« Penser d’après soi » et « penser par soi-même », formulations de D’Alembert , et « osez penser par vous-même », injonction de Voltaire dans le Dictionnaire philosophique, (article « Liberté de penser », éd. de 1765), voilà ce que l’on présente presque toujours comme constituant l’idéal neuf et original des Lumières ; ainsi faisait même Emmanuel Kant, peu après D’Alembert et Voltaire :
« La maxime de penser par soi-même en tout temps, c’est les Lumières. »
Or c’est une exigence fondamentale de toute la science et de la bonne philosophie (celle qui ne se fait pas servante de la théologie) depuis les Grecs ; « Le meilleur des hommes est celui qui pense par lui-même à ce qui, plus tard et jusqu’au terme, sera le mieux », écrivait déjà un grand poète épique grec, Hésiode (vers -700) dans ses Travaux (ligne 293). Ces vers d’Hésiode avaient été remarqués par Aristote, qui précisait que si grande que soit son amitié pour Platon, c’était pour le philosophe une obligation que de lui préférer la vérité.