Bonjour,
J’avais écrit il y a quelques années cet article en collaboration avec Guy Serra, un astrophysicien spécialiste de l’Univers froid (ou fossile). Il explique assez bien le type d’informations scientifiques que le satellite Planck a pour mission de récolter au plus près du big-bang, puisque comme vous le savez, plus on regarde loin dans l’Univers, plus on remonte le temps. A l’époque, Guy Serra ne disposait pas d’un tel matériel. II avait mis au point un téléscope (dirigé par un ballon sonde) appelé Pronaos qui avait donné des premiers résultats.
Avant de lire l’article, regardez cette image du fond diffus cosmologique (300.000 ans après le big-bang)
http://img200.imageshack.us/img200/4016/300000ansaprslebigbangc.jpg
Voyage aux sources de l’Univers
L’EFFET Sunyaev-Zeldovitch, sans doute n’en avez-vous jamais entendu parler. Mieux vaut tard que jamais, si vous voulez comprendre l’importance de la découverte des astrophysiciens français. Du nom de deux chercheurs soviétiques, ils désignent leur théorie du début des années soixante-dix. Celle-ci prévoyait une modification du spectre du rayonnement du fond du ciel dans la direction des amas de galaxies. Les amas devant apparaître brillants dans le domaine submillimétrique et plus sombres que le ciel dans les ondes millimétriques. De quoi s’agit-il exactement ? L’Univers tel que nous le percevons aujourd’hui résulte d’une longue évolution. Depuis une quinzaine de milliards d’années, une expansion s’accomplit ; elle a succédé à la singularité du big bang. Dans les phases très primitives de cette expansion (lors du premier million d’années), l’Univers était très dense et chaud, opaque aux rayonnements électromagnétiques, au point que les atomes ne pouvaient pas exister durablement. Avec l’expansion, la densité et la température diminuant, une transition rapide s’est produite, les atomes ont pu se former et devenir stables.
A ce moment-là, l’Univers est devenu transparent et son « rayonnement de corps noir » a survécu. Aujourd’hui, ce dernier baigne tout l’Univers et constitue l’essentiel du rayonnement du fond du ciel nous parvenant depuis toutes les directions. On l’appelle parfois « rayonnement fossile cosmologique », dernier témoin de cette époque très ancienne.Ce rayonnement peut toutefois être affecté par les hasards de ses rencontres ! Ainsi Sunyaev et Zeldovitch ont prévu que la traversée des immenses espaces qui séparent les galaxies regroupées en amas pouvaient modifier le spectre de ce rayonnement. Ces immenses espaces, plus vides que les meilleurs vides fabriqués en laboratoire, sont parcourus par des électrons (particules élémentaires présentes dans tous les atomes) animés de vitesses colossales. Ces électrons vont interagir avec quelques-uns des photons (sortes de grains de lumière, constituants du rayonnement électromagnétique) du rayonnement fossile. Les électrons cèdent alors de l’énergie, de sorte que ces interactions donnent naissance à de nouveaux photons plus énergétiques, décalés vers les plus hautes fréquences : c’est l’effet S-Z.
Ainsi, une mesure relative, par rapport au ciel environnant, de l’intensité du rayonnement fossile cosmologique, fera apparaître, dans la direction d’un amas, un excès dans le domaine submillimétrique (l’Univers froid) et une déficience dans le millimétrique. Cette dernière est observée, depuis quelques années, sur certains amas, par plusieurs équipes dans le monde, dont une en France, avec le projet « Diabolo ». Mais la détection de la partie positive de l’effet S-Z avait jusque-là obstinément échappé à toutes les tentatives.
Un milliard de fois moins que la lumière d’une bougie
Après avoir analysé les images submillimétriques de nuages interstellaires et découvert des condensations froides de matières interstellaires dans notre galaxie (véritables berceaux de futures étoiles) l’équipe française de Pronaos-SPM a poussé plus loin ses investigations. Elle a entrepris d’analyser soigneusement les observations faites dans la direction d’amas de galaxies pour tenter de mettre en évidence la partie positive de la distorsion prévue par Sunyaev et Zeldovitch. Il semble qu’elle y soit parvenue ! Il faut dire que cette détection est extrêmement difficile. La puissance qui lui est associée a une valeur plus faible qu’un milliardième de fois celle correspondant à la lumière d’une bougie ! Des quatre amas observés par Pronaos afin de « visualiser » le phénomène, seule l’observation de l’amas 2163 du catalogue de l’astronome Abell a permis ce résultat. Sur les trois autres amas, les mesures ont subi des perturbations d’origine cosmique.
« La mesure de l’effet S-Z est lourde de potentialités », explique Guy Serra, responsable scientifique de Pronaos. « D’abord parce qu’elle confirme à la communauté scientifique mondiale que sa représentation de l’Univers paraît conforme à la réalité. Ensuite, parce qu’elle va permettre d’en savoir davantage sur l’histoire et la morphologie des grandes structures de l’Univers. Elle devrait ainsi permettre, entre autres, de préciser la « constante de Hubble », qui mesure le rapport entre la vitesse de récession des corps célestes et la distance qui les sépare de la Terre. On sait qu’à grande échelle, plus un corps est éloigné de nous, plus il s’éloigne vite. Mais la constance de ce rapport n’a pu être jusqu’ici mesurée avec précision par les astronomes. » Ainsi, grâce à la multiplication des mesures rendues possibles par Pronaos, comprendre pourquoi et comment l’Univers si homogène dans le passé est devenu aussi hétérogène et structuré aujourd’hui, n’est plus un vain rêve. Et pour les chercheurs français, à l’origine de cette première mondiale, les réponses à ces questions paraissent désormais à portée de main.
Ecrit avec l’aide de Guy Serra, astrophysicien au CESR (Centre d’études spatiales des rayonnements, labo du CNRS) spécialiste de l’Univers fossile.
Le 24 décembre 1997
“À mon sens, l’enjeu de l’astrophysique est aussi un enjeu philosophique. Je suis de ceux qui pensent que la formation sur les questions fondamentales que soulèvent l’astrophysique et la physique devrait irriguer le tissu social. "
Guy Serra, astrophysicien français spécialiste de l’Univers fossile
Note : J’ai envoyé un article plus complet (compilation d’anciens articles) à Agoravox qui a été refusé, à priori pour des raisons de droits d’auteurs (images de l’Univers ?).
N’étant pas rémunérée, je n’ai pas pas le temps d’écrire un nouvel article sur le sujet.
26/05 23:09 - Butters
Question astronomique d’un inculte en la matière :x J’ai entendu qu’à la (...)
20/05 09:15 - Marianne
Bonjour, J’avais écrit il y a quelques années cet article en collaboration avec Guy (...)
18/05 14:28 - Surya
Merci Marianne pour le lien vers la conférence. En ce qui me concerne je n’ai pas encore (...)
18/05 10:04 - Marianne
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