"Un aristocrate n’a pas pour caractéristique d’avoir une fonction héréditaire. En revanche, un aristocrate a comme caractéristique d’exercer un pouvoir sans avoir été élu par le peuple. En ce sens, un Commissaire européen est un aristocrate." => D’accord, mais en ce sens aussi, en France, les juges, les procureurs, les préfets, les membres du Conseil Constitutionnel, de la Cour des Comptes, du Conseil d’Etat, les dirigeants de la Banque de France, les membres de cabinets ministériels, etc. sont des artistocrates aussi.
"si un Commissaire européen est un membre de l’exécutif européen et s’il doit défendre l’intérêt communautaire, il devrait être élu par les 494 000 000 de citoyens européens." => Faisons encore une fois le parallèle avec la République Française : un ministre est membre de l’executif français, il n’est pourtant pas élu.
Vous citez ensuite le TCE, Titre III, Article 17, page 28. 5. Je suis désolé, mais je ne vois pas en quoi cet article implique que la France n’obéirat qu’à des lois européennes. Les actes législatifs européen doivent être transposés dans le droit français, mais il n’est sont pas l’exclusivité. De plus l’article mentionne des exceptions, or celles-ci sont nombreuses. Le droit pénal, par exemple, reste géré par les Etats-membres, même si la la Charte des Droits Fondamentaux pose certaines limites (peine de mort, traitements inhumains...)
"Ce point est fondamental : qui décide quel est le niveau le plus approprié ? Qui décide qu’une loi relève du niveau national ? Qui décide qu’une loi relève du niveau communautaire ? Qui décide qu’une loi doit être votée par le parlement français ?" => je vous l’ai dit, pour toutes ses questions il y a une jurisprudence. Ce sont donc des questions qui se tranchent au niveau de la Cour de Justice des Communautés Européennes, via un système de coopération avec les juridictions nationales (le système dit des "questions préjudicielles").
"La France n’est plus libre de choisir sa politique de Défense, ni sa politique diplomatique, ni sa politique monétaire." Je vous l’accorde pour la politique monétaire (que ce soit une mauvaise chose reste à prouver).Mais pour la politique de défense et la diplomatie, je vous met au défi de me trouver un seul texte européen, une seule institution ayant un pouvoir de contrainte légale sur la France dans ces domaines. Il y avait un article un peu équivoque dans le projet de Traité Constitutionnel, mais il n’est plus présent dans Lisbonne. Il y a effectivement une politique de défense et de sécurité commune (PESC), mais elle relève du domaine intergouvernemental, c’est-à-dire de l’unanimité entre les Etats-membres (et la Commission n’y joue aucun rôle). Cela revient finalement à avoir des alliés, je ne vois pas en quoi cela limite notre indépendance.
Enfin, Je ne pense pas du tout que le politique soit plus faible que l’économique, et la meilleure en est justement cette amende infligée à Microsoft. Simplement, elle a été infligée par une autorité politique suffisamment forte, dont nous ne disposons pas au niveau national. Selon vous la France serait en mesure de s’opposer seule aux vélléités de grandres multinationales ? Expliquez donc comment... Charles de Gaulle se serait rendu à l’évidence comme tout le monde s’il avait vécu. D’ailleurs s’il n’a jamais apprécié la logique fédérale en Europe, lui préférant la logique intergouvernementale, il n’a jamais remis en question la logique de la construction européenne elle-même.
Ce qui est paradoxal dans votre argumentation, c’est que vous attaquez essentiellement les institutions européennes qui relèvent de l’intergouvernemental (càd qui émanent des Etats, comme le Conseil, la Commission) et non du Fédéral (le Parlement, qui émane directement des citoyens). Or si vous regardez de près l’histoire de la construction européenne, vous vous apercevrez que l’intégration est quelque chose qui va de pair avec le renforcement des institutions fédérales. Jacques Delors, ex-Président de la Commission et "père" de l’euro et du traité de Maastricht, est notamment le premier Président de la Commission à s’être fait investir par le Parlement, afin de disposer de la légitimité démocratique en plus de celle d’être le mandataire des Etats-membres.
Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que la participation à des institutions multilatérales (intergouvernementales, donc) est aujourd’hui la norme, pour tous les pays (que ce soit l’ONU, l’OTAN, l’OCDE, l’OMC) pour une raison simple : cela est nécessaire pour exister sur la scène internationale. Les seuls pays qui ne font pas partie de ces organisations sont ceux qui n’y sont pas admis par les autres. Par définition, il se prend au niveau multilatéral des décisions qui s’imposent au niveau national sans nécessairement passer par le contrôle démocratique. La Consitution Française de 1958 précise que les accords et traités s’imposent au droit Français.
L’Union Européenne a cette particularité parmi les organisations multilatérales qu’en plus du cadre intergouvernematal, elle s’est dotée d’une institution jouissant de pouvoirs croissants et disposant de la légitimité du suffrage universel : le Parlement, qui représente l’ensemble des peuples européen et régule les decisions prises par les Etats entre eux.
Vous réclamez l’élection de l’executif européen au suffrage universel. C’est tout à fait louable. Mais à ce moment là, la Commission detiendrait une légimité supérieure à celle des gouvernements nationaux. Elisez la Commission au suffrage universel, et vous dépouillez l’Assemblée nationale et le Président Français de tout ce qui fonde leur pouvoir. Dans un tel cas de figure, l’UE sera effectivement la région d’un super-Etat. Or dans les traités actuels ce n’est pas le cas : la France en tant que nation reste un des fondements de la légimité de l’Union Européenne (puiqu’elle nomme en partie son éxecutif), à laquelle elle délègue une partie de ses compétences.
Donc sur le diagnostic (le déficit démocratique de l’UE), je suis d’accord avec vous, mais sur le remède (quittons l’UE), je vous avoue que je ne comprends pas. Nous sommes désormais liés par une mondialisation que NOUS avons largement contribuer à creer (il ne fallait pas coloniser la planète si nous n’en voulions pas). Certes l’UE n’est pas très démocratique, mais reconnaissez que la France ne l’est pas beaucoup plus. Nous devrions travailler à rendre les institutions plus démocratiques, et en ce sens je pense que l’Europe a plus de potentiel que la France.