Merci D.A. pour avoir pris le temps de lire une prose qui ne vous était pourtant pas très proche et pour avoir ensuite pris le temps de verser votre vision des choses au débat.
Sur la forme, vite fait bien fait, puisque vous avez eu l’élégance de ne pas vous apesantir dessus plus que de nécessaire : oui, il m’arrive d’être plutôt en colère et oui, dans ces cas là, je ne vois pas franchement l’intérêt de mâcher mes mots. Quant à ceux qui ont relevé dans le style l’intention d’une bobo de jouer à la prolo, ils ne pouvaient pas forcément savoir que je fais juste partie de cette toute petite génération de prolos méritants qui ont eu la chance immense de pouvoir s’éduquer et de croire dans la possibilité d’un mieux-disant social avant que le chômage de masse ne les remettent vertement à leur place. On pourrait ainsi en déduire assez lestement qu’il n’est pas bon d’éduquer les prolos, ils pourraient brusquement se mettre à refuser leur destin de classe !
Sur le fond, quelque part, on se rejoint : cela fait des années que je vois le mur s’approcher à toute allure de nous pendant que nous kalxonnons pied au plancher. C’est juste sur le diagnostique que nos avis divergent.
Ce n’est pas un problème franco-français, mais bien l’impasse globale dans laquelle un modèle de société injuste et irresponsable nous a tous précipité. Le peak oil et les émeutes de la faim ne sont que la mise en bouche de ce qui nous attend vraiment, et là, je doute qu’il reste beaucoup d’échappatoires. Si je fustige ce gouvernement encore plus que le précédent (qui en avait déjà eu pour son grade), c’est que cette politique de pillage effréné des peuples par une poignée de nantis a été encore accélérée, alors même que ses limites se voient absolument partout dans le monde, qu’il n’y a ajmais eu d’amélioration réelle de la condition humaine dans le monde. Il y a d’ailleurs un très bon article sur le mirage du décollage indien, lequel, comme partout ailleurs, se traduit par l’émergence d’une classe supérieure qui s’enrichit très vite pendant que les classes modeste sombrent dans encore plus de misère.
Cet article n’est que le énième d’une très longue série commencée il y a très longtemps, d’où peut-être cette exaspération dans le ton général. Je suis exaspérée de voir le peu de réactions, voire leur totale absence, lorsqu’un ministre d’état est surpris en flagrant délit de mensonge, comme sur le coup des 35h, durée légale du travail gravée dans le marbre, alors que l’objectif final a toujours été le démentèlement de l’idée même de durée légale du travail, puis, au final, la liquidation plus que probable du salaire minimum, dernière entrave à l’exploitation éhontée du travail des autres.
Tu dis finalement que nous dépouiller de toute protection sociale, c’est nous adapter au changement... quel changement ? En finir avec une société de prospérité partagée pour s’enfoncer dans un modèle qui n’est pas sans rappeler le modèle assez sauvage de l’Angleterre du XIXe siècle. En voilà un singulier progrès ! Tu dis que nous n’avons plus les moyens de vivre tous correctement ! Mais n’avons-nous jamais été aussi riches, collectivement ? Peut-on seulement comparer la situation de 1948 quand notre système social s’est mis en place dans un pays ravagé par la guerre, à l’économie exangue, à aujourd’hui, où nous sommes parmi les pays les plus riches du monde.
Tu me suggères de m’expatrier ? Je n’ai jamais prétendu que l’herbe était plus verte ailleurs. D’ailleurs, l’expatriation n’est vraiment plus ce qu’elle était...