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Commentaire de NICOPOL

sur Noirs, nous sommes tous Noirs


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NICOPOL NICOPOL 5 mai 2008 21:33

Ce débat sempiternel sur les "races" ou "sous-espèces" humaines tournera toujours en rond tant qu’on ne reviendra pas à la cause sous-jancente du racisme : le processus de segmentation - exclusion - valorisation. Ce processus consiste à poser des critères de segmentation objectifs mais arbitraires, à appliquer ces critères pour segmenter la réalité en deux sous-ensembles, ceux qui respectent ces critères et ceux qui ne les respectent pas (jusqu’ici rien que de très "scientifique"), puis à formuler un jugement de valeur positif sur le sous-groupe auquel on appartient ("nous") et négatif sur le sous-groupe auquel on n’appartient pas ("eux").

Un ouvrage passionnant comme "Le Zoo des Philosophe" de Armelle Le Bras Chopard montre de façon saisissante comment cette mécanique somme toute très banale a fonctionné de tout temps pour justifier la dévalorisation, l’exclusion, l’exploitation et parfois l’extermination de telle ou telle composante de l’humanité par une autre (le "nous" pouvant être suivant les époques et les lieux les Citoyens Grecs, les Blancs, les Hommes, les Hétérosexuels, les Droitiers, telle ou telle Ethnie ou Tribu africaine, asiatique ou américaine ; on pourrait même, avec toutes les réserves, y ranger les fidèles de toute religion qui se proclamerait "l’unique"). Au sens large, et c’est le thème principal de l’ouvrage, le Zoo montre que c’est le même processus qui est à l’oeuvre pour "sortir" l’Humain au-dessus de l’animal (avec toutes les conséquences qui en découlent), le critère utilisé, au demeurant aussi flou et contestable que celui de "race", étant celui de "conscience".

Il semble donc que la tendance pour un groupe humain de trouver un critère arbitraire selon lequel il est "supérieur" et d’ériger ce critère en "absolu" est aussi vieux que notre espèce et universellement partagé, et donc, d’une certaine façon, inévitable. Lutter contre le "racisme" s’apparente donc au combat de Don Quichotte contre les Moulins à Vents. Si même on parvenait à démontrer de façon définitive (ce qui est peut-être déjà fait ?) que la notion de "race" est scientifiquement inopérationnel, même si on parvenait à en convaincre les "racistes", ils ne se mettraient pas pour autant à aimer fraternellement les "noirs" ou les "jaunes" ; ils trouveraient un autre critère et continueraient de les détester en fonction de ce critère ; ils pourraient même continuer par inertie de les détester sans critère objectif.

Au demeurant, il n’y a rien de répréhensible à réfléchir sur des critères de segmentation de l’espèce humaine selon des critères X ou Y (couleur de peau, type de cheveux, forme du crâne), du moment que ces critères sont définis rigoureusement et ont une frontière bien définie (ce que n’a pas, par exemple, le critère noir / blanc) ; il n’est même pas critiquable de chercher des facteurs génétiques dans la stabilité de tel ou tel critère au sein d’un sous-ensemble homogène. Le problème se pose quand l’une des valeurs de ce critère de segmentation est déclaré "bon" et son contraire "mauvais". Donc, arrêtons ce "politiquement correct" horripilant qui consiste à diaboliser et exclure du débat le premier quidam qui parlerait de "race humaine" (je peux décrire en toute objectivité statistique une différence entre 2 sous-groupes sans pour autant que cela signifie un appel à la haine ou au mépris). Limitons nous à se demander si cette notion est utilisée pour classifier et, par delà, mieux appréhender le réel (toute notre intelligence étant précisémment basée sur une "conceptualisation" du réel, forcémment grossière mais opérationnelle), ou bien pour légitimer une exclusion ou une oppression de fait ou ambitionnée.


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