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Commentaire de lucho

sur Cuba : Une intelligence tranquille malgré l'embargo


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lucho 9 juin 2009 12:26

A lire l’article de C. E. Chitour et les différents commentaires, il me semble qu’il existe surtout une incompréhension entre l’image de Cuba vue d’Algérie par l’auteur et celle vue de France par certains commentateurs.

Chitour cite tout d’abord les données du Programme des Nations Unies (1) pour le Développement ( rapport 2007-2008 sur les données 2005) qui indique un Indice de Développement Humain (IDH) de 0.838, ce qui fait passer Cuba dans les pays à Développement Humain élevé.

 Il a , à mon avis, tout à fait raison de relever cette donnée qui mérite d’être encore plus mise en lumière. En effet il est difficile de simplement relever le niveau de développement humain de la population d’un pays sans le rapporter au niveau de richesse nationale dudit pays : comment comparer l’IDH de la Norvège et celui de la Sierra Leone, vue la différence de richesse entre les 2 pays ? La question pertinente est plutôt la suivante : le niveau de Développement de la population d’un pays correspond-il à son niveau de richesse, autrement dit la population d’un pays « en a-t-elle pour son argent » ? Le PNUD essaye de répondre à cette question en faisant un calcul très simple : il fait la différence entre le rang mondial du pays dans le classement de la richesse (PIB) et le rang de classement en IDH : un pays X qui serait 20ème richesse mondiale et 20ème dans le classement IDH a une note de 20-20=0, signifiant que le développement de la population est reliée au niveau de richesse du pays ; un pays Y, 40ème richesse mondiale et 30ème IDH aurait un score de 40-30= +10, signifiant que la population est plus développée que ne le voudrait sa richesse nationale et on peut en conclure que la population Y en a « plus pour son argent que la population X », pourtant plus développée dans l’absolu. Les scores négatifs indiquent au contraire que la population est moins développée que ne le voudrait la richesse nationale.

C.E. Chitour voit  Cuba avec les yeux d’un Algérien, Cuba et l’Algérie étant 2 pays ayant accédé à l’autonomie (indépendance pour l’un, révolution pour l’autre) à peu près à la même époque. J’observe qu’aujourd’hui Cuba présente un IDH de 0.838 et une note PIB-IDH de +43, alors que l’Algérie a un IDH de 0.733 et une note PIB-IDH de -22, indiquant que la population algérienne ne profite pas de la richesse du pays !!!  je rappelle que la France a une note de +8, indiquant que la population est bien développée au regard de son niveau de richesse, et que les Etats-Unis ont une note de – 10, indiquant que les EtatsUniens ne profitent pas vraiment de l’extraordinaire richesse de leur économie !!!

Les Libertés fondamentales, la Démocratie ne peuvent pas revêtir la même importance et représenter les mêmes priorités dans un pays comme la France et dans un pays comme l’Algérie car , comme le dit l’auteur « à quoi sert la liberté mise en exergue si on ne peut pas nourrir le peuple, lui donner du travail, l’instruire, le soigner. »

Malgré tout Cuba ne peut pas représenter un modèle politique :il s’agit d’un un pays sans réelles élections libres, où les dirigeants, au pouvoir depuis 50 ans, concentrent tous les pouvoirs, avec un régime de parti unique, une presse quasi-inexistante et toute à la botte du régime - il faut avoir lu une fois GRANMA dans sa vie ou avoir vu une émission de LA MESA REDONDA à la télé pour savoir ce que l’expression « cirage de pompes » signifie - un « flicage » de la population et un système de délation généralisée comme celui organisé dans chaque quartier par les CDR (Comités de Défense de la Révolution), des brimades organisées et une intimidation permanente des personnes sortant simplement un peu de la « norme révolutionnaire ». Un tel régime est bien sans conteste une dictature et le « despote éclairé » voltairien, pour éclairé qu’il soit reste sans conteste un despote.
Certes c’est vrai que la Révolution a permis à Cuba des avancées nettes dans les secteurs de la Santé et de l’Education, ce dont témoigne l’ Index de Développement Humain particulièrement élevé en rapport de sa richesse nationale, mais , d’une part « on ne peut passer sa vie comme étudiant ou comme malade » ainsi que me l’a dit une voisine un jour à La Havane, d’autre part le taux de mortalité infantile, brandi chaque année par le régime comme un étendard du succés de la Révolution était en 1959 (avant la Révolution) plus bas à Cuba qu’en France, et mais surtout ces avancées ne sont plus ce qu’elles étaient à la belle époque de l’URSS, car ces systèmes étaient financés par la perfusion soviétique et ne reposaient pas sur une réelle prospérité de l’économie Cubaine.
Economie qui souffre de son improductivité catastrophique et du carcan de l’appareil étatique beaucoup plus que de l’embargo etatsunien éternellement invoqué comme excuse ( les USA sont , depuis l’an 2000 et les modifications apportées par Clinton, le 4 ème ou le 5 ème partenaire commercial de Cuba suivant les années et son premier fournisseur de denrées alimentaires -700 millions de dollars d’achats alimentaires en 2008-, l’embargo affectant surtout les possibilités d’accés au crédit. Il est à noter que dans ce pays surtout agricole, 80 % des aliments consommés doivent être importés).
On parle toujours de la gratuité des systèmes de Santé et d’Education, mais cette gratuité n’est qu’apparente car elle repose sur les salaires de misère payés aux professeurs et aux professionnels de santé – le salaire mensuel moyen est d’environ 15 CUC (12 Euros) alors que tous ceux qui connaissent bien l’île savent bien qu’il faut 50 à 60 CUC / mois pour simplement vivre décemment – et tous ces gens ont recours à la « débrouille » ( petits trafics quotidiens, recours massif au marché noir, activités annexes...) pour s’en sortir. Le tourisme et l’introduction du CUC (peso convertible) a scindé la population en 2 : ceux qui ont un revenu en monnaie nationale et ceux qui ont accés aux devises fortes. L’économie Cubaine se relève progressivement aujourd’hui, en partie car la « perfusion » Vénézuelienne ( en partie payée par la vente de services médicaux - 2.3 milliards de dollars en 2008 - au détriment de la couverture sanitaire dans l’île même où manquent les 20.000 médecins en mission à l’étranger) a en partie remplacé l’ancienne perfusion soviétique, mais un régime ne pouvant vivre que sous perfusion est-il vraiment viable ?

En fait l’opinion Cubaine commence elle -même à bouger et certains vieux membres du Parti Communiste Cubain (non des opposants), conscients de « l’enlisement » actuel, commencent à faire des propositions encore inimaginables du temps de Fidel (2).

Il est vrai que le pays est pauvre mais non misérable et que, si on doit être pauvre en Amérique Centrale, il vaut probablement mieux l’être à Cuba. Malgré tout un pays où les jeunes rêvent de devenir barman dans un hotel pour touristes plutôt que médecin ou ingénieur ne peut certainement pas être considéré comme un modèle.

1- Indicateur du Developpement Humain ; rapport PNUD 2007-2008

2- Pedro Campos y varios compañeros « propuestas programaticas » - Kaosenlared- Aout 2008


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