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Commentaire de mi2nmi

sur Ingrid Betancourt : et si on se plantait complètement ?


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mi2nmi 1er décembre 2007 03:08

Comment Uribe a torpillé la médiation Chavez

01/12/2007 - Le Figaro, AFP

La diffusion hier des preuves de vie de l’otage franco-colombienne et d’autres captifs aux mains des rebelles colombiens est une victoire diplomatique pour le président Uribe, un tenant de la manière forte.

Contre toute attente, c’est le gouvernement colombien qui a présenté les preuves de vie tant attendues d’Ingrid Betancourt. Jeudi dans la nuit, à Bogota, Luis Carlos Restrepo, le haut-commissaire pour la paix d’Alvaro Uribe, a annoncé que les autorités colombiennes avaient arrêté des miliciens des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) en possession de vidéos, de photos et de lettres des otages.

Un soulagement, certes, pour les familles. Mais pour les partisans d’une solution négociée, la divulgation des preuves de vie par Alvaro Uribe reste le pire scénario possible : elle consacre l’échec d’une médiation prometteuse, celle du président vénézuélien Hugo Chavez. Et elle signe le retour en force dans le dossier d’Alvaro Uribe, qui a toujours prôné la manière forte pour le régler.

Tout indique que le président colombien, dont la volonté de négocier avec la guérilla un échange de prisonniers (otages contre guérilleros emprisonnés) peut être sérieusement mise en doute, a tout fait pour torpiller les efforts de Chavez, finalement démis la semaine dernière de son rôle de médiateur. Depuis, les deux pays voisins sont à couteaux tirés.

Les preuves de vie des otages, et notamment d’Ingrid Betancourt, étaient attendues comme un trophée diplomatique. Malgré trois ans d’un patient et discret travail de facilitation, la France n’était pas parvenue à les obtenir, et Paris se félicitait de l’entrée en jeu de Chavez, considéré comme le seul homme capable de fléchir l’implacable guérilla. Depuis, les nouvelles des otages étaient plutôt attendues du côté de Caracas.

Chavez, médiateur depuis le mois d’août, avait réussi à nouer d’étroits contacts avec la direction des Farc. Il avait demandé à la guérilla de lui faire parvenir les preuves de vie et espérait remettre en mains propres, le 20 novembre, celles d’Ingrid Betancourt à Nicolas Sarkozy lors de son voyage à Paris. La guérilla n’avait pu respecter cette date mais s’était engagée à les lui remettre d’ici à la fin de l’année. On disait même les Farc prêtes à faire d’importantes concessions sur les conditions d’un échange de prisonniers. Peut-être même à libérer un premier groupe de séquestrés. Bref, pour la première fois depuis des années, le dossier, enfin, semblait se dégripper.

Est-ce parce que l’affaire avançait qu’Uribe, prétextant une gaffe diplomatique de Chavez, le démettait brutalement, la semaine dernière, de son rôle de médiateur, provoquant la colère de l’imprévisible tribun vénézuélien ? Ulcéré de voir pêle-mêle Chavez, les Farc, et même l’une de ses plus féroces opposantes, la sénatrice colombienne Piedad Cordoba, gagner grâce aux otages une audience internationale, Uribe attendait son homologue vénézuélien au tournant. Si ce dernier était arrivé à Paris avec les preuves de vie d’Ingrid, Uribe aurait difficilement pu le congédier ainsi.

Les preuves auraient fait l’objet d’une traque dans les jungles colombiennes. Selon une source proche des Farc, Uribe aurait mis en branle pour les intercepter tout l’appareil militaire. Ces dernières semaines, plusieurs régions où pouvaient se trouver les otages ou les messagers des Farc acheminant les vidéos et les lettres auraient été le théâtre d’opérations militaires et de bombardements accrus.

Les preuves de vie d’Ingrid Betancourt et des autres otages sont un premier résultat, tardif, de la médiation avortée d’Hugo Chavez. Il n’est pas anodin que l’obtention de ces preuves par Alvaro Uribe soit le fruit d’une opération militaire. Les cruelles conditions de détention des otages, mises en évidence par les images montrant l’otage franco-colombienne en triste état, permettent au président colombien de durcir encore son discours. Une fois de plus, les familles des otages sentent qu’elles ont été jouées. Elles misent à présent sur le groupe des trois « pays amis » (la France, la Suisse et l’Espagne), qui devraient reprendre, dans un contexte plus difficile que jamais, leur rôle de bons offices.

http://www.betancourt.info/indexFr.htm

Les paramilitaires au cœur du terrorisme d’Etat colombien

Explicitement soutenu par Washington, le gouvernement colombien a annoncé, le 27 novembre 2002, l’ouverture de pourparlers avec les paramilitaires des Autodéfenses unies de Colombie (AUC). Un cessez-le-feu est entré en vigueur le 1er décembre avec cette organisation liée au narcotrafic, massivement impliquée dans la violation des droits humains, alors que les négociations avec l’opposition armée n’ont jamais progressé. Mais Etat et paramilitaires ont toujours fait bon ménage en Colombie.

Par Hernando Calvo Ospina

Pour mettre en échec les organisations d’opposition armée qui s’opposent à lui depuis plus de trente-cinq ans, l’Etat colombien a, de tout temps, employé une stratégie : détruire ou neutraliser le tissu social qui les soutient de façon réelle, potentielle ou présumée. Véritable terrorisme d’Etat, la « sale guerre » qu’il mène repose sur deux piliers fondamentaux : « Les opérations cachées ou clandestines des forces militaires et la mise en place de groupes paramilitaires. Ces derniers sont le centre névralgique de la contre-insurrection menée par l’Etat et, en particulier, par ses forces militaires (1). »

Tant à l’intérieur du pays qu’à l’étranger, certains médias et intellectuels notoires ont servi le discours de l’establishment, répétant que le mouvement paramilitaire constitue un « troisième acteur » dans le conflit, un « électron libre » qui ne peut être contrôlé, même par l’Etat, affaibli, impuissant et victime des « violents » au même titre que la population. Le discours officiel affirme également que ce mouvement est le fruit d’une relation entre narcotrafiquants, militaires dévoyés, propriétaires fonciers et paysans organisés contre les abus de la guérilla - les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et l’Armée de libération nationale (ELN) essentiellement.

Très connu pour ses positions de défense des droits humains, le jésuite Javier Giraldo ne partage pas cette vision : « Une perspective historique nous interdit de définir le mouvement paramilitaire comme un « troisième acteur » dans le conflit, déclarait-il lors d’une conférence publique donnée à Chicago le 17 mars 2001. Ce n’est pas un troisième acteur.C’est le bras clandestin et illégal de l’Etat et il existe depuis plusieurs décennies. Cette même perspective historique nous empêche de considérer l’Etat colombien comme un « Etat de droit ». »

Après le triomphe de la révolution cubaine, en 1959, les Etats-Unis ont conçu la doctrine de sécurité nationale et légitimé les forces armées dans le rôle de garant des institutions et leur a donné pour tâche essentielle - sinon unique - de lutter contre l’« ennemi intérieur ». Ainsi, et en dépit des particularismes nationaux, l’axe de la sécurité repose-t-il dès lors sur la contre-insurrection. « La destruction de l’« ennemi interne » devient l’objectif, voire la finalité suprême de l’Etat (2). » En Colombie, l’un des premiers manuels traitant de la contre-insurrection définit l’« ennemi intérieur » de manière aussi simple que dangereuse : « Tout individu qui, d’une manière ou d’une autre, favorise les intentions de l’ennemi doit être considéré comme traître et traité comme tel (3). »

En 1965, lorsque apparurent les premiers groupes insurgés, le gouvernement émit un décret visant à « organiser la défense nationale » (décret 3398/1965). Un paragraphe autorisa le ministère de la guerre à « armer des groupes de civils avec un matériel habituellement réservé aux forces armées ». Le mouvement paramilitaire bénéficiait ainsi d’un soutien juridique. En 1968, le décret se transforma en législation permanente (loi 48) jusqu’à 1989, année au cours de laquelle la Cour suprême la déclara inconstitutionnelle.

En 1969, un règlement de l’armée avait ordonné « l’organisation militaire de la population civile dans le but de soutenir les opérations de combat (...) sous contrôle direct des unités militaires (4) ». En 1976, la revue des forces armées (n° 83) affirmait que, « si une guerre circonscrite et non conventionnelle entraîne trop de risques, les techniques paramilitaires sont une force sûre, utile et nécessaire aux objectifs politiques ». Sous des sigles aussi fantomatiques que l’Alliance anticommuniste américaine (triple A), des groupes commencèrent à menacer, à assassiner et à faire disparaître les opposants et autres détracteurs du système. Organisés en haut lieu, ces groupes étaient en fait des structures spéciales du service de renseignement militaire.

Au début des années 1980, les FARC et le gouvernement de M. Belisario Betancur s’accordèrent pour négocier une solution au conflit. Les FARC participèrent à la création d’un parti politique, l’Union patriotique (UP), destiné à prendre sa place dans la vie institutionnelle et démocratique. Immédiatement, la « sale guerre » redoubla contre les dirigeants populaires, syndicaux et paysans. « Les efforts pour chercher une solution non violente ou politique au conflit interne ont été perçus par le haut commandement militaire comme des avancées de la « guérilla communiste » vers le pouvoir (5). » Comme les enquêtes officielles l’ont amplement démontré, le haut commandement impliqua des caciques du Parti libéral et du Parti conservateur, des propriétaires fonciers et les chefs de mafia dans le développement de structures paramilitaires criminelles. De plus, l’armée produisit un autre « règlement de combat antiguérilla » (EJC 3-10, Réservé, 1987) divisant les forces subversives en deux camps : « la population civile insurgée et le groupe armé ». Par conséquent, « la population civile est l’un des objectifs fondamentaux des unités de l’armée ».

A elle seule, l’Union patriotique a vu assassiner trois mille de ses militants et sympathisants, parmi lesquels deux candidats à la présidence (MM. Jaime Pardo Leal et Bernardo Jaramillo), presque tous ses maires, édiles et parlementaires. Pour ce « génocide politique », une plainte a été déposée devant la Commission interaméricaine des droits de l’homme de l’Organisation des Etats américains (OEA) contre l’Etat colombien.

Au total, au milieu des années 1990, le terrorisme d’Etat a fait disparaître quelque 25000 personnalités progressistes et membres de la gauche. Ironiquement, tandis que l’opposition légale se faisait massacrer, les mouvements d’opposition armée se sont fortifiés.

Principaux exportateurs de cocaïne

Dans son rapport de 1996, l’organisation américaine Human Rights Watch démontre que la CIA et le Pentagone ont contribué à la réorganisation « des systèmes de renseignement pour aboutir à la création de réseaux de surveillance identifiant et assassinant les civils suspectés d’aider les guérillas (6) ». En 1994, le gouvernement de M.Cesar Gaviria avait mis en place (décret 3567 du 11 février) des associations communautaires de sécurité rurale, les « Convivir », supposées aider la force publique à prévoir les activités des groupes insurgés, grâce à un réseau d’informateurs. La réalité a démontré que les Convivir ont permis de légaliser les réseaux de tueurs à gages au service des narcotrafiquants et des propriétaires fonciers tout en ayant pour objectif principal d’utiliser la population civile comme cache-sexe du mouvement paramilitaire.

Confronté aux pressions internationales, le gouvernement de M. Samper a créé, en décembre 1997, une unité spéciale chargée de capturer les chefs des actuelles Autodéfenses unies de Colombie (AUC) - nouvelle appellation des paramilitaires. Un an plus tard, les résultats brillaient par leur absence. Le jésuite Javier Giraldo raconte que « les groupes de recherche ont non seulement appris à arriver sur les lieux des crimes quand ceux-ci étaient déjà consommés et les criminels en lieu sûr, mais également à désigner des délinquants comme paramilitaires ».

Le 7 janvier 1999, le président Andrés Pastrana accepta de dialoguer avec les FARC, la guérilla la plus puissante militairement, tout comme il prétendit le faire, par d’autres canaux, avec l’ELN. Comme cela avait été le cas pendant l’administration Betancur, la violence paramilitaire s’accrut : tandis qu’en 1999 on enregistrait 168 massacres (assassinat de trois personnes ou plus), leur nombre atteignait 236 en 2000. Le nombre de morts s’éleva à 1226, soit 297 de plus qu’en 1999.

Les statistiques montrent indiscutablement que la diminution des cas de violations des droits de la personne dues aux militaires est allée de pair avec l’augmentation des crimes imputables aux AUC. L’explication de cet « étrange » constat a été donnée par le défenseur du peuple (7) : « Il s’agit d’une nouvelle forme de répression illégale et sans limites que certains analystes ont finement nommée la violence par délégation (8). »

Un autre « détail » n’a pas non plus bénéficié de l’attention nécessaire : les faibles confrontations entre l’armée et les principaux assassins de la population civile, les paramilitaires, à qui sont imputés au minimum 70 % des victimes du conflit. Les AUC compteraient environ 11000 membres dispersés sur tout le territoire national, principalement dans des zones stratégiques visées par d’importants projets économiques. D’après le chef paramilitaire Carlos Castaño, « les pressions de la communauté internationale peuvent influencer le haut commandement, mais, sur le terrain, personne ne pourra jamais diviser des frères unis contre un même ennemi. Je n’ai pas à craindre l’armée parce qu’elle ne peut rien me faire (9) ». Le rapport de la Commission des droits de l’homme de l’ONU, présenté en 2001, confirme : « Le bureau a été témoin de déclarations des autorités de l’armée indiquant que le mouvement paramilitaire n’attente pas à l’ordre constitutionnel et que, par conséquent, l’armée n’a pas à le combattre (...). En revanche, les militaires mènent des opérations d’envergure contre les guérillas, dans lesquelles ils déploient des ressources humaines et logistiques énormes (...). Généralement, l’attaque contre les groupes paramilitaires ne fait l’objet que de faibles escarmouches, réquisitions ou détentions individuelles et sporadiques. »

Outre qu’il reconnaît avoir bénéficié des services d’instructeurs des armées israélienne et colombienne, M.Castaño admet entretenir des relations amicales avec le haut clergé catholique et une bonne partie des dirigeants politiques. Il ajoute que « les Américains ont toléré » l’organisation criminelle (tardivement reconnue par eux comme « terroriste », le 10 septembre 2001). Il admet aussi sans réserve le fait que les AUC sont financées par le trafic de drogue, pire, qu’elles le dirigent (10). Rien de cela n’a empêché M. Castaño d’avoir des relations « amicales » avec la Drug Enforcement Administration (DEA - service américain de lutte contre le narcotrafic) et la CIA, et de participer directement, en lien avec le groupe de recherche de la police colombienne (bloque de búsqueda), lui-même aidé par la CIA et la DEA, à la traque d’autres narcotrafiquants, comme celle qui se termina par la mort de Pablo Escobar en 1993.

En septembre 1997, l’Observatoire géopolitique des drogues de Paris informait que la majorité de la cocaïne arrivant dans les ports espagnols, belges et hollandais provenait des zones côtières colombiennes contrôlées par les AUC. Comme en témoigne un sénateur, on insiste peu sur le fait pourtant avéré que les AUC sont « un nouveau cartel mafieux et militarisé (...) principal exportateur de cocaïne du monde (11) ».

Soutien actif de Washington

Se cantonnant à la répression des guérillas et des paysans producteurs de coca, le plan Colombie, appuyé par Washington, a pour but avoué d’en terminer avec le trafic de drogues. Il n’a mis en oeuvre aucune mesure contre les paramilitaires. Comme à l’accoutumée, le gouvernement américain s’est longtemps contenté de discours, sans imposer d’exigences particulières à son homologue colombien (12). Devant cet état de fait, le jésuite Giraldo pouvait déclarer : « La stratégie militaire et répressive qui, dans le cadre du plan, est mise en place contre le trafic de drogues est pure fiction. Elle ne sert qu’à déguiser l’implication militaire des Etats-Unis dans le conflit politique colombien. »

suite ici :

http://www.monde-diplomatique.fr/2003/04/CALVO_OSPINA/10081


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