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Commentaire de Babalas

sur L'intercompréhension entre langues de même famille : est-ce l'avenir ou une imposture ?


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Babalas 20 février 2008 21:15

Cher Skirlet...

Cette dernière réponse et le ton que vous employez sont non seulement désolant, mais surtout démontre que vous n’avez pas vraiment saisi mes arguments... Je tente donc une dernière fois de vous éclairer, en essayant particulièrement d’éclairer les points qui vous posent souci :

"Parce que c’est la phonologue qui détermine le groupe linguistique ?.. C’est nouveau"

Non, et vous déformez des propos pourtant exprimés simplement... mais comme je vous le laissait entendre, le son porte aussi un sens. Un suffixe privatif, ou diminutif, pour donner un exemple simple, représente un son qui placé en fin de mot y amène un sens, toujours le même. Si l’élément en question a un son ET un sens correspondant à un système linguistique que vous connaissez, vous le repèrerez dans une grammaire modifiée. C’est cette paire son/sens qui ouvre naturellement une forme de "capacité naturelle" a sentir le sens, et à reconnaitre la fonction d’éléments d’une grammaire par ailleurs étrangère.

Un raisonnement semblable peut être fait en faveur de la grammaire si on choisi la situation ou c’est la grammaire qui appartient à un groupe que vous maitrisez, et non le son. Mais je la crois moins vérifiable dans les faits

"Blasphème, des fautes d’orthographe !"
Non, mais elles révèlent le niveau. Ceux qui ne maîtrisent pas sa langue, qu’ils ne donnent pas de leçons de morale."

Qui donne des leçons de morale, et qui vous a dit que j’écrivais dans ma langue ? Et franchement, pour qui vous prenez vous pour prétendre dicter qu’une forme d’orthographe serait acceptable, et une autre pas ? Vous me lisez, non ? Alors oui, je conteste que l’orthographe standard soit plus valable que la non-standard, l’argotique, la SMS, etc. Leur validité dépend de leur capacité à retranscrire une langue parlée. Nous entrons ici dans une dimension qui semble vous échapper, et à laquelle vous aimerez peut être être introduit : LA LANGUE EST UN OBJET SOCIALE. Et ouais mon pote, au risque que vous me reprochiez encore mes belles paroles, la langue n’est pas issue des dictionnaires ou des manuels de grammaire. Leur étude intensive semble vous avoir permis de devenir polyglotte, vous pouvez en être fiers...

Mais la seule raison d’être d’une langue réside dans son usage dans des relations sociales. Ceci implique qu’il n’y a aucune légitimité à accorder un caractère sacré à un standard écrit. Le savoir, la pensée, la culture, l’art, peuvent tout à fait se développer dans une langue modifiée, mélangée, inventée, au gré de la volonté du locuteur.

Vous écrivez : "Donnez-moi l’exemple des langues qui se sont réunies en une seule". Mon pauvre ami, les exemples sont pléthore... Mais je vous donne mon préféré : je travaille depuis un certain temps maintenant sur une variété nommée Iscamtho (avec le "c" transcrivant un click frontal palato dentaire, si vous vouslez vraiment savoir... Je regrette de ne pas pouvoir vous le faire entendre...). Cette variété est la langue de rue de Soweto depuis près de 30 ans, elle parlée par au moins 4 millions de personne, et dans les 20 dernières années, elle est devenue la langue maternelle de quelques dizaines de milliers sur deux et bientôt trois générations.

L’Iscamtho a une double syntaxe utilisant deux basilect : le premier issu du sous-groupe de Bantu du Sud appellé Nguni, tire notamment sur le Zulu, mais le Xhosa (attention, ça c’est un clique plus difficile...) et le Tsonga ont leur place. Le second est une syntaxe Sotho/Tswana. Au milieu de tout ça se mêlent dans la syntaxe, le vocabulaire, et la phonologie, de l’Afrikaans, de l’Anglais, du Ndebele, du Venda, etc...

Mais plus intéressant, pour vraiment semer le trouble dans votre esprit, sachez que l’Iscamtho est issu d’un jargon appellé Shalambombo, qui a été créé par une trentaine de criminels d’un gang bien identifiés, et qui est devenu la langue des prisons d’Afrique du Sud, ce qu’il est toujours, sous plusieurs noms et variétés.

Vous le voyez, on est loin ici de l’idée d’une langue clairement définit par un corpus de règles, mais plutôt par une vraie convention sociale, large et inclusive de nombreux particularisme. Mais aucun doute, on parle bien d’UNE langue, pas de plusieurs. Et cela ce confirme en terme identitaire.

Mais vous pourrez aussi vous renseigner sur le Tok Pisin, une langue bien documentée : il s’agit d’abord d’un créole issu de l’Anglais et d’une multitude de langues à Port Moresby, Papouasie Nouvelle Guinée. Il est devenu langue officielle il y a quelques années... Intéressez vous aussi au Sheng, à Nairobi.

 

Enfin, vous osez (le ridicule ne tue plus) écrire :

"Dans mon université, il y avait plein d’étudiants africains (et asiatiques, arabes etc.) Comme je m’intéresse aux langues, je leur posais des questions sur leurs langues maternelles. Chose intéressante : jamais je n’ai vu les Africains discuter entre eux dans leurs dialectes... Soit ils utilisaient les langues coloniales de leurs pays (anglais, français), soit le russe - la langue de leurs études - s’ils n’avaient pas une langue coloniale en commun. A mes questions, ils répondaient que les dialectes sont assez localisés et qu’ils ne les parlent pas tous, alors ils utilisent une autre langue qui se trouve être en commun. Alors les contes sur les Africains hyper polyglottes, ça ne prend pas. J’admets qu’ils peuvent parler quelques mots de plusieurs langues, mais qu’ils maîtrisent 6 ou 12 langues au même niveau, c’est de la science-fiction."

Je ne remets pas en cause la véracité de ces témoignages. Mais posez vous donc la question du contexte sociale précis de l’origine de vos témoins. Sont il issu de quartiers riches ou populaires (souvent en Afrique les seuls vraiment ultra-polyglotte) ? Peut-être même sont ils issu des minorités qui ont adopté l’Anglais pou le Francais comme langue familiale (les élites le plus souvent). Enfin, l’Afrique comme l’Asie sont grandes, très grandes. J’ai restreint la description du phénomène au métropoles en développement, dans lesquels un contexte de rapprochement physique d’individus d’origines diverses s’opèrent sous l’effet de l’exode rural. Dans les campagnes, il est rarement utile de connaitre plus de trois langues, et une seule peut souvent être suffisante.

Et puis posez vous la question du PRESTIGE que ces langues peuvent avoir pour vos témoins, dans le contexte africain ou asiatique ou dans le contexte particuliers de l’université européenne ou vous avez pu les rencontrer. Et posez vous la question du prestige qu’il voulait pouvoir exprimer pour eux-même, en se réclamant de peu de compétences linguistique. Il arrive que le prestige désiré devant vous ne soit pas le même que celui désiré à la maison...

 

Enfin, je pourrai regretter que vous vouliez défendre un perspective linguistique quand mon premier poste exprimait clairement une perspective sociolinguistique. Mais à bien y réfléchir, on peut pas dire que vous défendiez quqoi que ce soit, et je suis certain que le dimension "étude sociale" du phénomène linguistique vous pose un réel problème... Haa, Dieu, un système social ? Des contraintes ? Des comportements ou des phénomènes indépendants d’un idéal-type ? Une réalité différente ailleurs... cela semble être beaucoup pour vous, toutes ces révélations, huh ?

 

Allez mon grand, en voyageant un peu dans les régions évoquées, vous verrez que la conception de ce qu’est une langue y est différente. La langue est contextuelle, maléable, et peu formelle pour la plupart des êtres humains. Qui eux comprennent aussi très bien un vision plus rigide et sa nécéssité dans un monde moderne. Prenez exemple.


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