Sans faire interférer le service que vous m’avez rendu lorsque vous étiez au cabinet de René Monory, je dois vous dire que votre texte savoureux me paraît d’une très grande subtilité, non sans habileté. Laissant de côté votre juste propos principal qui me semble la stigmatisation de la dérive de la vie politique en milieu sarkozyste, je dois dire que je n’approuve pas, quant à moi, toutes les options de la politique judiciaire annoncée par le président et sa maîtresse femme de garde des sceaux.
Tout d’abord, comme breton, je déplore que la réforme de la carte judiciaire puisse mettre en péril l’un des rares liens institutionnels qui unissent Nantes à sa région historique, la Bretagne. C’est le gouvernement de collaboration avec le nazisme qui a choisi, pour punir la Bretagne résistante, de lui ôter Nantes. La logique systématique « une région, une cour d’appel » aboutit à séparer encore un peu plus Nantes de la Bretagne alors que les appels du TGI de Nantes, vous le savez, vont aujourd’hui à Rennes. C’est d’autant plus absurde que la réforme vise à faire des économies et que cette modification d’un ressort aussi important que celui de Nantes ne peut qu’aboutir à des frais supplémentaires d’édification d’une nouvelle cour d’appel, soit à Angers, soit à Nantes. Vous savez qu’une telle décision se chiffre en dizaines de millions d’Euros que l’allègement du contentieux devant la cour de Rennes serait très loin de couvrir.
Par ailleurs, la suppression des petits sièges de juridiction me semble moins nécessaire qu’on ne le dit, une réforme des ressorts judiciaires permettrait au contraire une répartition géographique plus harmonieuse à l’opposé de la concentration absurde prônée par les autorités actuelles de notre pays.
En dehors de cette nuance sérieuse et, je le concède, raisonneuse, votre adresse aussi malicieuse que respectueuse à votre provisoire ministre m’a beaucoup fait sourire.