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Commentaire de Coquille

sur Ordre et barbarie


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Coquille 3 août 2008 21:13

" J’ai eu le même sentiment que Sisyphe, et tout en lisant l’article je me disais que chaque partie pourrait être développée, nuancée, explicitée "
... questionnée, débattue, présentée sous un autre angle, etc..
Et bien, allons !

Tentative :
Que penser de la volonté d’expansion que nous donnons à notre modèle de société ?
Supposons que nous parvenions à envisager des décisions et attitudes autres que celles dictées par les lois du marché. Supposons que la prise de conscience de chacun amène la conscience collective à privilégier la réduction des inégalités et le respect de la dignité humaine sur les intérêts financiers de chaque entité au détriment des autres (individu, classe, entreprise, pays, groupement de pays). Utopique ? Naïf ? Dangereusement irréaliste ?
Ne trouvez-vous pas, à l’inverse, absurde de considérer que désormais, l’Homme est avant tout soumis au pouvoir d’un système qui l’aurait dépassé... alors même que ce système est une création strictement humaine ? Moi si ! Comme si le Marché était inéluctablement devenu un cadre de vie intouchable, qui évoluerait tout seul au gré des mouvements imposés par un Profit entendu comme une loi naturelle, sur laquelle nous n’aurions pas plus de pouvoir que sur le cours du temps. 
Supposons donc que, nous occidentaux, décidions de reprendre la main sur notre propre organisation collective -imposée au reste du monde- en nous rappelant qu’un projet de civilisation peut (est censé ?) se fonder sur ce que nous entendons comme des idéaux humanistes. 
Pouvons-nous nous contenter d’en débattre entre nous ? Je ne pense pas. Car alors, que faire vis à vis du reste du monde quand nous serions un peu fixés ? Imposer encore notre vision de l’ordre à l’humanité entière en ne lui laissant que le choix de s’y conformer ou crever de faim ou sous les bombes, comme c’est le cas aujourd’hui ?
Ne devons-nous pas plutôt accepter que le "barbare" y prenne part ? C’est mon avis, mais je me demande : Sommes-nous prêts à reconnaître que nous n’avons aucune légitimité à nous poser en maîtres éclairés ? Pouvons-nous consentir à nous intéresser à ce qui sort de notre cadre de plus en plus rigide ? A faire l’effort de traquer les préjugés qui nous poussent à regarder de haut, exclure ou craindre l’étranger, qu’il soit sdf, rom, sans papier, immigré, musulman, chinois... ou encore noir, arabe, racaille ou de toute autre catégorie que nous posons afin de définir des classes d’individus sur lesquels projeter nos peurs, faiblesses ou archaismes ? Ne pourrions-nous pas ouvrir les yeux sur notre barbarie et assumer nos responsabilités collectives dans les monstruosités commises dans et par nos sociétés... plutôt que de toujours chercher un bouc émissaire pour nous éviter les remises en question inconfortables ?

Pensez-vous sérieusement que nous soyons en train d’envisager ces questions en 2008 ?
Pas besoin d’aller chercher bien loin pour se convaincre du contraire. Cette semaine sur Agoravox :
Le discours de Dakar n’est pas raciste. L’idéologie de Guaino ne relève pas du mépris le plus abject, elle est paternaliste. Tout le monde ou presque remercie l’auteur pour son éclairage : http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=42638
Pendant ce temps, Adidas ne peut plus se payer la main d’oeuvre des chinois. 138 réactions en 2 jours :
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=42823
Pour l’occasion de ce commentaire, je parcours le débat qui suit.
Et comme l’auteur, j’ai ce sentiment d’un hors sujet. Faut bien nous occuper...

Autre exemple et non des moindres : nous apprenons cette semaine en France que l’ancien procureur V. Bugliosi veut convaincre la justice américaine de poursuivre G. W Bush pour meurtre de "premier degré" (= avec préméditation, c’est à dire asssassinat) de 4000 soldats américains. Je rappelle l’argumentaire : 
Il existe des preuves "au delà du doute raisonnable" que G. W Bush a sciemment menti au peuple et au congrés américain sur les raisons de la nécessité d’attaquer et d’envahir l’Irak en affirmant que le régime de Saddam Hussein représentait une menace imminente à la sécurité des Etats-Unis. (Ah bon ? J’étais pas au courant...). De sorte que Bush a envoyé, de son propre chef et non pour des raisons d’état démocratiquement débattues au congrés comme il se doit selon la constitution, 4000 soldats américains à la mort
V. Bugliosi " n’oublie pas les quelques 100 000 innocents irakiens morts de façon atrocement violente dans le conflit " dont Bush serait aussi responsable, selon les preuves fondant l’accusation portée. Mais l’on comprend, sans qu’il ne le dise, que ces faits ne saurait relever de la justice américaine. 
http://www.agoravox.tv/article.php3?id_article=20666
Soit. Après avoir écouté attentivement les déclarations de l’avocat, son réquisitoire me semble fondé. Mais là pour le coup, je sais très peu de chose du droit états-unien, qui est affaire de juristes. Admettons donc que du strict point de vue pénal, il puisse avoir raison... et prenons un peu de recul.
Si je ne m’abuse, l’accusation repose sur l’idée que la guerre en Irak n’en est pas une. Puisqu’elle serait le résultat de la décision d’un seul, pour des motifs sinon contraires aux idéaux démocratiques de son pays, tout au moins non soumis à l’appréciation des organes institutionnels invoqués. Dans ce cas, pourquoi ne pas trainer Bush devant le tribunal pénal international pour crime contre l’humanité ? (C’est peut-être l’étape suivante me direz-vous... ). Mais surtout, peut-on considérer qu’un seul homme, aussi puissant soit-il, soit responsable d’un conflit et d’une occupation qui durent depuis maintenant plus de 5 ans ? Si oui, c’est bien la preuve que les pays engagés dans le conflit ne sont pas démocratiques. Si non, que pensez de cette accusation, sinon qu’elle décharge de toute responsabilité toute les nations en question, mais aussi toutes celles qui ne se sont pas donnés les moyens diplomatiques de s’y oppposer fermement ? Ses moyens n’existent pas ou plus ? Comment nous prétendre porteurs d’un ordre mondial civilisé alors ? Personne d’autre que G.W Bush et 3 ou 4 éventuels complices du pentagone n’a quoi que ce soit avoir avec la guerre en Irak ? Sans me prendre pour Jacques Verges, ça me semble relever de la folie collective... Enfin, ce n’est que mon avis, à chaud.


Je suis déprimée d’entendre si souvent autour de moi que toutes les questions posées plus haut relèvent -passez-moi l’expression- de la branlette intellectuelle de gauchos ou de nantis qui ont le loisir de le faire parce qu’ils en ont le temps et les moyens. Qu’il est vain et même indécent de se les poser, en regard de la misère du monde. Ou encore que c’est être naïvement optimiste que de s’en inquiéter, étant donnée la nature fondamentalement bestiale et égoïste de l’homme. 
Personnellement, je crois être assez pessimiste quant à l’avenir proche du monde. Et ? Le pessimisme est-il une raison suffisante à l’abrutissement consenti ? Je ne pense pas. Vous si ?


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