Le Péripate a raison : le secteur "informel" représente environ les 2/3 de l’économie et 90% de l’emploi dans la plupart des pays africains. Ce secteur informel ou non-déclaré n’a rien d’illégal, il s’agit simplement d’artisans et de commerçants qui ne sont pas inscrits sur les registres, qui ne paient pas d’impôts et qui ne tiennent souvent même pas de comptabilité. Cela ne les empêche pas d’être parfois des entrepreneurs redoutables ; j’ai rencontré encore récemment au Sahel des femmes spécialisées dans le commerce de tissu qui avaient amassé de véritables fortunes sans savoir lire ni écrire (mais sachant très bien compter !)
L’analyse des raisons qui poussent ces opérateurs à rester "cachés" est elle aussi très intéressante : la plupart seraient prêts à se déclarer et à payer des impôts (ils en paient d’ailleurs déjà, sous la forme de "cadeaux" aux agents de l’Etat) mais ne le font pas car d’une part les procédures sont trop compliquées pour eux et d’autre part, ils ne voient pas l’intérêt de payer alors que l’Etat ne leur apporte absolument rien. N’oublions pas que nous parlons de pays où même les fonctions régaliennes de l’Etat (sécurité extérieure et intérieure, justice) ne sont pas remplies.
Les appareils d’Etat sont clairement ce qui empêche le développement de l’Afrique depuis les indépendances : d’une part, ils ne sont pas du tout adaptés au contexte socio-culturel africain (et à la culture orale en particulier) ; d’autre part, ils sont complètement corrompus, d’autant plus facilement que les contre-pouvoirs n’existent quasiment pas dans ces pays.