Vous avez raison de dire que la RSA va bouleverser la donne, sachant que la véritable nature de cette mesure est de faire sauter les (relatifs) filets de sécurité que sont les minima sociaux au profit de la précarisation du travail... pour autant que le bénéficiaire du RSA entre dans les crtières d’employabilité (formation, qualification, mobilité...), qu’il y ait effectivement du travail, et que celui-ci soit rémunérateur.
Ce dispositif, dont on ne mesure pas encore aujourd’hui le caractère socialement pernicieux, va creuser l’écart entre jeunes issus de familles structurées et ayant bénéficié d’une formation, et jeunes issus de familles cumulant divers handicaps sociaux (monoparentalité, pauvreté, précarité, mauvaise intégration, logement de mauvaise qualité, faible qualification...).
Au niveau des actuels bénéficiaires de minima sociaux promis à la disparition, le RSA sera la cause d’inquantifiables tragédies individuelles. Les commissions d’insertion de type CLIE, émanations des Conseils généraux, ne sont agies que par des intérêts idéologiques d’ordres statistique et chiffré. Un Rmiste qui ne comprend pas quelle démarche il doit entreprendre, ou qui ne reçoit pas telle convocation (du fait de l’imprécision d’une adresse, par exemple), peut se voir purement et simplement sucrer son allocation... et perdre par là même son logement, lorsqu’il en a un. Les méfaits des contôles policiers exercés par les Caisses d’Allocations Familiales, de même, ne sont plus à démontrer. Vie privée de l’allocataire foulée au pied par de véritables mercenaires de la "traque aux fraudeurs", interrogatoires, vérification de relevés de compte parfois sur une antériorité de deux ans, enquêtes de proximité, prestations suspendues du jour au lendemain au moindre doute quant à la bonne foi de l’allocataire... Un déni de citoyenneté qu’on ne s’emploiera jamais assez à dénoncer.
Or, sachant que les Caisses d’Allocations Familiales sont l’organisme payeur du RSA, et que les recours auprès des médiateurs de la République et des tribunaux administratifs sont des démarches fort longues et exigeant opiniâtreté et moyens, on ne peut pas dire que la situation des futurs bénéficiaires du RSA sera une sinécure.
Certes il y aura moins d’"assistés". Les séides du néolibéralismes en seront ravis. Mais combien de pathologies sociales (désaffiliation, désocialisation, rupture sociale) résulteront de ce désastre ? Et pour quelles conséquences à long terme ?