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Commentaire de jcbouthemy

sur Deuxième enquête participative : Quelle place pour les pauvres en France ?


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jcbouthemy jcbouthemy 16 mai 2008 14:54

 

Au risque de paraître iconoclaste et de n’être pas compris, j’affirme que la société française maintient volontairement un degré constant de pauvreté.
 
Tout comme l’esclavage autrefois, un nombre important de pauvres n’a pas que des inconvénients…cela maintient une pression forte sur les salaires et par voie de conséquence permet à nombre de nos concitoyens de bénéficier de prestations à faible cout, restauration, services…
D’autre part en cassant le pauvre, en permettant des contrats de travail à la carte, cela permet à toute une catégorie de nos concitoyens d’accéder au statut d’employeur…Ceux là même qui autrefois faisaient rimer employeur et exploiteur, découvrent les avantages d’une femme de ménage, d’un jardinier, d’une nounou…quelques heures tout au plus par semaine. Avec les encouragements du gouvernement par les exonérations fiscales et en plus le sentiment de rendre service à tous ces pauvres qui autrement en seraient réduits à la mendicité.
Quel magnifique tour de passe-passe !!!
Tout comme chacun s’est vu capitaliste et prêt à défendre le système, en possédant quelques actions, bon nombre de nos concitoyens ont découvert la face cachée de l’employeur au risque de devenir impénétrable aux problèmes de son propre employé qui bien souvent aura la délicatesse de ne rien dire sur ses horaires, ses frais de déplacement et autres mesquineries…
 
Mais si le pauvre lui-même se tait, ne se bat pas pour modifier cette situation, il est trop facile d’en faire porter la responsabilité à l’ensemble de nos concitoyens.
 
Mon expérience m’a appris que les règles communes qui s’appliquent à l’ensemble de la population française subissent une interprétation différente lorsqu’il s’agit des pauvres. Si d’ordinaire la justice affiche son devoir de défendre le faible contre le puissant, il en va tout autrement lorsque le pauvre s’adresse à cette même justice. On en revient d’une certaine façon au clivage qui pouvait exister entre les droits d’un homme libre et ceux d’un esclave.
Je me permets de rappeler un seul exemple. Il s’agit du droit constitutionnel d’obtenir un emploi qui figure dans l’Alinéa 5 du Préambule de 1946. Jusqu’à présent la jurisprudence était constante qui accordait une valeur juridique obligatoire à toutes les dispositions contenues dans la Constitution. Le Conseil d’Etat dans un arrêt du 23 juin 1959 avait jugé utile de préciser que Les principes généraux du droit, résultant notamment du Préambule de la Constitution, s’imposent à toute autorité réglementaire, même en l’absence de dispositions législatives.
Il est vrai que ce droit d’obtenir un emploi ne peut concerner que les pauvres puisque les riches n’ont pas vraiment besoin de travailler et que de plus ils disposent de suffisamment de relations pour trouver un emploi.
J’ai donc demandé à la justice de bénéficier de ce droit constitutionnel. Les juges m’ont débouté au motif que le principe posé par les dispositions du cinquième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère la Constitution du 4 octobre 1958, aux termes duquel « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi… », ne s’impose au pouvoir réglementaire en l’absence de précision suffisante, que dans les conditions et les limites définies par les dispositions contenues dans les lois ou dans les conventions internationales incorporées au droit français…
Il s’agit ni plus ni moins que d’une véritable censure d’un droit constitutionnel.
Je me suis alors adressé à toutes les institutions, partis et syndicats généralement soucieux de défendre les droits de nos concitoyens. J’ai même suggéré aux partis politiques une façon de titiller le gouvernement en posant une question sur la façon dont le gouvernement comptait apporter les précisions suffisantes pour éclairer le choix de la justice. En retour j’ai obtenu une réponse unanime : le silence absolu.
 
Afin d’appuyer mon affirmation sur une volonté délibérée de maintenir une partie de la population en état de pauvreté, je voudrais apporter une deuxième preuve de ce que j’affirme.
Beaucoup de gens, en tous les cas, la plupart de nos dirigeants ont intégré le fait que la main invisible du marché était la meilleure façon de résoudre un problème économique. Dans cette logique, lorsqu’il existe une pénurie de main d’œuvre pour occuper certains emplois pénibles, dégradants et mal rémunérés, on s’attendrait à ce que la rétribution de ces emplois augmente jusqu’à atteindre un seuil d’équilibre. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé en Angleterre où les professionnels du batiment gagnent 2 à 3 fois plus qu’en France.
Cependant en France la loi du marché ne semble pas s’appliquer pour ces emplois. Parce que le patronat veille à maintenir les rémunérations au plus bas en contournant cette loi du marché par des moyens la plupart du temps illégaux.
Une partie du voile a été soulevé récemment en ce qui concerne les clandestins de la restauration mais c’est un système qui se pratique depuis très longtemps dans le BTP et autres filières agricoles…
Plutot que d’augmenter les salaires, d’améliorer les conditions de travail, d’innover dans les processus de fabrication, le patronat français a toujours privilégié la stratégie des bas salaires en faisant venir suivant les besoins une main d’œuvre docile…
Ce qui inéluctablement créait de nouvelles générations de pauvreté avec le soutien des bonnes ames et autres restos du cœur prêts à faire preuve de générosité à l’aide de piécettes.
 
Toute société accepte difficilement d’assumer les crimes qu’elle pratique au jour le jour. Comme au temps de l’esclavage, les arguments ne manquent pas pour justifier les différences de conditions de vie entre des êtres humains qui se cotoient tous les jours…

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