Léon,
Après avoir lu votre article, qui aborde un sujet intéressant, sans en remplir malheureusement toutes les promesses, je tenais à répondre à certains passages qui me semblent paticulièrement faux, injustes ou déplacés.
Vous dites ainsi : « Par des comportements qui choquent, telle la perduration de la polygamie de quelques milliers de familles africaines en France, l’excision des fillettes, le port du voile islamique dans des lieux publics, la revendication de groupes religieux d’établir au Canada des tribunaux islamiques de la famille ayant force légale ».
Mettre sur le même plan le port du voile avec l’excision et les mariages forcés est un procédé honteux, malhonnête et irrespectueux envers la pratique et les rites de l’islam (la notion de pudeur et son corollaire « hijabique »), et qui tend à faire croire que excision et mariage forcé, sont des pratiques islamiques. Ce genre de procédé ne vous valorise pas, Léon, il ne ternit que votre intégrité intellectuelle.
Plus loin, vous dites : « Cette inquiétante étrangeté suscite une interrogation sourde qui n’osait pas s’exprimer jusqu’alors, mais qui risque sous peu de devenir une déferlante, le musulman veut-il oui ou non s’intégrer ? Où préfère-t-il maintenir une identité en rupture manifeste avec les valeurs communes du pays d’adoption ? »
Vpus devriez savoir, Léon, que ce genre d’interrogation était déjà exprimé, dans un langage plus violent, en Europe, au cours des 19è et dans la première moitié du 20è siècle, à propos des juifs. On leur reprochait leur adhésion secrète et fondamentale aux valeurs du judaïsme, incompatibles avec un attachement premier aux valeurs républicaines. On les soupçonnait de duplicité, on tançait violemment leur communautarisme. Il est décevant, pour ne pas dire choquant, qu’un homme qui a été un responsable communautaire juif, puisse reprendre à son compte ce type de discours. Je vous invite Léon à vous replonger dans la littérature nauséabonde de la France du 19è, pour vous remémorer tout cela.
Plus loin : « L’Occident s’imagine en société universelle, offrant à chacun et à chaque communauté, la possibilité de préserver ses valeurs, ses croyances, ses coutumes et son identité ; mais à quel prix ? Peut-on imaginer une société capable de tolérer l’expression publique de multiples valeurs contradictoires ? »
Ce passage est plus problématique. Comment un homme peut-il arborer fièrement la liberté de conscience pour, quelques paragraphes plus loin, remettre en cause, sous formes interrogatives, son expression ? Je crains que vous ne prôniez une liberté de conscience et d’expression sélective, Léon. Dans les problèmes que vous soulevez, il y a des choses tellement différentes, en cause. Vous tentez de dresser un portrait social et psychologique des musulmans, en vous appuyant sur certains comportements marginaux, et ce faisant, vous faîtes la part belle aux amalgames et aux raccourcis. Je crois que vous devriez laisser ce type d’exercice à ceux qui connaissent, fréquentent et étudient sérieusement, ce sujet.
Mais encore : "Les pays d’Europe occidentale avaient déjà connu des vagues d’immigration essentiellement de l’est et du sud de l’Europe ; les cultures étaient différentes mais les valeurs convergeaient. La France fabriquait alors des petits Français à partir des immigrés grâce à l’école publique obligatoire et au service militaire.
Prenons, si vous le voulez bien, un autre exemple. La communauté juive, présente en France et en Europe, depuis au moins le Moyen-âge, a toujours été rejeté, jusqu’à un passé récent, et ce malgré la pénétration sociale de ses membres. Il aura donc fallu plusieurs siècles pour que cette communauté soit toléré et accepté en France. Comment demander aux musulmans de faire ce que les juifs, anciens résidents dirions-nous, n’ont pu faire ?
Vous ne pouvez pas dire non plus, comme vous le faites en début de texte, que l’Occident tire ses racines du judéo-christianisme, terme qui ne signifie pas grand-chose, dans la mesure ou le christianisme paulinien, qui est la source fondatrice du catholicisme, s’est construit en pleine opposition avec le judaïsme pharisien, dans le but d’universaliser le message christique et d’y intégrer les non circoncis (grecs, païens...).
De mieux en mieux : « Leurs messages sont en compétition et ne convergent pas sur plusieurs points fondamentaux. Entre le sacré donné une fois pour toute et la raison pour laquelle rien n’est au-delà de son implacable critique, il n’y a pas d’harmonie possible (13), peut-on imaginer une voie de convergence entre la liberté absolue de l’homme quant à ses convictions les plus intimes et la condamnation à mort qui attend celui qui, né dans l’islam, renie l’islam ? ».
Il n’y a que les va t’en guerre et les disciples d’Huntington pour croire ce que vous dites. Vos propos dénotent deux choses : une ignorance profondes des préceptes et des enseignements de l’Islam ; une ignorance de l’histoire. Vous séparez ainsi foi et raison, science et religion, dans une lecture de l’histoire nettement ethnocentrée (l’histoire de l’Europe). Si dans l’espace de l’Europe chrétienne, le développement de la science s’est heurté aux désidératas papistes et à la censure de l’Eglise, dans la sphère arabo-islamique, le constat est nettement différent.
Si le monde musulman a donné naissance à l’une des plus brillantes et foisonnantes civilisation que la Terre a porté (sur le plan scientifique, mathématiques, physique, philosophique, juridique et poétique), ce n’est par hasard. Si cette même civilisation a produit les conditions culturelles et scientifiques de la Renaissance européenne, ce n’est pas non plus un hasard. Lisez à ce propos le remarquable ouvrage de Sigrid Hunke, « le soleil d’Allah brille sur l’occident ». Le Coran ne cesse de faire appel, dans ses versets, aux gens doués de raison, d’intelligence et de compréhension.
Il en est de même de la liberté de conscience. Aucune foi contrainte et obligée ne peut être accepté. Informez-vous davantage, Léon.
« Le respect de l’Autre est un devoir moral, éthique et légal impératif ! Il oblige l’Etat autant que le citoyen. Cela découle des valeurs fondamentales des démocraties occidentales. »
Afficher de beaux principes est une chose facile, cher Léon. Les appliquer sincèrement est visiblement plus difficile.
« Il faut espérer que l’Occident et ses immigrés musulmans sauront inventer dans les décennies qui viennent un Nous plus inclusif. »
Vous continuez à opposer Occident et musulmans contemporains, que vous réduisez aux immigrés. Ce n’est pas de cette manière que des questions aussi sérieuses, seront résolues de manière sérieuse.
Sans rancune aucune !
09/05 12:12 - Thoth
Pour vivre heureux et en bon voisinage, supprimons toutes les religions. Contrairement à leurs (...)
28/02 17:47 - Kritik
Honnêtement, je n’ai pas parcouru toutes vos intéressantes réponses et je voulais (...)
08/10 18:07 - Eric
L’article de Monsieur Ouaknine est intelligent (ce qui n’est pas le cas de certains (...)
08/10 00:29 - Léon Ouaknine
@ Fouad Bonjour Je vois que les contradictions ne vous gênent pas, du moment que (...)
07/10 17:13 - Adama
Pixel,il y a en Français le bouquin de Barnavi qui fait référence en la matière, je ne (...)
07/10 17:04 - fouadraiden
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