Maurice De Boisséson : " Les États-Unis sont comme une grande banque en déficit "
La semaine dernière, Bear Stearns, la banque de marché américaine spécialiste de la titrisation, dont le bilan s’élève à 500 milliards de dollars, n’a été sauvée de la faillite que par un apport d’argent de 30 milliards de la Reserve fédérale (Fed). Elle sera probablement vendue pour une somme symbolique à JP Morgan Chase, un grand concurrent. Puis, devant l’ampleur de la crise financière, la Fed a continué à baisser ses taux d’intérêt, sacrifiant le dollar qui ne vaut plus que 100 yens, un franc suisse ou 64 centimes d’euro. Quelles sont les conséquences d’une baisse du dollar ? En regardant la balance des paiements américaine pour 2007, qui vient d’être publiée, on remarque que le déficit de la balance commerciale, c’est-à-dire les échanges de biens et services, est passé de 759 milliards de dollars à 709 milliards. Il y a donc une certaine amélioration, grâce à une forte baisse du dollar qui a favorisé les exportations. Mais le déficit est encore considérable. On remarque aussi que les revenus des investissements américains à l’étranger se sont élevés à 782 milliards, supérieurs aux 708 milliards qui ont été payés aux étrangers comme revenus de leurs placements aux États-Unis. Comme les avoirs américains à l’étranger s’élevaient à 13.800 milliards de dollars en début d’année, le rendement s’est élevé à 5, 5 %. À l’inverse, sur les 16.300 milliards détenus par les étrangers aux États-Unis, le coût n’est que de 4, 3 %. La marge est donc de 1, 2 %, à laquelle s’ajoutent des plus-values sur actifs (certaines Bourses ont beaucoup monté en 2007), et de confortables gains de change. Cette différence de 1, 2 % est la marge que font les États-Unis en tant que banquier du monde, recevant, d’une part, des dépôts des étrangers qui cherchent la sécurité et la liquidité et souscrivent des bons du Trésor malgré une faible rémunération, investissant, d’autre part, avec profit dans le reste du monde. Elle n’est possible que parce que le monde entier a confiance dans le système bancaire américain et dans la stabilité du dollar. C’est cette confiance que les Américains sont en train de perdre et ils risquent de voir s’enfuir les 16.300 milliards de dollars de " dépôts ", ou d’avoir à payer beaucoup plus cher pour les retenir. Les États-Unis ressemblent à une grande banque en déficit, au bord de la crise de liquidité.
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@Charles DEREEPER
La Tribune d’aujourd’hui
vous avez raison agoravox est plus proche de l’AG soixante huitarde (sans la fumée de clopes) que d’un forum de discussions sérieuses ;