Concernant le problème juridique posé par cette affaire, je vous suis reconnaissant de soulever le problème.
Sur le reste, je souhaiterais exprimer un point de vue.
Mon expérience professionnelle du milieu hospitalier, ma connaissance du milieu médical (entouré de médecins depuis tout jeune), et mes rencontres dans le milieu des éducateurs spécialisés m’amènent à ce constat :
Dans notre société matérialiste moderne, nous avons développé une attitude de déni face à la mort et la souffrance qui n’est que le lamentable reflet de la terreur que nous éprouvons face à l’insignifiance de nos petites personnes respectives au regard de la mystérieuse danse des phénomènes.
La conséquence en est une forte propension à l’acharnement thérapeuthique qui conduit à des situations absurdes.
Par exemple aujourd’hui, une personne âgée qui a réussi à accepter sa propre mort et qui souhaite mourir dignement a de grande chance de se voir réanimer et placer en institution (avec barreaux au lit et fenêtres bloquées - factuel !). Si je veux donner à ma mère ce qu’elle m’a demandée, le moment venu, c’est à dire de l’accompagner dans le désert et de la laisser vivcre pleinement sa mort, je devrait probablement enfreindre la loi. Pourtant selon moi, ça c’est la vie, ça c’est la sagesse, n’en déplaise aux êtres aliénés qui peuplent nos contrées occidentales.
Concernant le handicap, si on ne s’acharnait pas à réanimer de grands accidentés ou à faire vivre des nouveaux-nés qui autrement seraient morts, on aurait plus de moyens pour s’occuper des handicapés "naturels" qui eux ne sont pas le fruit d’une façon de penser puérile et absurde. Contrairement à vous je n’ai pas constaté que les éducateurs spécialisés témoignaient d’une grande compassion ni qu’ils avaient la capacité de préserver la dignité des personnes handicapées. Ce que j’ai vu moi, ce sont des egos plus ou moins malades qui éprouvaient de la pitié (ce qui est nettement différent et traduit l’existence d’un certain nombre de névroses chroniques) et agissaient, en pensant bien faire le plus souvent, contre la dignité des personnes. Il existe certainement des exceptions, j’en ai moi-même rencontré quelques unes...
Tant que la mort restera tabou, tant que les hommes s’attacheront à leur existence misérable et craindront la mort, jamais une société saine et harmonieuse ne pourra voir le jour. La souffrance et la mort font partie de la vie. Nous devons les intégrer à notre culture, les reconnaître et apprendre à travailler avec. La naissance des soins palliatifs est un petit pas, mais gare à la dérive de la surmédicamentation au détriment de l’accompagnement psychologique.
Heureusement il existe aujourd’hui quelques médecins et autres professionels de la santé pour dénoncer cette situation grotesque et suffisamment courageux pour prendre parfois le risque de "débrancher" un patient ou de l’euthanasier pour être en accord avec leur intuition profonde.