Chère madame,
Votre sidération et votre inquiétude me navrent, car elles me renvoient à mon incapacité à transmettre une pensée qui n’a rien à voir avec celle que vous décrivez...
Je ne pense absolument pas que les antidépresseurs ou les autres psychotropes représentent le seul traitement des maladies ou souffrances psychologiques. C’est un problème sémantique. Le mot dépression recouvre de nos jours des réalités extrêmement variées, et c’est bien ça le problème. De nombreux patients en souffrance sont étiquetés "dépressifs" alors qu’ils souffrent en fait de troubles névrotiques ou de personnalité. Ce sont ces erreurs de diagnostic, extrêmement fréquentes, qui sont en grande partie responsables des excès de prescription.
En ce qui concerne votre histoire personnelle, je suis heureux de voir que vous avez pu rencontrer un soignant qui a su soulager une souffrance apparemment intense. Tout le problème est de savoir si vous souffriez réellement d’une dépression, et si c’était le cas, si ce syndrôme dépressif n’était pas une complication d’une névrose ou d’un trouble de personnalité.
Bien souvent, les médecins eux-mêmes se laissent aller, pour ne pas heurter leur patient, à étiqueter "dépression" des maladies qui n’en sont pas, car il est plus valorisant dans notre société de dire "je suis dépressif et je me soigne sans antidépresseurs" que de dire "je suis névrosé en psychothérapie"...
Cordialement
PS : je ne suis pas le docteur Malraux... J’ai choisi ce pseudo car j’ai beaucoup d’admiration pour un des rares intellectuels qui ait su à la fois donner de sa personne dans la lutte anti fasciste et en revenir en pressentant les crimes du stalinisme.