J’ai oublié de citer mes références. Bien que l’imbrication des politiques gouvernementales et de l’initiative privée aux Etats-Unis soit un fait suffisament évident pour qu’un de mes professeurs d’Histoire au lycée l’ait évoqué devant moi, je sens bien que son insertion dans les programmes de l’Education Nationale ne saurait suffir à convaincre certains experts : de tout temps, l’Education Nationale fut un repaire de dangereux léninistes, et on ne saurait trop s’en méfier.
En fait, André Kaspi évoque largement cette ambiguité fondamentale de la politique de Reagan et consort dans ses livres classiques sur la Civilisation Américaine, en deux volumes. Un économiste américain cité par Kaspi a souligné à quel point, en regardant les chiffres, on pouvait croire à une traditionnelle politique keynesienne de relance, si ce n’était le changement fondamental dans les politiques fiscales, avec l’augmentation des prélèvements (financement de l’industrie d’armement) mais le retrait des plus grosses fortunes de l’assiette traditionnelle... On remarquera d’ailleurs que, à chaque fois que les américains ont porté un pouvoir un néolibéral décomplexé, les dépenses militaires ont assez souvent augmenté, comme un moyen commode de soutenir l’économie, tout en prônant hautement un retrait de l’Etat.
Franchement, les mecs, même en étant ouvert à la discussion comme je le suis, l’apprenti historien qui voudra me démontrer par a+b que Kaspi ment sur ce point alors que sa démonstration économique s’appuie, comme Le Péripate, sur l’observation des données chiffrables, celui-là a intérêt à ouvrir des cataractes documentaires. Tout cela pour dire que le mépris systématique des libéraux européens pour des politiques de relance ne s’appuie à mon sens sur rien de concret, mais plus sur une certaine crédulité devant la rhétorique des équipes républicaines à la Maison Blanche, qui se sont bien gardé de pratiquer intégralement leur programme, tout en infectant dangereusement les esprits mal informés de leurs psaumes, comme un moyen commode de désarmer les marchés concurrents des leurs face à leur pénétration économique.