Avant de dénoncer le lobbying dans son ensemble, il faudrait avant tout définir ce que l’on entend par là. Trop souvent, l’image des lobbies est assimilée à celle de groupes de pressions financés par le "complexe militaro-industriel", comme on se plait à l’appeler, ou par des grands groupes. Ces "lobbies" ont sans doute amorcé le mouvement et sont certainement ceux dont on entend le plus parler, mais ils sont loin de représenter l’ensemble de l’activité de lobbying.
Pour revenir un peu à l’origine du mot, le terme "lobby" qui signifie "hall" ou "couloir" en anglais, désigne cet espace public autour du parlement américain où les groupes d’intérêt ont l’habitude de venir chercher à agripper un député ou un sénateur au passage, pour tenter de les sensbiliser à une cause. Peu à peu, des entreprises se sont créées pour effectuer ce travail à plein temps au service de clients, le plus souvent de grandes entreprises. D’où l’image négative de groupes d’influence défendant les intérêts de la NRA, des fabricants de tabac ou d’armes, qui est dorénavant accolée aux lobbies.
La réalité n’est pourtant pas aussi simple et il ne faudrait pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Le lobbying n’est plus seulement l’apanage des grands groupes. Il est maintenant courant pour des associations, des ONG ou des syndicats de faire du lobbying. Les pressions réclamant un vote de sanctions contre la Chine à cause de la répression qu’elle mène au Tibet en est un exemple. Les associations réclamant des sanctions contre les sectes, les associations de consommateurs réclamant un contrôle des tarifs des opérateurs Internet, les manifestations de soutien à Ingrid Bétancourt, etc... Toutes ces actions montrent que le lobbying peut être mis au service d’une grande cause.
Le mode de fonctionnement de l’Union Européenne est d’ailleurs extrêmement favorable au lobbies pour cette raison : il permet aux petites structures et aux minorités de s’exprimer librement, afin que les votent ou réglementations ne soient pas seulement le reflet des discours des plus grands. Les nouveaux entrants au sein de l’UE l’ont bien compris et sont massivement présents à Bruxelles. On les voit distribuer brochures et études démontrant les richesses ou les besoins de leurs territoires, afin d’obtenir des aides pour leur développement. Sans ces actions, combien de territoires ruraux isolés auraient pu se développer ? Il suffit pour cela de considérer l’augmentation des aides affectées aux territoires de montagne européens dans les nouvelles programmations. Ou encore la prochaine publication d’un Livre Vert sur la cohésion territoriale, prenant enfin en compte les services à la personne, l’aménagement du territoire, le développement durable, alors que seul le développement économique et l’urbanisme comptaient autrefois.
Enfin, le lobbying a permis de faire naître un vaste mouvement de mise en réseau de petits acteurs, qui se rassemblent, pour des questions de masse critique, autour d’objectifs ou d’intérêts communs. Des associations européennes d’élus de montagne, d’îles méditerranéennes, d’agriculteurs biologiques, de petits opérateurs de proximité, etc. ont ainsi vu le jour. Ils ont permis de créer une réelle dynamique européenne au-delà des seules autorités et institutions politiques, au niveau des populations européennes. Cette union des Européens leur donne la force nécessaire pour contrer l’influence et le pouvoir des grands groupes internationaux, mais permet également de créer un sentiment d’appartenance à l’Union Européenne, de faciliter les échanges culturels et humains, et finalement de construire l’Europe des peuples dont rêvait Schumann.
Je pense par conséquent que le lobbying est essentiel en ce qu’il permet un rééquilibrage des enjeux de pouvoirs, les grands groupes d’influence n’ayant nullement besoin de créer des lobbies pour être en mesure d’influencer les politiques. La corruption n’a-t-elle pas existé de tous temps ? Que resterait-il alors aux minorités et aux populations trop faibles pour faire valoir leurs droits ? De plus, un enradrement très stricte des activités de lobbying permettrait d’amener un peu de transparence dans les jeux de pouvoirs et de limiter également la corruption, les alliances secrètes et toutes ces affaires qui entachent la politique.
Je crois qu’il est temps de combattre les clichés et les amalgammes simplificateurs résumant le mot "lobby" à celui de "grand méchant loup". Finalement, comme toujours, la réalité n’est pas aussi simple qu’on voudrait bien le croire et le monde n’est qu’un vaste dégradé de gris. Il est malheureux de voir la résistance culturelle de la France face au lobbying, activité pourtant adoptée gaiement par tous les autres pays européens qui y trouvent leur compte, alors que nosu accumulons notre retard. Pourquoi faudrait-il que la défense des intérêts de nos populations et de nos territoires soient le terrain de chasse gardée de nos élus ? Faut-il simplement limiter nos actions de lobbying aux visites présidentielles débouchant sur la vente d’Airbus, ou à la défense de la PAC par notre Ministre de l’Agriculture ? Il me semble qu’en la matière la meilleure solution se résume à ce vieil adage : "aide-toi et le ciel t’aidera" !
22/04 18:13 - Walid Haïdar
Article utile, sujet crucial ! Au passage je tiens à signaler à quel point ça fait du bien de (...)
10/04 19:27 - brigit
"Ce sont les lobbies qui sont au pouvoir , car les politiques se soumettent la plupart du (...)
09/04 09:57 - YVAN BACHAUD
Bonjour, C’est un faux problème. Il faut bien sûr d’abord encadrer le lobbying et (...)
09/04 09:37 - YVAN BACHAUD
Bonjour, M. JENNAR passe son temps à critiquer le "système" mais ne propose jamais (...)
06/04 15:20 - brigit
De plus en plus de Députés dénoncent l’influence des lobbies à l’Assemblée (...)
06/04 14:47 - brigit
.L’ARP , société civile des Auteurs - Réalisateurs - Producteurs défend les intérêts (...)
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