successions de dilutions allant jusqu’à l’échelle centésimale : à ce niveau nos moyens d’investigation ne permettent plus la mise en évidence d’une seule molécule de la substance originelle.
En dépit de cet obstacle majeur, la plupart des produits homéopathiques sont présentés abusivement comme efficaces dans des secteurs variés. Ici il faut souligner qu’ils se placent dans une illégalité totale. En effet, le Code de la santé spécifie qu’un médicament doit présenter un « intérêt thérapeutique » ; et la preuve de cet intérêt doit être fournie par une succession d’essais pharmacologiques et cliniques y compris des comparaisons en double aveugle.
Or tous les médicaments en vente en France s’astreignent à observer cette lourde procédure mais seuls les producteurs de soi-disant médicaments homéopathiques s’en abstiennent résolument. Quelles que soient les mesures que le Ministère jugera devoir prendre, l’Académie de médecine estime qu’il faudra exiger la démonstration d’activité de ces produits comme le font tous les laboratoires diffusant des médicaments en France ; déjà, dans un rapport qu’elle avait voté à l’unanimité en 1987 l’Académie soulignait que les produits homéopathiques devraient être soumis au droit commun qui régit l’industrie pharmaceutique.
En même temps, il est inadmissible de tolérer que ces produits fassent état d’indications très vagues ou très générales sous la formule fréquemment employée de « médicament homéopathique traditionnellement indiqué dans..... » avec des indications du type « troubles digestifs ».
Dans ces conditions, le remboursement de ces produits par la Sécurité sociale apparaît aberrant à une période où, pour des raisons économiques, on dérembourse de nombreux médicaments classiques pour insuffisance (plus ou moins démontrée) du service médical rendu.
Qui plus est, cette mesure n’aurait rien d’exorbitant car elle a été prise par beaucoup de pays notamment en Europe. C’est tout récemment, en fin 2003, que le gouvernement allemand a décidé de supprimer le remboursement des médicaments homéopathiques par les Caisses de maladie.
Mais c’était déjà le cas en Italie, en Espagne, en Finlande, en Suède, en Norvège et en Irlande.
Dans le cadre de la réforme actuelle de la Sécurité sociale française, cette mesure de suppression de la prise en charge de l’homéopathie viendrait donc à son heure. Rappelons aussi que l’Académie nationale de médecine n’est pas seule à le demander ; dans les années passées la Commission ministérielle de la Transparence avait voté à l’unanimité cette demande et ceci à deux reprises à plusieurs années d’intervalle.