Quand vous choisissez de taire le contenu d’une lettre présentée comme révélatrice, ce n’est « rien d’autre qu’un choix rédactionnel ». Quand la justice et les médias font comme vous, c’est une conspiration du silence.
Merci de l’avoir confirmé aussi franchement. C’était une « lettre ouverte », selon vous, pourtant.
Ma remarque, je le reconnais, passe à côté de bien d’autres questions. Ce n’est qu’une objection, parmi beaucoup d’autres possibles, que vous avez omis de vous faire à vous-même, et qu’il faut bien faire à votre place. L’objection vise un argument qui, si peu central soit-il, participe à la cohérence de votre propos. Iriez-vous jusqu’à dire que je cherche à détourner l’attention de l’enjeu central ? Toute objection relative à l’absurdité de l’un de vos arguments contribue au contraire à débarrasser la demande de la levée du Secret-Défense des mauvais arguments qui ne peuvent servir qu’à la rejeter.
De même, il est normal qu’une conversation sans témoin, dont l’interlocuteur est mort, rapportée dans un livre, ne soit ni démentie ni contestée ni contredite par personne. On peut simplement se demander si un agent de la DGSE bavarde pour le plaisir, ou dans un cadre opérationnel précis. Et on peut aussi se demander si sa mort ne l’a pas rendu plus bavard qu’il ne l’avait été en réalité. Cela s’appelle des hypothèses. Pour étayer la thèse du livre, la bonne méthode consiste à les examiner. Non pas à se réjouir que personne, jusqu’ici, ne se soit soucier de le faire. Car là encore, ce défaut de méthode nuit à une cause par ailleurs mieux fondée.
Le comble de la mauvaise foi, qui donne la mesure de votre probité intellectuelle, consiste à insinuer qu’en démontrant l’inconsistance de vos preuves, je ne serais pas autant que vous en train de parler de cette affaire (et mieux que vous), que je n’en parlerais que pour vous empêcher d’en parler. De façon, sans doute, à lutter en faveur d’une immunité générale, en accordant à tout le monde des permis de corrompre :
« [..] Car au-delà des points que vous soulevez comme s’il ne fallait pas parler de ces dossiers nauséabonds - ce qui reviendrait à permettre à la corruption en France de sépanouir en paix- c’est bien cette levée nécessaire du secret-défense sur ces points qu est au coeur de tout, et, derrière, la condition d’une restauration de l’image publique internationale des sociétés françaises du secteur. [..] »
Plus une cause est noble, plus elle oblige ceux qui la défendent à la rigueur. En vous délivrant de cette obligation, vous ne faites que lui nuire. Et en montrant comment vous lui nuisez, je ne fais que la défendre.