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Commentaire de Gazi BORAT

sur Jacques Attali est-il devenu fou ? Ou simplement génial ?


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Gazi BORAT 25 janvier 2008 08:20

A propos de la dérèglementation de la profession de chauffeurs de taxis..

...et des effets collatéraux attendus

CITATION

Après avoir remis un premier rapport d’étape, la commission pour la libération de la croissance française, dite « commission Attali », entre dans le vif du sujet et se penche sur les professions à accès réglementé. Parmi ces professions qui font l’objet d’un numerus clausus, outre les pharmaciens et les notaires, figurent en bonne place les chauffeurs de taxi.

Si vous avez un permis de conduire et que vous voulez devenir chauffeur de taxi, vous devrez obtenir un certificat de capacité professionnelle ; ce certificat garantira la qualité du service que vous fournirez à vos futurs clients. Une fois ce certificat en poche, plusieurs possibilités s’offrent à vous : artisan, vous devrez acheter un véhicule et acquérir une licence, aussi appelée « plaque » ; vous pourrez aussi louer l’un ou l’autre auprès d’une société de taxis ; vous pourrez enfin devenir salarié d’une telle société.

Si vous faites le choix de l’achat d’une plaque, vous devrez débourser jusqu’à 200 000 euros (pour exercer à Paris). Investissement considérable, mais si vous optez pour la location, il pourrait vous en coûter de l’ordre de 20 000 à 30 000 euros par an. On le voit, pour une société qui achète une telle licence et vous la louerait ensuite, l’investissement est très profitable.

Or qui dit rentabilité dit rente. A l’origine de cette rente, la réglementation sur les licences, qui bloque leur nombre total à un niveau très bas. Jacques Delpla et Charles Wyplosz, dans un ouvrage récent, rappellent que s’il y avait 25 000 taxis à Paris en 1925, ce nombre a baissé à 15 000 actuellement. Le nombre de taxis n’a pas suivi la demande, dont une balade dans les rues de Paris ou de grandes villes de province suffit à réaliser qu’elle excède fortement les capacités actuelles de l’offre. Pas d’inquiétude de ce côté : si vous êtes prêts à travailler beaucoup, vous êtes assurés de disposer d’une clientèle abondante.

Mais quid de la valeur de votre investissement ? Même si le prix de la licence a doublé en moins de dix ans, l’avenir est incertain. Nicolas Sarkozy avait accusé les taxis de bénéficier d’une « rente de situation » ; Jacques Attali a évoqué la suppression des licences, reprenant ainsi des idées déjà préconisées par Jacques Rueff et Louis Armand à la fin des années 50. Votre investissement risque bien, si une telle voie était suivie, d’être réduit à néant du jour au lendemain.

On comprend l’angoisse de nombreux chauffeurs : pour beaucoup, la licence constitue l’essentiel de leur capital, dont la liquidation au moment de la cessation d’activité est seule capable de leur assurer une retraite confortable. Pourtant, il est difficile de trouver une justification au maintien d’un nombre aussi faible des licences. En Irlande, suite à la suppression des licences en 1990, le nombre des taxis a augmenté de 150 %. A Stockholm, la même réforme a produit des effets similaires. En France, une telle augmentation représenterait au minimum 50 000 emplois, qui en outre n’auraient rien à craindre des délocalisations.

La demande potentielle existe, et des emplois pourraient y répondre : pourquoi un tel blocage, pénible pour les usagers, délétère pour l’emploi ? C’est qu’il est délicat de trouver les mécanismes permettant d’accompagner une telle réforme, afin de ne pas spolier les détenteurs actuels de licences. Car un passage en force sans compensation se heurterait à de légitimes, ou du moins compréhensibles, résistances de ces propriétaires.

Une voie possible est que l’Etat procède au rachat pur et simple des licences actuelles, à leur valeur de marché ; mais le coût budgétaire serait considérable, de l’ordre de 3 à 4 milliards d’euros. Pourtant, cela ne représente que 60 000 à 80 000 euros par emploi créé ; qui plus est ces emplois seraient durables, alors que le coût pour les finances publiques serait payé une seule fois.

Une autre possibilité serait que l’Etat rachète chaque licence à la valeur qu’elle avait au moment où elle a été achetée, augmentée d’une « juste » rémunération égale à celle de l’épargne sur la même période ; compte tenu de la très forte augmentation récente du prix des licences, cela permettrait de réduire fortement le coût par emploi créé. Une dernière piste consisterait à attribuer gratuitement à chaque titulaire d’une licence, une, voire deux licences supplémentaires, quitte à compenser ensuite pour la perte éventuelle de patrimoine causée par l’effondrement prévisible du prix des licences. Ce mécanisme permettrait, sans léser les actuels détenteurs de licences, d’augmenter très fortement le nombre d’emplois dans un secteur où la demande existe.

Mais quoi qu’il en soit, quelle que soit la solution retenue, le débat ne devrait plus porter sur le maintien ou non du nombre actuel des licences, mais bien sur les moyens à mettre en œuvre pour compenser ceux qui y ont investi des sommes parfois importantes.

Pierre-Yves Geoffard est chercheur au CNRS.

FIN de CITATION

http://www.liberation.fr/rebonds/chroniques/economiques/289056.FR.php

gAZi bORAt


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