J’ESPERE QUE ÇA VA MARCHER. PREMIÈRE PARTIE, DONC
4. Et si, après tout, le blocus existait bel et bien
La fiction d’un dictateur omnipotent, à quelques encablures de la principale puissance du monde attachée à sa perte, a des vertus pour la propagande occidentale. Elle permet par exemple d’attribuer au seul Fidel Castro les difficultés bien réelles venues de l’extérieur que doit affronter le peuple cubain. Tout est de sa faute. Le prétendu blocus n’existe pas. Quand il en est vaguement fait état, c’est pour laisser entendre qu’il rend un fier service à Fidel Castro, puisqu’il lui sert de prétexte pour maintenir sa dictature sur cette malheureuse île. Voilà, sous diverses variantes, le menu que l’on nous sert jour après jour...
Or, non seulement le blocus existe depuis 1962, année où le décrète Kennedy, mais il n’a cessé de se compliquer au fil du temps d’un lacis devenu inextricable de lois et de décrets de toutes sortes décidés par les différentes administrations, démocrates et républicaines confondues. Ainsi, sous le charmant Clinton, deux nouvelles lois (Torricelli, en 1992 ; Helms-Burton, 1996) sont venues intensifier ce que les Cubains appellent, eux, une « guerre économique tous azimuts ». Toutes deux promulguées, bien entendu, sous la pression de la mafia terroriste cubano-américain (selon la terminologie usitée avec cette force raison dans l’île). La seconde, la Helms-Burton, viole en outre le droit international par son « extraterritorialité ». On n’aura pas de mal à imaginer que Bush et sa clique de « néo-cons » ne sont pas restés à la traîne et que jamais la guerre économique de la plus grande puissance dans ce domaine contre une petite île sous-développée n’a autant fait rage que depuis leur entrée à la Maison-Blanche.
Donc, nous dit-on, le « blocus » n’existe pas, et la communauté internationale n’est qu’une nigaude de se faire ainsi gruger tous les ans par le « dictateur ». Parce que, curieusement, l’Assemblée générale des Nations Unies vote tous les ans depuis 1992, avec une belle naïveté, une résolution intitulée : « Nécessité de lever le blocus économique, commercial et financier appliqué à Cuba par les Etats-Unis d’Amérique. » Et tous les ans depuis 1992, les pays membres de l’ONU présentent un rapport sur les effets de ce blocus sur eux-mêmes, celui de la Révolution cubaine faisant une bonne cinquantaine de pages bourrées d’exemples dans tous les domaines « économique, commercial et financier ».
Et comme l’un des derniers arguments en date de ceux qui nient ce blocus est de s’esclaffer : « Mais enfin, vous voyez bien qu’il n’existe pas, puisque Castro achète depuis l’an 2000 pour des millions de dollars de denrées alimentaires aux USA ! », allons donc voir de plus près en quoi consiste ce fameux « embargo » (selon la terminologie étasunienne). Et pour cela, rien de mieux que de lire le dernier rapport que les premiers concernés, autrement dit les Cubains, ont adressé en août 2006 au Secrétaire général qui, à partir de là, en rédige à son tour un autre sur la foi duquel les pays membres votent, généralement en novembre, en leur âme et conscience.
Mais, au fait, pourquoi ce blocus ? Rappelons d’abord que c’est avant tout un instrument de guerre, comme le prouvent de nombreux exemples historiques. Et que les visées des USA étaient très claires dès le début, même avant son instauration « officielle ». Ainsi, on peut lire dans un document daté du 6 avril 1960 : « …il faut utiliser au plus tôt tous les moyens concevables pour miner la vie économique cubaine [...] ce qui provoquerait la faim, le désespoir de la population et le renversement du gouvernement… » Le but est net, donc, et depuis toujours : renverser « Castro ». Autrement dit, liquider la Révolution cubaine.
Par quels moyens ? En recourant tout simplement aux tentacules que peut étendre dans tous les recoins du monde la puissance économique qui bat monnaie à l’échelle universelle, qui régente les organismes financiers internationaux (dont le Fonds monétaire international et la Banque mondiale), qui possède les plus grosses banques au monde et a suffisamment de moyens de rétorsions extrafinanciers et extraéconomiques pour amener les récalcitrants à résipiscence. Voici donc quelques exemples des pressions extraterritoriales de ce que les USA appellent un « embargo bilatéral » :
· En septembre 2005, la banque HSBC de Londres clôt unilatéralement le compte en dollars de Banco Metropolitano, tandis que sa succursale du Canada retourne les paiements (1 million de dollars canadiens et 819 000 euros) faits à travers Banco Internacional de Comercio S.A. (BICSA), sous prétexte des réglementations anticubaines de l’Office of Foreign Assets Control (OFAC), l’organisme étasunien chargé, en plus d’autres occupations, de faire la guerre économique à Cuba et qui possède plus d’employés utilisés à cette traque qu’il n’en a pour pister les transactions financières du prétendu ennemi public de la nation américaine, Al Qaeda. En février 2006, cette même banque londonienne refuse de virer 15 500 dollars canadiens à Cuba pour le même motif.
· En octobre 2005, de peur de se voir infliger de nouvelles sanctions de la part des USA, l’Union des banques suisses (UBS) cesse de prêter au système bancaire cubaine tout service de comptes courants en dollars et en francs suisses et refuse toutes opérations avec lui.
· Le 7 novembre 2005, Natexis Banques Populaires (France) informe Banco Internacional de Comercio S.A (BICSA) qu’elle n’est plus en mesure de prendre en charge une lettre de crédit non confirmée d’un montant de 903 900 dollars payables en euros, ce qui entraîne l’annulation du crédit et son transfert à une autre banque.
· Republic Bank, dont la maison mère se trouve à Trinité-et-Tobago, informe BICSA par téléphone qu’elle n’était plus en conditions de continuer de gérer les paiements des achats que Cuba fait aux agriculteurs étasuniens, ce qui porte préjudice aux virements d’ALIMPORT, la société cubaine d’importation, alors que ces achats et ces paiements sont pourtant dûment autorisés par les autorités étasuniennes.
· En février 2006, la banque taïwanaise Hua Nan Comercial Bank Ltd. refuse d’ouvrir une lettre de crédit en faveur de la société de commercialisation International Cobalt Company Inc. (ICCI), qui commercialise le produit de la société mixte Cuba-Sherrit traité dans la raffinerie de Fort Saskatchewan, en Alberta (Canada), à cause d’une instruction reçue en début d’année selon laquelle cette dernière fait partie d’un « groupe terroriste ».
· Le 21 février 2006, la Deutsche Bank Trust Company Americas de New York saisit, au motif des dispositions du blocus, un envoi de 330 dollars déposés à l’Union National Bank d’Abou Dhabi (Emirats arabes unis) au nom d’une Cubaine, empêchant celle-ci de réaliser des démarches de passeport à l’ambassade cubaine en Egypte.
· En février 2006, la société d’import-export argentine FURBIA INTERNATIONAL S.A. est contrainte de clore ses comptes à la Discount Bank (Uruguay) et ceux qu’elle a aux USA depuis plus de trente-cinq ans, sur ordre de sa maison mère étasunienne, sous prétexte que le président de la société argentine est inscrit sur la liste des « Nationaux spécialement visés » à cause de ses liens commerciaux traditionnels avec Cuba.
· En mars 2006, la succursale jamaïquaine de la New Scotish Bank (Canada) informe l’ambassade cubaine qu’elle ne pourra plus maintenir son compte ni procéder à des virements de fonds en dollars, en franche violation des lois de la Jamaïque et du Canada, puisque le gouvernement de ce dernier pays a promulgué une Loi relative aux mesures extraterritoriales étrangères (FEMA) qui vise justement à protéger les sociétés canadiennes des dispositions de cette nature contenues dans la loi Helms-Burton.
· Une banque étasunienne met sous séquestre un virement bancaire de 2 154 euros adressé par la NEDBANK (banque de Namibie et d’Afrique du Sud) à la société cubaine PESPORT du ministère de l’Industrie halieutique, en paiement des opérations réalisées auprès de l’entreprise namibienne DRAGNAM.
· Le Groupe de recherche sur l’écologie des oiseaux, rattaché à la faculté de biologie de l’Université de La Havane, ne peut toucher le financement de 30 000 livres sterling que lui a octroyé l’ONG britannique, Whitley Fund for Nature, pour poursuite d’un projet en cours. Le premier virement bancaire de 15 000 livres sterling, qui était passé par la HSBC Bank PLC de Londres à travers New York, n’était jamais arrivé à destination, le virement ayant été retenu sur ordre du département étasunien du Trésor.
03/03 07:15 - vivelecentre
IL n’y a aucun site neutre sur la question vous avez soit les sites officiels , (...)
02/03 21:44 - Jacques-François Bonaldi
J’avoue ne pas saisir le sens de votre phrase. Désolé. Je vous apporte des faits, vous me (...)
02/03 08:27 - vivelecentre
Si on s’y interesse, on ne peut que prendre position et être forcement pour ou contre (...)
02/03 01:13 - Glemercier
@Ronchonaire et à tous Le commentaire précédent et celui ci sont bien de Michel Maugis et non (...)
02/03 01:05 - Glemercier
@ Ronchonaire. Je vais essayer de ne pas vous insulter afin de me mettre dans les conditions (...)
01/03 23:18 - Jacques-François Bonaldi
Vos sources sont l’AIN, bravo. Mais, une fois de plus, que Cuba fasse du commerce avec le (...)
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