Cet article parle de la démocratie en affirmant d’une part que la France est un pays démocratique (« [la démocratie] a fait sa réapparition sous une autre forme au XVIIe siècle en Angleterre, puis à la fin du XVIIIe siècle, aux États-Unis et en France. ») et d’autre part que la démocratie ne peut être qu’une utopie (« L’idéal démocratique reste donc bien une utopie »). Les deux affirmations reflètent bien ce qui est constamment véhiculé à propos de la démocratie, mais qui est faux.
A propos de la « démocratie » il y a en France une désinformation systématique (médias, enseignement public etc.) qui d’une part martelle sans cesse « nous sommes en démocratie » et qui d’autre part, lorsqu’il se trouve des citoyens pour réclamer la mise en place réelle de la démocratie, martelle que « la démocratie n’est qu’une utopie ».
Les citoyens français, et en général les citoyens de l’Union européenne, sont victimes du lavage permanent des cerveaux de la part des politiques, qui parsèment constamment leurs discours du mot « démocratie », mais ne la mettent pas en pratique, et pour brouiller les pistes inventent des nouvelles définitions du mot « démocratie » pour se maintenir au pouvoir sous des déguisements de démocratie, eux et les cercles de pression qui les entourent. Pour ces raisons les citoyens n’y voient en effet souvent plus très clair dans ces discours à propos de « qu’est-ce que la démocratie ».
Il serait souhaitable que dans les écoles les cours commencent chaque jour par la définition de ce qu’est vraiment « la démocratie ». Mais les politiques ne voudront jamais que les citoyens s’éveillent en constatant que dans un pays, dont les cercles qui alternent au pouvoir prétendent qu’il est démocratique, le système mis en place est en vérité anti-démocratique.
La démocratie est dans le contrôle du pouvoir par les citoyens, puisqu’en démocratie le pouvoir doit en permanence, dans ses actions, refléter la volonté de la majorité des citoyens.
Il ne faut pas, comme c’est très souvent le cas, confondre la démocratie avec le fait de pouvoir élire les représentants. Être représentés par des députés élus selon les règles de la majorité des citoyens s’exprimant dans le secret ne signifie pas qu’on est en démocratie.
Le concept de démocratie est ancien. La définition en a été donnée en Grèce il y a des millénaires.
Toutes les redéfinitions, des variantes de sens, qui ont depuis été attachées au mot « démocratie » ne sont donc que des falsifications. La démocratie technocratique, la démocratie des élites, la démocratie des oligarques, la démocratie parlementaire, la démocratie participative, la démocratie représentative - tout cela sont des tentatives de masquer les diverses formes de l’oligarchie technocratique sous des dénominations « démocratie quelque chose ».
La définition qui répond exactement et entièrement à la question « qu’est-ce que la démocratie ? » a été donnée par Aristote (384 à 322 avant JC) :
« Le principe de base de la constitution démocratique c’est la liberté (c’est, en effet, ce qu’on a coutume de dire parce que c’est seulement dans une telle constitution que les citoyens ont la liberté en partage ; c’est à cela, en effet, que tend, dit-on, toute démocratie). Et l’une des formes de la liberté, c’est d’être tour à tour gouverné et gouvernant. En effet, le juste selon la conception démocratique, c’est que chacun ait une part égale numériquement et non selon son mérite, et avec une telle conception du juste il est nécessaire que la masse soit souveraine, et ce qui semble bon à la majorité sera quelque chose d’indépassable [...] De sorte que dans les démocraties, il se trouve que les gens modestes ont la souveraineté sur les gens aisés ; ils sont en effet plus nombreux, et c’est l’opinion de la majorité qui est souveraine. [...] ».
Voici donc ce que disait cet Athénien il y a plus de 2000 ans, bien avant la Révolution française, laquelle quoi qu’on en dise n’a pas mis en place la démocratie véritable.
Exprimées en des termes modernes, le concept de démocratie est donc simple ; les deux conditions nécessaires et suffisantes qui définissent la démocratie véritable sont :
* La liberté d’opinion doit être garantie : cela signifie que les citoyens sont libres d’exprimer et de propager toutes les opinions quelles qu’elles soient.
* Chaque décision politique doit être conforme aux désirs de la majorité des citoyens qui désirent prendre part à la décision.
Il est certain qu’aucune des deux conditions n’est respectée ni en France ni dans l’Union européenne.
Cependant, la démocratie véritable n’est à présent plus une théorie utopique mais est depuis plus d’un siècle devenue une réalité. Certes pas en France, ni dans aucun des États membres de l’Union européenne. Mais il existe pourtant un État européen qui poursuit l’idéal de se rapprocher le plus possible de la démocratie véritable.
Donc le modèle démocratique à suivre existe et a été rodé et amélioré depuis longtemps.
Avec son système politique basé sur la démocratie directe et avec son organisation fédérale, la Confédération Helvétique pourrait être un modèle pour les États membres de l’Union européenne et pour les instances de l’Union européenne (Commission européenne, Conseil de l’Union européenne) qui ont pris l’habitude de prendre des décisions non conformes à la volonté de la majorité des Européens.
Sur les questions fondamentales - la constitution etc. - les citoyens suisses ont la garantie que toute décision sera prise uniquement et obligatoirement après le vote direct des citoyens. Sur les questions qui ne sont pas fondamentales, les citoyens suisses ont la garantie que sur leur demande, donc suite à une initiative des simples citoyens, toute loi peut être soumise à la votation directe de tous les citoyens.
La démocratie véritable, qui est donc dans la pratique basée sur la démocratie directe - avec la possibilité donnée aux citoyens de déclencher les référendums - n’élimine pas les éléments de « démocratie représentative » ni les éléments de « démocratie participative ». La démocratie directe laisse aux uns et aux autres la possibilité de faire des propositions et laisse aux politiques la responsabilité de gérer les affaires de la communauté au quotidien. Mais elle exerce sur les politiques et sur les lobbies (c’est à dire sur les groupes de pression) le contrôle permanent du respect de la règle démocratique : « pour toutes les questions qui touchent la communauté c’est la volonté de la majorité des citoyens qui décide ».
La démocratie véritable, la démocratie directe, cela ne signifie pas une société qui est gérée uniquement par référendums. Le droit aux référendums d’initiative citoyenne est le droit donné aux citoyens d’intervenir lorsqu’ils estiment que la règle fondamentale de la démocratie n’est pas respectée, la règle qui est la suivante : « pour toutes les questions qui touchent la communauté c’est la volonté de la majorité des citoyens qui décide ». Lorsqu’il y a un doute, toute décision politique doit POUVOIR être soumise à la validation. Mais cela NE signifie PAS que toutes les lois sont OBLIGATOIREMENT rédigées d’après les référendums. Il suffit d’observer le système politique suisse pour comprendre les mécanismes de prise de décision : les politiques professionnels (exécutif/législatif, gouvernement/ parlement) et leurs décisions y ont leur place et les votes directs (« référendums ») d’initiative citoyenne n’interviennent que lorsque les citoyens ont un doute et veulent vérifier concernant certaines décisions politiques quelle est la volonté démocratique de la majorité des citoyens.
Dans le contexte de démocratie directe, dont un dispositif important est la garantie de référendums, y compris les référendums d’initiative citoyenne, les politiques ne s’aventurent pas à prendre des décisions qui sont manifestement contraires à la volonté démocratique de la majorité des citoyens. Les politiques sont ainsi obligés d’agir en respectant la démocratie. Et quand ils ne la respectent pas ils s’exposent au risque d’être rappelés à l’ordre au moyen de référendum déclenché suite à l’initiative des citoyens.
La véritable démocratie ne se situe ni à droite, ni à gauche, ni à l’extrême droite, ni à l’extrême gauche. La véritable démocratie ne cherche pas à favoriser telle ou telle autre idéologie économique, la véritable démocratie met en application de façon impartiale uniquement les décisions voulues par la majorité des citoyens, quelles qu’elles soient, ainsi en Suisse certaines décisions peuvent d’après les critères français être qualifiées de gauche, d’autres de droite.
Mais les politiques qui nous gouvernent, en France et dans l’Union européenne, ne veulent pas de démocratie. Dans le système politique actuel en France et dans l’Union européenne les politiques sont élus, ensuite ils prennent des décisions, écrivent des lois, signent les traités internationaux, engagent des dépenses que des générations futures devront rembourser etc., sans vérifier si la majorité de la population est d’accord avec chacun de leurs actes, et même souvent en sachant que la majorité de la population n’est certainement pas d’accord avec certains de leurs actes.
Ce commentaire risque par sa longueur d’avoir l’ampleur de certains articles, mais je souhaite encore répondre à la question suivante posée par un commentateur : la majorité a-t-elle toujours raison ?
De façon collective, la masse des citoyens n’est pas souvent génératrice d’idées constructives. Certaines grandes idées qui apportent le progrès à la communauté viennent d’individus qui sont capables d’exposer leur vision, de l’argumenter et de convaincre les citoyens. Ces individus font progresser l’humanité parfois en étant au départ contre l’opinion du plus grand nombre. Mais il est important que ces individus n’imposent pas leurs idées contre la volonté de la majorité des citoyens : ils doivent convaincre les citoyens et c’est toujours l’opinion du plus grand nombre qui doit décider. Car si c’est une minorité, qui s’octroie le nom de « l’élite », qui décide, alors nous sommes dans une dictature.
La démocratie véritable est gage de stabilité sociale. Là où la véritable démocratie est déjà en place, avec les référendums garantis aux citoyens, comme c’est le cas depuis longtemps en Suisse, existent la stabilité politique et la paix civile. En Suisse existent historiquement deux religions chrétiennes et quatre langues officielles. Les cantons suisses appliquent certaines lois ou règlements locaux, mais la plupart des lois et les orientations de politique générale sont décidées et appliquées au niveau fédéral. Le dispositif politique suisse doit sa stabilité et sa légitimité, et le peuple suisse doit sa bonne entente, à la garantie offerte aux citoyens de disposer de référendums d’initiative populaire au niveau des cantons comme au niveau fédéral. Quel autre État avec plusieurs religions et plusieurs langues se permettrait-il de demander à tous les citoyens conscrits et réservistes de conserver chacun chez soi son arme de guerre avec munitions de combat ? La Suisse se le permet, elle ne craint pas les émeutes, parce que son système politique a depuis longtemps éliminé les tensions sociales par la voie de la démocratie directe, par les référendums.
Concernant ce sujet comme concernant les autres questions qui relèvent des décisions politiques, les articles que l’on peut écrire, sur AgoraVox ou ailleurs, peuvent-ils amener les politiques qui sont au pouvoir à respecter les règles fondamentales de la démocratie véritable ? Cette question est analysée dans l’article « La France et l’Union européenne face aux citoyens : comment obtenir la démocratie ? » qui a été publié sur AgoraVox.
Quelles actions faut-il entreprendre pour obliger enfin les politiques au pouvoir à mettre en application la démocratie véritable, la démocratie dans laquelle chaque décision politique répond aux souhaits de la majorité des citoyens qui se sentent concernés par la décision ?
16/05 17:52 - Mohammed
"Exprimées en des termes modernes, le concept de démocratie est donc simple ; les deux (...)
16/05 13:20 - rush
En ce qui concerne la démocratie, je dis bien qu’il n’y a pas d’absolu en la (...)
16/05 13:11 - rush
Alors, vivement l’instauration de l’isocratie qui permettra aux gens qui (...)
16/05 12:39 - Méric de Saint-Cyr
16/05 12:26 - Méric de Saint-Cyr
ENFIN ! Enfn quelqu’un qui pose la vraie question. Et ma réponse serait ceci dans la (...)
16/05 00:12 - candidat 007
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