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Commentaire de Christophe

sur Nul n'est prophète en son pays


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Christophe Christophe 11 octobre 2007 16:48

@Luciole,

Si je vous suis bien, Levy-Strauss accepterait sur le fond la continuité de l’esprit humain mais aurait tendance à raisonner de façon « discrète » (en terme mathématique) en ce qui concerne la culture et les symboles. Il me semble avoir lu quelque chose là-dessus, mais cela remonte à loin.

En effet, c’est du moins ainsi que j’ai pu utilisé son approche dans mes travaux qui eux aussi sont lointains ! smiley

L’approche de Lévi-Strauss tend vers le formalisme mathématique (reproche recevable d’Esteban) ; du moins en terme de représentation de connaissance.

Quoiqu’il en soit, la classification n’est peut-être pas le dispositif le mieux à même de dévoiler les rapports de causes à effets entre différents aspects d’une culture et de mettre par là en lumière les points communs qui existent entre différentes cultures en termes de processus et de genèse.

La causalité, et nous sommes d’accord, ne peut pas être totalement couverte par la classification. Cette dernière ne permet que de dissocier les concepts abstraits entre eux ; quoique les frontières franches entre les concepts est loin d’être une évidence.

Auparavent, d’un point de vue plus technique, nous utilisions des hiérarchies conceptuelles. Aujourd’hui, nous travaillons plus sur des treillis conceptuels avec une foultitude de lien entre eux ; dont des liens de causalité mais qui sont, à mon sens, peu performants. Pour la causalité, j’ai plutôt tendance à intégrer des notions de logiques par le biais de l’approche existentielle de Sanders Peirce ou l’approche conceptuelle de Sowa (extension de l’approche Peircienne).

Il est possible que, comme le souligne Esteban Manchego, Levy-Strauss tout à son effort louable pour réhabiliter l’image des cultures archaïque face à l’arrogance ethnocentriste occidentale, ait eu peur de dévoiler la violence qu’il pouvait deviner dans les myhtes qu’il étudiait.

Peut-être, mais je préfère plutôt, dans l’analyse des cultures archaïques, l’approche de Malinowski (passant du structuralisme au fonctionnalisme). Dans son étude sur les peuplades mélanésiennes, il ne retrouve pas le complexe d’Oedipe, principalement dû aux relations familiales très particulières des tribus étudiées, ni l’aspect des sacrifices humains dont le bourreau serait les autres. Je ne puis que vous renvoyer sur une partie de ses travaux

Je suis persuadée que si Girard n’a jamais eu cette crainte, c’est qu’il est intimement convaincu de l’égalité entre les humains et j’ai en particulier rarement rencontré d’auteur aussi peu sexiste.

Pour ma part, j’ai sans doute une approche trop scientifique de l’anthropologie, mais on ne se refait pas, même si nous essayons de modérer nos propres tendances. Je pense cependant que Lévi-Strauss et bien d’autres sont convaincus de l’égalité entre les humains. La seule nuance est qu’ils n’ont pas la même façon de transposer, dans leurs actions, des valeurs pourtant identiques à la base ; vous retrouvez d’ailleurs cette même problématique dans la fonction inverse qu’est l’interprétation. Beaucoup de philosophes de l’esprit ont abordé ce point et abondent en ce sens. Nous pourrions dire que si il existe une réalité, il existe plusieurs vérité selon les différentes interprétations que chacun fait d’une même situation.

Je crois qu’il a été dit de Girard qu’il était en quelque sorte un historien des religions dans la mesure où il s’intéresse particulièrement à leur genèse et à leur évolution. Ainsi, il a démontré à travers de nombreux textes antiques la façon dont les mythes grecs s’adoucissaient au cours du temps. On passe de Chronos qui dévore ses enfants, de Jupiter dévoré bébé par les Titans puis revomi par ces derniers dans les récits primitifs, à une idéalisation de l’Olympe figurant la perfection physique dans les derniers temps de la Grèce Antique. Girard souligne que l’idéalisation est à double tranchant, puisque d’un côté, en masquant la violence, elle adoucit la société et d’un autre côté, elle fait perdre en efficacité les rituels religieux et peine à enrayer les crises sociales.

Je ne pense pas à l’idéalisation en exprimant l’abstraction conceptuelle, cette démarche permet d’approcher le plus petit dénominateur commun de l’entendement universel. Nous n’appliquons cette approche qu’à des notions abstraites ; liberté, justice, amour, haine, ... L’idéalisation consiste à exprimer que nous détenons une Vérité. Vu mon propos précédent, il serait contradictoire d’abonder dans le sens de l’idéal. Dans les raisonnements je me contente d’une notion de plausibilité et non de vérité.

Tous les concepts abstraits peuvent prendre une forme différentes dans leur pratique ; tout se résume au compromis communément admis entre chaque valeur et le poids de son opposé. Dans une société, entre le blanc et le noir, il existe une foultitude de gris.

Ce qui reste assez surprenant concernant ce que vous dites sur Girard est qu’il reconnais certaines dicontinuités temporelles (Il me semble que Girard répond avant tout qu’il est facile de dire aujourd’hui que « si nous avions été à la place de nos pères, nous n’aurions pas commis ces crimes ».) mais, a priori, pas spatiales. Si je le suit sur le temporel, je reste sceptique sur l’aspect spatial.


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